L’interlude de la réinvention du pouvoir se conjugue déjà au passé fugitif. Au moment où nous reprenons le fil de nos points du jour, l’épisode du « Ségur » de la Santé a débouché sur un accord paraphé par la CFDT et FO.
Où est la contrepartie, au fait ?
La contrepartie, c’est le complément de salaire concédé aux hospitaliers. Contrepartie parcimonieuse et mesquine à « la destruction créatrice » des hôpitaux.
« Allez, la suite ! »[1]
« Dans la politique française, l’absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort » (Macron cité par Vincent Lindon)[2]. La hure du roi a trouvé un substitut dans une tête de veau dur en la personne de l’ultime président de la 5ème république. Le voici nanti d’un nouveau gouvernail sur lequel est greffé, en figure de proue, monsieur Jean Castex. A tout le moins, ce gouverneur peut montrer ses muscles puisque, aux côtés des chefs de la CFDT Santé, les chefs de FO Santé ont paraphé un accord d’autant plus historique qu’il est scélérat.
En une seule passe[3], les chefs de FO santé ont renié tout ce qu’ils revendiquaient depuis tant d’années. Les voilà pris dans les filets des « enveloppes globales » qui « plafonnent » les budgets. Les voilà ramenés à ce qu’ils feignaient de ne pas être : des godillots d’Yves Veyrier, le « général » de la confédération FO (ou CGT-Force ouvrière si on se réfère à l’an 1947).
Comme de mal entendu, l’accord FO CFDT Castex s’inscrit dans le cadre des Ordonnances –travail. Mais n’est-il pas avéré que monsieur Jean-Claude Mailly en a été le co-auteur ? Son clone Veyrier fait logiquement la même chose. Idem pour les chefs de FO Santé qui sont acquis aux accords locaux, lesquels « accords locaux » sont une des pièces maîtresse de l’inversion de la hiérarchie des normes en matière de Droit du travail.
Citons cet échantillon de l’Argumentaire du secrétariat national de la Fédération des Personnels des Services Publics et des Services de Santé Force Ouvrière :
« Il y aura pour ceux qui le souhaite la contractualisation individuelle sur la réalisation d’un quota d’heure supplémentaire dans les limites de la réglementation. Un rapport sur l’ensemble de ces mesures sera présenté en CTE ou CSE chaque année. La Fédération n’était pas demandeur de cette axe mais celui-ci fait partie des points imposés par le gouvernement dans la négociation. »[4]
Nous pouvons aussi lire ceci : https://www.force-ouvriere.fr/segur-de-la-sante-fo-signera-le-protocole
Le dialogue social sur ordre macronique et sur ordonnance royale, c’est l’exact contraire de la négociation collective entre syndicats et patronat et même, en l’occurrence, de la négociation avec l’État-patron comme employeur sur la base des revendications syndicalistes, selon le rapport de forces.
Berger et Veyrier ont fait signer leurs fédés Santé. Soit, il y a néanmoins un imprévu : le refus de la CGT – Santé et SUD-Santé qui, ce nous semble, se sont d’abord préoccupé des aspirations des agents hospitaliers, à la différence de FO-Santé qui a été précipitée dans ce piège par la « conf’ » FO.
Nous avons là un aperçu saisissant de ce qui se trame entre Berger-Veyrier-Martinez et Castex autour des retraites et de tout le reste. A défaut de guerre contre « l’ennemi invisible Covidien », nous avons sous les yeux son Théâtre d’opérations intérieures et, même, le calendrier des journées dites « d’action » en septembre…Sans les hautes directions syndicales, le pouvoir ne peut pousser ses feux. Mais, nous les entendrons piaffer à l’instar de l’UD FO des Côtes d’Armor que « ils ne s’arrêteront pas si nous ne les arrêtons pas », sous-entendu : aux gens de « se bouger »…Tout en restant dans les clous des chefs suprêmes des organisations syndicales et de la dite « confédération européenne des syndicats ».
Dans la vraie vie, les choses se passent tout autrement : au lendemain même de l’accord scélérat anti- hospitalier, gilets jaunes et personnels des hôpitaux sont dans la rue, en pleine effervescence contre les destructeurs de Santé publique et leurs associés syndicaux mais pas syndicalistes. Les réseaux sociaux sont en ébullition incessante. Le bouche-à-oreille bruisse de la colère de masses.
Le Monde a relatéla veille du 14 juillet :
« Mais certains en attendent plus et entendent le faire savoir : « Rassemblement prévu place de la République pour un départ vers 14 heures en manifestation vers la Bastille » à Paris, annoncent, dans un communiqué, six organisations, dont la CGT, SUD-Santé, l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF) et le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI). Dans le reste du pays, elles invitent « les personnels et les usagers » à « se mobiliser avec des initiatives dans les hôpitaux (…) et dans les territoires ».
Estimant que le gouvernement « méprise leurs demandes et leurs revendications », elles considèrent comme « une imposture » le Ségur de la santé. »[5]
Il est encore temps pour les chefs de file de la CGT, FO, FSU, Solidaires de renverser la Table ronde permanente où le pouvoir les retient, s’ils ne veulent pas être balayés avec Macron et ses sbires…
VIVE NOUS ! NOUS LES JEUNES, LES FEMMES-TRAVAILLEUSES, LES SALARIÉS, LES RETRAITÉS, ET LA POPULATION QUI SOUFFRE !
[1] Interjection bien connue des « Guignols de l’info » à la fin du siècle dernier et début de ce siècle…
[2] Vincent Lindon sur Mediapart : https://www.facebook.com/Mediapart.fr/videos/225685078719166/
[3] Nous parlons ici des passes en mécanique industrielle : enlèvement de métal sur une pièce sur une profondeur qui est importante lors de l’ébauche, réduite en demi-finition et de l’ordre de 0,02 millimètres en finition voire de 1 centième.
[4] Nous tenons cet argumentaire Santé FO à la disposition de tous nos lecteurs qui nous le demandent, envoi par mail
[5] https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/07/10/des-syndicats-de-personnels-soignants-appellent-a-manifester-le-14-juillet_6045865_3224.html