Ah, c'est du bel ouvrage que ce nouveau mot que l'on croirait sorti de la bouche d'une victime d'un AVC ou de celle d'un ados en quête d'un langage disruptif. Non pas du tout, il a été inventé y compris par le recours à l'anglais pour ceux qui ont des complexes à utiliser le mot "voleur" pour désigner les industriels de la grande distribution qui profitent de l'inflation pour initier une nouvelle pratique commerciale . Devant les tribunaux les magistrats n'ont pas autant de retenue pour qualifier les voleurs de poules. Tiré du verbe anglais "to strink", retrécir. En français on devrait utiliser le mot "réduflation" , mot valise constitué par les mots "réduction" et "inflation". Depuis 2010 les businessmen anglais ont initié le grand pillage sur prétexte de la baisse de la livre sterling. La Coca cola Compagny s'en est inspirée en 2018 en réduisant de 20% le nombre de décilitres dans la bouteille tout en augmentant le prix de vente.
Les consommateurs n'y ont vu que du feu dans leur supermarché habituel alors même que la foire aux voleurs s'était ouverte avec ses stands: Salvetat, Teisseire, Kiri, Lindt, Findus, Pedrigree, Pampers, etc...Il est vrai que nous avons été aveuglés au préalable par une pénurie organisée de divers produits sous prétexte du Covid ou du conflit Ukrainien. Les associations de consommateurs épinglent aujourd'hui les prédateurs industriels mais sans effets sur la pratique persistante. Bruno LEMAIRE, ministre de l'économie, dans un numéro d'acteur studio, s'est insurgé contre la pratique et a annoncé que le gouvernement travaillerait à un projet d'arrêté à la fin du premier trimestre 2024. Des étiquettes devraient apparaître sur les emballages pour informer le consommateur. Volés mais informés. On vit une époque "forminable" comme dirait Stromae.
Mais serions nous réduflés que dans les temples de la consommation.? Que nenni.!! Il y a pire , il y a plus ignoble. Indigne pour le fait que les victimes sont des malades , des personnes alitées, handicapées, soignées à domicile dans une grande chorale néo religieuse du care, le soin dans toute sa dimension religieuse. Oui, le soin en cabinet et plus systématiquement à domicile est aussi réduflé, dans un silence médiatique assourdissant, y compris de la presse dite progressiste , plus centrée sur les faits et gestes d'un premier sinistre ou les tribulations d'une championne de tennis millionnaire et ministre à ses heures creuses. La vocation à tous les deux est pourtant de distraire un peuple qui a perdu depuis bien longtemps sa boussole politique. Durant ce cirque médiatique on ne parlera pas de la vie des sans voix, des sans cravate, les sans visage, ceux qui ne bloqueront pas l'autoroute par leurs fauteuils roulants ni le temple de la distribution, Rungis, et encore moins l'Elysée. Parce que trop malades, isolés, et peut-être en fin de vie.!! Je veux dresser pourtant ici pour eux une barricade de mots, et m'emparer des armes de la colère , y compris si cela fracture la citadelle des biens pensants, ceux qui sont arrivés d'ailleurs à spiritualiser le soin, et à enfermer les soignants dans un sacerdoce , en les récompensant de concerts gratuits de rue et de paroles glorifiantes volatiles. Cette messe n'est pas pour moi un espace de progrés, ni un exercice de citoyenneté, d'autant que cette expression remonte à la monarche de juillet (1832) ou de façon plus comtemporaine au régime d'Augusto Pinochet dans un Chili où la liberté de manifester fut dangereuse. Faut-il alors s'interroger.?
Je suis un aidant indigné par la confrontation avec la réalité du soin proposé à ma compagne depuis plusieurs années, Maria Dolores, 76 ans, maltraitée et non soignée, par des séjours en hôpital (dont celui qui sert de décors à la série désincarnée des "bracelets rouges" (centre hospitalier d'Aracachon installé à la Teste), par des dentistes qui n'apprécient pas les clients handicapés et associent l'édentation au destin normal des seniors, par un traumatologue qui accepte chez une personne âgée qu'une épaule déboitée le reste, "puisqu'il est fréquent qu'une personne âgée vive ainsi à domicile ou en établissement sans problème apparent, dans la limitation de ses capacités" (SIC). Je suis un aidant indigné par des soins à domicile eux aussi parfaitement réduflés, notamment par les kinés et infirmières libérales..!! J'offre à tous ceux qui finissent par croire que leur vécu est la norme, à ceux qui se révoltent bien que privés de leur capacité à rester debout, un éclairage sur la réglementation et la chaîne de responsabilités, sans tabou ,sans complaisance ni complexe pour les uns ou pour les autres. C'est le quotidien stupéfiant de ma compagne que je partage à temps plein qui m'en donne la légitimité. Et que ceux qui s'estiment "mal payés" s'emparent avec courage de la lutte syndicale sans faire le choix facile et indigne de majorer leurs revenus aux dépends des personnes vulnérables. Cadre de l'enseignement à la retraite, mal payé, et militant de tous les instants , je n'ai jamais cédé à la réduflation en réduisant mes cours d'une heure à 15mn. Personne ne m'a offert en retour un concert de casseroles. Et tant mieux d'ailleurs.
