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La République démocratique du Congo (RDC), premier pays francophone au monde, regarde avec circonspection et inquiétude l’arrivée de la rwandaise Louise Mushikiwabo à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). A Kinshasa, comme un peu partout, la nomination de la ministre rwandaise des Affaires étrangères a surpris tout le monde. Car depuis maintenant 15 ans, le Rwanda semble tout faire pour tourner le dos à la Francophonie. En 2003, l’anglais est devenu une langue officielle aux côtés du kinyarwanda et du français. Cinq ans plus tard l’anglais a remplacé le français en tant que langue d’enseignement et en 2009, le Rwanda a rejoint… le Commonwealth. C'est d'ailleurs en anglais que le président rwandais Paul Kagame avait annoncé la candidature de Louise Mushikiwabo au secrétariat général de l’OIF.
Un rôle important dans le processus électoral
De nombreuses ONG internationales ont également pointé le mauvais bilan du Rwanda en matière de droits de l’homme et de liberté de la presse, « en contradiction avec l’engagement de l’organisation en faveur de la démocratie ». Mais à Kinshasa, on s’interroge surtout des conséquences de la nomination de la ministre rwandaise sur la crise politique en cours en République démocratique du Congo, à un peu plus de deux mois d’une élection présidentielle remplie d’incertitudes. Car si les relations diplomatiques entre les deux turbulents voisins semblent pour l’instant « apaisées », la nouvelle patronne de l’OIF devra de facto se positionner dans le prochain scrutin électoral de décembre.
L'organisation internationale de la Francophonie avait réalisé un audit du fichier électoral fin mai 2018. Un fichier que l’opposition estime « corrompu et frauduleux ». C’est en effet l’OIF qui avait débusqué les 16% d’électeurs congolais sans empreintes digitales, et dénoncé « l'absence notoire d'un système d'Etat civil et de recensement général de la population ». Depuis, l’opposition a également dénoncé l’utilisation de la machine à voter, dont la fiabilité est discutable et qui n’a pu être ni testée sur le terrain, ni auditée de manière indépendante. Les opposants exigent d’ailleurs le retrait de cette machine, source d'une possible fraude à grande échelle.
Des relations rwando-congolaises délicates
En pleine crise pré-électoral, la RDC se retrouve une nouvelle fois au bord du précipice, alors que le président Joseph Kabila, sur le départ, repousse depuis 2 ans les élections. Et dans ce contexte, la toute nouvelle secrétaire générale de la Francophonie aura un rôle déterminant à jouer face à la contestation du fichier électoral et à l’utilisation de la machine à voter, mais aussi pendant le scrutin (s’il a vraiment lieu) grâce aux nombreux observateurs que doit envoyer l’OIF pour surveiller le vote.
Alors à Kinshasa, on se demande quel sera le rôle de Louise Mushikiwabo dans le chaos électoral qui s’annonce ? Les deux pays, en conflit ouvert puis larvé depuis plus de 20 ans, ont toujours entretenu des relations difficiles. Le « petit Rwanda » est intervenue militairement par deux fois dans le grand Congo voisin, dans un conflit qui a fait, selon des chiffres discutables, plusieurs millions de morts. Des milices congolaises (CNDP, M23), en guerre contre Kinshasa, ont aussi été soutenues militairement par (...) Lire la suite sur Afrikarabia.