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Une des pièces maitresses du système Kabila vient de tomber ce jeudi à l’Assemblée nationale congolaise. Jeannine Mabunda, la présidente FCC de la chambre basse, a été lâchée par un bon nombre de députés de son propre camp qui ont voté pour sa déchéance par 281 voix contre 200. Un vote « historique » pour les partisans de Félix Tshisekedi. « Un tournant du quinquennat » selon Michée Mulumba, l'un de ses plus proches conseillers du président. Et un tsunami politique pour le FCC de Joseph Kabila qui revendiquait pourtant une majorité de plus de 300 députés sur 500.
Une revanche contre Mabunda
C’est le meilleur des scénarios qui en train de se mettre en place pour Félix Tshisekedi. Le président congolais avait annoncé dans son discours à la Nation du 6 décembre sa volonté de rompre avec son partenaire du FCC pour se constituer une nouvelle majorité à sa main à l’Assemblée afin de réaliser son programme politique. Le président avait prévenu que sans majorité en sa faveur, il dissoudrait l’Assemblée nationale et convoquerait des élections anticipées. Visiblement, la menace a fait mouche.
Cheville ouvrière de l’influence sans partage du FCC sur les institutions congolaises, l’Assemblée nationale a été au coeur de l’offensive politique lancée par les partisans de Félix Tshisekedi. Grâce à une pétition contre sa présidente et son bureau, les députés du parti présidentiel ont su rallier à leur cause les déçus du kabilisme et de son système de gouvernance verticale caporalisé. Pour le politologue Alphonse Maindo, « Certains députés FCC n’étaient pas contents de la gestion de Jeannine Mabunda, et ce vote leur a permis de prendre une revanche, notamment chez ceux qui voulaient la présidence de l’Assemblée. Pour d’autres, ce vote leur permet de se faire une meilleure place chez Tshisekedi que chez Kabila. On a l’impression que Jeannine Mabunda a été sacrifiée pour satisfaire une partie du FCC ».
« L’heure des changements au PPRD »
Dans les rangs du FCC, même si on accuse le clan présidentiel de corruption et de débauchage pour avoir fait changer de bord plusieurs députés, l’ambiance est à l’examen critique. Pour Patrick Nkanga, rapporteur du Bureau politique du parti de Joseph Kabila, « L’heure est venue pour que des changements profonds s’opèrent au PPRD ainsi qu’au FCC. » Il faut dire qu’après l’échec de la présidentielle de 2018, puis celui de la chute de Jeannine Mabunda, la stratégie de la plateforme de l’ancien président est de plus en plus critiquée en interne. Sur la sellette, Néhémie Mwilanya, le coordonnateur du FCC, et Emmanuel Ramazani Shadary, candidat malheureux du camp Kabila à la dernière présidentielle.
Le vote contre Jeannine Mabunda augure-t-il pour autant un changement de majorité à l’Assemblée nationale ? Comme s’en étonne Francis Kalombo, conseiller de Moïse Katumbi sur Twitter : « Où sont passés les 305 députés FCC ? ». Pour les supporters de Félix Tshisekedi, la chambre basse a clairement rallié « l’union sacrée » prônée par le président. Le parti présidentiel pourra-t-il compter sur ces mêmes députés pour constituer une nouvelle majorité favorable à Félix Tshisekedi ? Rien n’est moins sûr.
Une nouvelle majorité encore incertaine
« Pour savoir si la majorité a vraiment basculée à l’Assemblée, il faudra attendre l’élection du nouveau bureau, tempère Alphonse Maindo. Et même en cas de changement de majorité, il faudra savoir combien de temps cela peut durer. La tempête n’est pas encore passée, nous en sommes encore qu’au tout début . » Le vote pour le perchoir sera en effet déterminant pour décider de l’avenir du Premier ministre Sylvestre Ilunga, qui n’a toujours pas démissionné et déclencher l'arrivée de « l'informateur. »
La destitution de Jeannine Mabunda, en dehors du camouflet imposé au FCC, aura permis à Félix Tshisekedi d’officialiser et de consolider ses soutiens dans l’opposition, notamment du côté du MLC de Jean-Pierre Bemba et d’Ensemble de Moïse Katumbi. Eva Bazaïba, la secrétaire générale du MLC a estimé sur Twitter que « le compte à rebours du changement » était désormais engagé en RDC. Tout comme Moïse Katumbi, qui a félicité les députés pour ce « vote historique ».
Fin du kabilisme ?
La partie n’est cependant pas perdue pour le FCC. La plateforme se prépare déjà son plan de bataille pour imposer son choix au perchoir. Le camp Kabila devra certes recoller les morceaux avec les frondeurs, mais surtout, il devra présenter un(e) candidat(e) capable d’offrir une stratégie claire et meilleure gouvernance en vue des prochaines élections générales de 2023. Si les lignes se sont déplacées au sein du FCC, Joseph Kabila n’a pas encore dit son dernier mot. Sa voix sera encore prépondérante sur le choix du candidat FCC au perchoir, sur le choix d’un possible nouveau Premier ministre, et sur la nouvelle bataille que prépare Félix Tshisekedi pour faire tomber le (...) Lire la suite sur Afrikarabia.