LES KINESITHERAPEUTES
C'est un métier conventionné par un accord qui prévoit un tarif de remboursement et une durée pour les divers actes de soins. Le titre XIV de la nomenclature des actes professionnels (NGAP) précise que, sauf exception prévue par le texte "une durée ordinaire de 30mn pour chaque séance" durant laquelle "le masseur kinésithérapeute doit se consacrer exclusivement à son patient".La régle prévoit néanmoins que le kiné, qui n'est plus désigné par sa fonction première de "masseur" (car pratique individuelle) a la possibilité d'accueillir 3 patients, pris en charge simultanément. La condition est que le groupe ait un besoin homogène d'exercices, et la durée reste toujours de 30mn multiplié par le nombre de patients. Trois vélos et c'est parti.!!
Les cotations comprennent les différents actes et techniques de rééducation, que ce soit manoeuvre de gymnastique médical, technique de physiothérapie, massage. Ces cotations ne sont pas cumulables sauf exception de l'acte de rééducation respiratoire où le second acte est côté à 50% se son barême. Une indemnisation de déplacement est prévue .pour les kinés à domicile. Le prix de la séance est déterminé en multipliant l'acte médical de soin (AMS),dont le tarif est fixé par la CPAM, par la cotation de l'acte (7 à 10 en général) figurant dans la nomenclature.Ordinairement le soin est soumis à l'ordonnance d'un généraliste, mais une expérimentation est lancée dans quelques départements pour l'accès direct sans ordonnace , rendu possible à la condition d'un parcours coordonné. C'est la députée Renaissance , médecin rhumatologue, Stéphanie RIST, qui a proposé ce système libéralisé. Ne cherchez pas bien sûr la dynamique corporatiste de nos représentants politiques....
La réalité en cabinet
Il n'est plus à demontrer que dans les cabinets de kinés et principalement les plus grands, le patient est rarement pris en charge individuellement. Les personnes dépendantes qu'il faut accompagner et surveiller ne sont pas les bienvenues. Rares sont les kinés à s'occuper ainsi des patients durant 30mn. Ceux-là sont des moines shaolins. Les autres vous expédient pour la séance sur ces machines que vous auriez pu vous procurer chez un équipementier sportif. Ma compagne souffant d'une maladie neurologique très invalidante s'est vu ainsi refuser l'accès à un grand centre de kinés annexé à une clinique de la périphérie toulousaine. Un autre kiné en Gironde, après plusieurs séances, est venu un jour nous faire comprendre à mots couverts qu'il souhaitait que nous arrêtions de venir. Les cabinets sont transformés en salle multi sports et les kinés deviennent des coatchs qui gérent des salles de remise en forme dans lesquelles gesticulent et pédalent en série des rangées de malades plus ou moins autonomes. Et là on dépasse allégrement les 3 patients par kiné.!! Une machine à cash discriminante pour les plus invalides.
La réalité à domicile
Avec le patient pour seul témoin on est fréquemment dans le drive et la commande est prête en 10mn. Avec les plus âgés , les plus dépendants, on fait un tour de table et c'est fini, voire on reste dans le lit ou le fauteuil. Parfois on ne passe pas chez le client même si le nombre de visités déclarées et remboursées reste le même. Les usagers seuls et invalides , cloitrés chez eux, ne se plaignent que rarement, avec la peur de perdre le kiné, car les volontaires du domicile sont rares, et "après tout c'est la sécu qui paye". En général ce sont les kinés remplaçants, jeunes diplômés, étrangers, qui sont recrutés par le titulaire du cabinet qui récupère au passage 20 à 35% de la prestation de ses collaborateurs itinérants..
Les plaintes
Il ne faut pas aller très loin pour les trouver. Sur le forum AMELI, les plaintes des usagers sont récurrentes sur la durée des séances à domicile. Tel Léon qui dit ceci: " Je collecte régulièrement les témoignages des personnes ayant des séances de kinésithérapie à domicile, toutes constatent que la durée de la séance n'excéde pas le 1/4h.
Un autre: "j'en fais moi-même la triste expérience en ce moment. J'avais une ordonnace pour 30 séences à raison de 3 séances /semaine. Un cabinet a accepté en réduisant les 3 séances à 2, et chacune de leurs interventions ne dure que 15mn. Résultat je me débrouille comme je peux avec les tutos sur Youtube". VAL.
