On refusera donc d'ordonner la politique au pouvoir et à l'Etat. Elle est, elle sera, organisatrice au sein du peuple rassemblé et actif du dépérissement de l'Etat et de ses lois.
Ces deux motifs, Platon les a clairement vus, même si, dans les limites du temps qui est le sien, il les a restreints à ce qu'il appelle la vie des "gardiens" de la cité, assignant tous les autres à des places productives fixes. Les gardiens ne possèdent rien, chez eux règnent le "commun" et le partage, et leur pouvoir n'est que celui de l'Idée, car la cité n'a pas de lois.
On généralisera à l'existence de tous les êtres humains ces maximes que Platon réserve à son aristocratie savante. Ou plutôt : comme Antoine Vitez parlait, quant au théâtre et à l'art, de leur vocation à être "élitaires pour tous", on parlera si l'on veut d'un "aristocratisme pour tous". Mais l'aristocratisme pour tous, c'est la plus haute définition du communisme. Et l'on sait que, pour les révolutionnaires ouvriers du XIXe siècle, Platon était d'abord la première figure philosophique du communisme.
Si l'on entend par le contraire d'une doctrine, non son inversion caricaturale, mais l'affirmation créatrice qui en rend vain tout l'appareillage, alors on comprend ceci : le contraire de la démocratie, au sens que lui donne, au moment de son crépuscule interminable, le capitalo-parlementariste, ce n'est pas le totalitarisme, ce n'est pas la dictature. C'est le communisme. Le communisme qui, pour parler comme Hegel, absorbe et surmonte le formalisme des démocraties limitées.