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Face à un président qui ne cesse de reculer les échéances électorales, la tension continue de monter en République démocratique du Congo (RDC). La dernière journée de manifestations exigeant le départ de Joseph Kabila, s’est soldée par une violente répression, faisant au moins 8 morts, des dizaines de blessés et une centaine d’arrestations. Empêché par la Constitution de briguer un nouveau mandat, Joseph Kabila n’a pas trouvé d’autre moyen pour se maintenir au pouvoir que de retarder régulièrement le processus électoral.
Fixée initialement en décembre 2016, puis reportée en 2017, l’élection présidentielle devrait finalement se tenir… fin 2018, offrant deux ans de pouvoir supplémentaire à Joseph Kabila, à la tête de RDC depuis 16 ans. Pour expliquer ces multiples reports, le gouvernement prétexte le manque de moyens financiers, mais surtout l’insécurité qui règne dans les Kasaï. Mais l’opposition accuse le président congolais d’instrumentaliser les violences dans le centre et dans l’Est du pays pour s’accrocher au pouvoir. Face à l’impasse politique imposée par Joseph Kabila, l’opposition n’a d’autres choix que de s’en remettre à la rue pour provoquer une alternance politique qui ne vient pas.
Colère !
Mais les Congolais, lassés par les atermoiements du pouvoir et les divisions de l’opposition, hésitent entre colère et résignation. Colère, parce que le président Kabila a confisqué toute possibilité de sortie de crise en ne se prononçant jamais sur son retrait de la vie politique et en verrouillant sa majorité qui ne lui a toujours pas désigné de successeur. Colère, parce que le pays continue de s’enfoncer inexorablement dans la violence depuis plus de 20 ans. A l’Est, les massacres sans fin de Beni se poursuivent et le nombre de groupes armés a doublé en une année. Dans les Kasaï, les affrontements entre milices locales et forces gouvernementales ont jeté plus d’un 1,4 million de réfugiés supplémentaires sur les routes, portant à 4 millions le nombre de déplacés au Congo… davantage qu’en Syrie ou au Yémen !
Colère, parce qu’à chaque manifestation de l’opposition, interdite par le pouvoir, la répression se fait de plus en plus féroce. Plus de 80 fosses communes ont été découvertes au Kasaï et chaque grande manifestation de l’opposition se solde par des dizaines de morts, de blessés et de arrestations. Colère enfin, parce que la crise économique condamne plus de 70% des Congolais à vivre en dessous du seuil de pauvreté, alors que la RDC, rongée par la corruption, croule sous les richesses naturelles.
Résignation
Face à un président qui ne veut pas raccrocher les gants, les Congolais sont également tenté par la résignation. A force de jouer la montre, Joseph Kabila est passé maître pour trouver les moyens de torpiller le processus électoral. De concertations nationales en dialogues politiques, de gouvernement d’union national, en débauchage de personnalités d’opposition… le président a pu continuer ainsi gagner du temps. Dernier prétexte en date : le conflit dans les Kasaï a permis de faire perdre de précieuses semaines aux opérations d’enrôlement des électeurs… et faire reculer ainsi d’une année les élections pour les reporter en décembre 2018.
Résignés, les Congolais peuvent l’être également au vue de l’attitude de la communauté internationale, qui, certes sanctionne les caciques du pouvoir pour la répression policière, mais qui ensuite valide le dernier report des élections à décembre 2018, laissant l’opposition bien seule à réclamer le respect des délais négociés dans l’accord politique de la Saint-Sylvestre.
Résignation enfin, car les Congolais s’inquiètent des risques de fraude électorale qui se préparent. Car, si un jour les élections ont lieu… et elles auront bien lieu un jour, la majorité présidentielle s’applique à tout verrouiller pour conserver le pouvoir. Une « machine à voter » a été opportunément présentée par la commission électorale (CENI) comme un moyen « d’aller plus vite aux élections ». Mais l’opposition redoute la mise en place d’une « machine à tricher » très coûteuse. Les opérations d’enregistrement des électeurs, encore en cours, sont également sujettes à caution. Dans certaines provinces, le nombre d’électeurs y est anormalement élevé (jusqu’à 90% de la population), ouvrant la voie à une possible fraude massive.
Enfin, une nouvelle loi électorale, très contestée, a été promulguée in extremis en toute fin d’année. Le texte prévoit la création d’un « seuil de représentativité » pour les législatives qui écarte de fait les petites formations politiques, confortant ainsi l’hégémonie du parti présidentielle (PPRD) sur ses partenaires, qui n’auront d’autre choix que d’y adhérer… ou de disparaître. Dans cette accumulation de (...) Lire la suite sur Afrikarabia.