Le Je du jeu de nos politiques
Je « pronom personnel défini qui indique la personne qui parle précise » le dictionnaire Larousse.
Depuis que le mouvement politique « En marche » s’est manifesté, le je est devenu le crédo de tous ces nouveaux politiques. Mode et message tout à la fois, mais qui dénote quand même une volonté affirmée de celui qui est et qui de ce fait se fait reconnaître comme un et non comme multiple. S’agit-il de l’affirmation du triomphe de l’individualisme sur la masse où s’agit-il de la pose de celui qui se présente comme l’homme providentiel ? Il traduit l’appropriation personnelle de la fonction incarnée par l’homme.
Le je exclut le nous et le met à distance. Le je marque la volonté et il se pose en s’opposant. Il se veut à part et sur le plan politique au -dessus des autres. Or, ce je affirmé à la moindre parole a de quoi nous inquiéter. Il est généralement manié par les dictateurs et chez nous par un Bonaparte. Or il semblerait que personne ne trouve à y redire. Ce je qui oublie aussi facilement le nous, n’existe faut-il le rappeler dans notre République que par la volonté exprimée du nous, ce nous qui inclut, ce nous qui désigne après une élection, ce nous qui devrait être celui de la modestie, ce nous qui représente la France. Visiblement, on en veut pas.
Il est vrai que le nous, c’est le collectif et tout ce qui est collectif est suspect et on s’efforce de le casser, de le segmenter. En définitive, on veut écraser le nous pour mieux installer le je, celui de l’individualisme, celui de la responsabilité individuelle qui pèse beaucoup moins que le nous.
Ce jeu de l’affirmation d’une volonté qui ne regarde plus l’autre, qui ne le considère plus s’accompagne de la confiscation de la parole sans en avoir été mandaté par le nous. Confiscation de la parole des journalistes, choix de ceux-ci. A quand l’institutionnalisation des journalistes de cour ? Communication contrôlée des membres du gouvernement- nos ministres ne sont plus que de simples exécutants face à un président et un premier ministre tout puissants. Un je qui décide ce que le bon peuple doit savoir et ce qu’il ne doit pas savoir en ce XXIème siècle !
Ce je des hommes (ou des dieux !) de l’Olympe, ce je prétentieux coupe le lien entre la nation et ses représentants. Ce je qui n’est que le résultat du nous, du peuple, s’accompagne souvent du mot magique et vague des valeurs sans qu’on sache vraiment lesquelles tant elles paraissent contradictoires au Je.
Quelles sont les valeurs de ceux qui issus des partis traditionnels se sont précipités vers le nouveau mouvement sans toujours le succès escompté, mais par contre en voulant surtout sauver pensaient-ils leur siège de député ? Ce je, ils l’ont oublié ; élimine, trie, rejette.
Ce je fait bien disparaître le nous, l’ensemble, la République qu’ils s’approprient, d’autant plus qu’il ne veut aucun contrepouvoir, si ce n’est ceux qui lui seront faciles à manœuvrer. Ce je qui s’impose (ordonnances) au plan local et au plan international et qui risque à ce niveau d’être encore plus insupportable. À quand une bataille des egos des grands dirigeants, à moins qu’elle n’ait déjà commencée.
Il est grand temps de remettre le je à sa place et de réintroduire le nous, la France, le peuple. Ces je si outrageusement brandis, c’est nous. Une élection à moins que ce ne soit un coup d’État n’a jamais entériné un je mais un nous, les représentants par la volonté du jeu démocratique. C’est une démocratie du nous et pas du je. La France n’appartient pas à un je. C’est bien au titre des Français que ces gens-là s’expriment et non à titre personnel.
Stop à cette personnalisation outrancière des pouvoirs dans notre République. Autrefois on rappelait que le je était haïssable et qu’il valait m ieux employer le nous de modestie. Nos politiques ont perdu le sens du bien commun autre qu’en termes de compétitivité et de productivité au profit d’un ego démesuré et dont le mépris est apparu avec les Comores-révélateur non seulement d’une non décolonisation des esprits, mais du refus de l’autre. Ce je risque bien d’être à termes très dangereux pour ce nous les citoyens, pour ce nous qui souhaitons un mieux vivre ensemble, pour ce nous expression d la démocratie.