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Afrikarabia : Plus d’un mois après les élections générales en République démocratique du Congo (RDC), l’opposant Martin Fayulu continue de revendiquer sa victoire sur Félix Tshisekedi. A-t-il raison de contester ces élections ?
Gérald Gerold : Tout à fait. Les missions d’observation de la Conférence épiscopale (Cenco) ou de la société civile (Symocel) ont rendu des rapports très clairs qui prouvent que celui qui a été désigné vainqueur de la présidentielle n’est pas celui qui a reçu le plus de voix. D’autre part, les fuites récoltées des listing de la Commission électorale (Ceni), qu’elle n’a d’ailleurs jamais contesté, montraient très clairement que parmi les trois principaux candidats, celui qui arrivait en tête était Martin Fayulu. Ce candidat a donc le droit absolu de contester le résultat comme il le fait actuellement.
Afrikarabia : Comment qualifier le scrutin de 2018 par rapport aux deux dernières élections congolaises de 2006 et 2011 ?
Gérald Gerold : Je faisais partie de l’équipe de la mission d’observation de l’Union européenne en 2011. La différence qui existe entre ces deux processus électoraux, c’est la différence qui existe entre manipulation et fabrication. En 2011, on a manipulé les chiffres pour faire en sorte que l’opposant Etienne Tshisekedi ne soit pas élu. En 2018, on a véritablement fabriqué des résultats de toutes pièces pour faire élire son fils, Félix. Pour fixer un ordre de grandeur, on avait dû « déplacer » un peu plus d’un million de voix en 2011, alors qu’en 2018, selon une étude du Groupe d’études sur le Congo (GEC), on serait sur une fraude de 3,5 à 4 millions de voix… sans compter toutes les manipulations sur les élections législatives et provinciales.
Afrikarabia : Quel rôle a joué la très contestée machine à voter dans ces élections, et a-t-elle été utilisée dans la fraude électorale ?
Gérald Gerold : Cette machine avait une double fonction. Tout d’abord celle d’une imprimante. Techniquement c’était intéressant. Cela épargnait l’utilisation de papier avec d’énormes bulletins de vote. Ensuite, elle a servi à transmettre des résultats. A la fin du dépouillement, dans chaque centre de vote, on a transmis à l’aide de clés USB ou de communications satellitaires, des résultats aux centres de la Ceni. C’est d’ailleurs à partir des résultats transmis par la machine à voter, qu’a été établi le listing de la Ceni qui a fuité dans la presse. La machine à voter a donc sûrement permis aux dirigeants de la Ceni et aux autorités politiques de connaître les résultats avec un temps d’avance. Ce qui expliquerait pourquoi on a arrêté le travail des centres locaux de compilation au niveau des circonscriptions.
Afrikarabia : C’est à dire ?
Gérald Gerold : Lorsque la Ceni a promulgué les résultats des provinciales et de la présidentielle, 20% des centres locaux de compilation continuaient de travailler sur la présidentielle et aucun n’avait commencé à (...) Lire la suite sur Afrikarabia.