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Billet de blog 12 janvier 2017

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Marine Le Pen en Guyane: une visite dans la droite ligne de l'extrême droite!

Du 15 au 19 décembre, la candidate du FN a débarqué en Guyane emmenant avec elle toute sa haine et ses relents coloniaux. Sa visite de campagne s'est organisée autour de la rencontre du patronat de la filière bois et de la filière de l'orpaillage, ainsi que de la rencontre avec le seul élu guyanais ayant accepté de la rencontrer, le très corrompu Léon Bertrand.

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Malgré un comité d’accueil qui donnait de la voix à l'aéroport de Cayenne, Marine Le Pen a réussi à s'introduire en Guyane en passant par une sortie dérobée de l'aéroport. Une visite historique pour le parti d’extrême droite qui a toujours eu du mal à s'implanter dans les colonies françaises d'Amérique. Lors des dernières élections régionales, le FN n'a pas pu présenter de liste en Guyane par manque de candidats ! Elle a été reçue par son représentant local René Tran Van Nghia, d'origine vietnamienne, a installé son QG dans le Guyane Hôtel propriété de Van Nguyen, vietnamien qui a migré en Guyane dans les années 1980 ... bref, pas très « français de souche » tout ça !

Durant son séjour elle a rencontré les représentants patronaux des filières du bois et de l'orpaillage, promettant de faciliter les exploitations si elle accédait au pouvoir. Exploitations qui avec elle, n'en doutons pas, rapporteraient encore une fois plus à la France qu'à la Guyane, fidèle aux fondamentaux du colonialisme qui veut que l'on pille les richesses d'un territoire pour le profit de sa métropole ! Ensuite elle a visité le Centre Spatial Guyanais (CSG) qui est aux guyanais ce que les mines de Nikel sont aux Kanaks, le symbole de l'exploitation coloniale. En effet, c'est en 1965, que De Gaule décide de délocaliser la base française du Sahara algérien vers la Guyane qui cumule les avantages de sa proximité avec l'équateur et l'absence de risques sismiques, volcaniques ou cycloniques. La Guyane est aujourd'hui la base de lancement de toutes les fusées européennes et d'une partie des fusées russes. Chaque année, plusieurs centaines de millions d'euros de profits sortent du CSG au bénéfice des principaux états européens, la France étant la première à se servir. Parallèlement, les retombées économiques et structurelles sont minces. Les fusées sont construites en Europe et en Russie, offrant des emplois uniquement autour de l'assemblage et des lancements, seul le carburant de la fusée Ariane est fabriqué sur place. Ces activités économiques sont faibles au regard des innombrables risques d'explosions, d'une part, de l'usine de carburant classée « Cévéso » et, d'autre part, des fusées lors de leurs décollages !

Durant sa visite, le seul homme politique guyanais ayant accepté de la rencontrer est Léon Bertrand, ancien ministre de Chirac, maire de Saint Laurent du Maroni (deuxième ville de Guyane) depuis 1983, condamné à 3 ans de prisons ferme en 2013 pour délit de favoritisme et corruption passive, condamnation confirmée en Appel et en Cassation, il attend que soient rendues les modalités de sa peine, il a également été condamné pour complicité d'abus de bien sociaux. Bref, un homme probe tel que les aiment le FN !

Cette visite aura été l'occasion pour le FN de développer ses arguments de campagne et là rien de nouveau à l'horizon. Comme son père il y a 30 ans, Marine Le Pen affirme que les maux des guyanais sont liés aux migrants. N'hésitant pas à affirmer à plusieurs reprises que la vague de violence que connaît la Guyane est liée aux migrants sans le moindre début de preuve ou d'étude allant dans ce sens. Toutes ces propositions s'articulent autour du rejet des migrants avec notamment la suppression de l'Aide Médicale d'Etat ou la non scolarisation des enfants de parents en situation irrégulière. Ces propositions n’empêcheront jamais les personnes victimes de catastrophes humanitaires ou de crises politiques et /ou économiques des pays d'Amérique du Sud et des Caraïbes de venir trouver refuge dans l’îlot européen que représente la Guyane. Par contre, ces mesures fragiliseront encore davantage les populations migrantes et provoqueront des risques sanitaires majeurs ! Concernant les structures des services publiques, elle n'a pu faire d'autres constats que leurs défaillances. En effet, les guyanais sont habitués aux files d'attente de plusieurs heures pour accéder aux bureaux de poste, au centre des impôts, à la Caisse Générale de Sécurité Sociale ou aux urgences des hôpitaux ! Pourtant, Madame Le Pen s'est bien gardée de faire des promesses de développement des infrastructures si elle est élue à la prochaine présidentielle. Là encore, son credo est d'expliquer que si l'on avait empêché les migrants d'entrer en Guyane depuis 30 ans, comme son père le préconisait, on n'en serait pas là ! En d'autres termes les services publiques sont adaptés pour une population inférieure de moitié à ce quelle est actuellement, supprimons donc la population ! Enfin, elle a confirmé le maintient de la colonie guyanaise dans l'escarcelle française en réaffirmant que la France est indivisible, que les guyanais ne seraient rien sans l'Etat Nation. De plus, elle propose de supprimer l'Octroi de Mer (impôt indirecte qui assure un revenu aux collectivités territoriales) sans annoncer d'autres financements, ce qui rendrait de fait la Guyane encore plus dépendante de l'Etat français !

Après son passage sur-médiatisé, il va falloir nettoyer méthodiquement toute la haine qu'elle a déversé, déconstruire pied à pied toutes les idées reçues racistes et xénophobes qu'elle a fait germer dans la tête de certains guyanais. Nous y arriverons car ce qu'ignore Madame Le Pen, c'est que les guyanais ne sont pas des français comme les autres. La Guyane offre une mosaïque culturelle incroyable, avec plus de 30 langues parlées pour 250 000 habitants. Nul besoin d'abandonner sa culture ou de renier ses racines pour être guyanais. Devenir guyanais, ce n'est pas prendre pour ancêtres les gaulois ! La Guyane offre une identité culturelle intégrante laissant la place à chacun d'être ce qu'il est et ce qu'il veut. En effet, comme le précisait le communiqué du Mouvement de Décolonisation pour l’Émancipation Sociale qui appelait à se mobiliser contre la fille du clan Le Pen :  « ont peut être guyanais et se revendiquer antillais, haïtien, surinamais, brésilien ou encore breton ».

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