Les plaintes portent aussi sur les compétences. Bien que le diplôme de kiné soit pluridisciplaire ,certaines pratiques sont peu assurées telle que la kiné respiratoire. C'est ainsi le cas pour ma compagne qui,de par sa pathologie, a besoin qu'on l'aide pour tousser et expectorer, au risque au cas contraire de développer une pathologie pulmonaire à risque vital. Aucun kiné à domicile n'est intervenu à ce niveau. Une demande faite à la CPAM de Gironde de me désigner un spécialiste a rencontré une fin de non recevoir, sur le prétexte de la pluridisciplarité, non assumée pourtant. Je n'ai eu aucune réponse sur la durée de la séance qui faisait pourtant aussi l'objet de ma réclamation. En effet chez moi aussi, malgré ma présence, la séance de tous les kinés sollicités dure de 10 à 15mn malgré les 30mn réglementaires.
Qu'en est-il des salaires des kinés
Un kiné libéral titulaire en cabinet a un revenu moyen de 3520 Net /mois , un kiné en pratique domiciliaire 3367 euros majorés des déplacements (en général jeunes diplômés). La moyenne ne traduit pas bien entendu le revenu d'un kiné titulaire d'un cabinet transformé en salle de remise en forme où l'activité et les revenus explosent.. Un kiné en hôpital débute à 1740 euros/mois et 2852 euros en fin de carrière. Ce qui fait que 85% choisissent l'exercice en libéral avec l'espoir d'accéder à un business.
LES INFIRMIER(E)S
Les séances de soins sont définies également par la NGAP et précisément par l'art.11 alinéa 2 du titre de la nomenclature générale des actes professionnels. Les actes sont classés différemment: actes techniques (AMI) actes infirmiers de soins (AIS), actes dans le cadre de la dépendance (AMX), etc...Chaque acte correspond à un barème de prise en charge que l'on va multiplier par le coefficient . Un AIS peut être classé par exemple AIS1, AIS2 ou AIS3. A cela s'ajoutent une indemnité kilométrique et une majoration de jours fériés.
Salaire moyen d'une infirmière libérale
3600 à 4000 euros Net/mois à partir d'une recette de 90 000 euros/an, dont on déduit les frais et rétrocessions pour une remplaçante.Une infirmière collaboratrice a en moyenne un revenu de 3200 Net/mois. Mais ces moyennes peuvent considérablement varier selon le nombre de clients acceptés par le cabinet, le nombre , la durée des actes de soins et l'intensité choisie du calendrier d'activité.
Le temps de travail
Le métier est présenté en général comme un sacerdoce durant lequel "on ne compte pas ses heures". En fait, l'époque des infirmières religieuses est fini et tant mieux. Le mot vocation je l'ai toujours pourchassé dans la parole de mes élèves car la vocation est "le mouvement intérieur par lequel on se sent appelé par Dieu." C'est pour moi le premier pas vers la dérive des certitudes et de la perte regrettable du doute. Non, aujourd'hui s'en est fini aussi du généraliste qui se déplaçait de nuit et consultait le WE. Lui aussi fait de la shrinkflation en recevant le patient en 15 mn maxi au lieu des 30mn par le passé. Les rdv Doctolib le démontrent en prévoyant 4 rdv dans l'heure. L'infirmière libérale de 2024 est de ce nouveau monde et son activité est librement choisie . Aujourd'hui le cabinet infirmier fonctionne avec 3 collaboratrices au minimum pour bénéficier alternativement des WE , des congés et d'une semaine de 3 ou 4 jours à raison de 10h/12h en moyenne par jour . Certaines choisissent une alternance entre une semaine de 52h puis la suivante de 25h, d'autres optent pour la semaine de 68h puis la suivante en repos.
La durée de l'acte à domicile: le grand dérapage
L'acte en AIS est le plus courant, chaque AIS a une durée réglementaire de 30mn, en application de l'art.11 paragraphe II du titre XVI de la nomenclature. selon le niveau de dépendance l'acte réparti éventuellement en nombre égal de passages peut être classé et donc facturé en AIS 1, AIS2 ,AIS3 ou AIS4. Le nombre d'AIS est limité à 4 /24h et par patient (soit 8 pour un couple). Selon les témoignages il est fréquent que des couples de personnes âgées bénéficient chacun d'un AIS 2 ou 3, soit une durée de 1h à 1h30 chacun/jour et 2 à 3h pour le couple. Ils ne bénéficient dans le réel que d'une heure /jour pour tous les deux. Facturé tout de même selon le nombre et l'indice des AIS, avec pour chaque AIS des frais de déplacement et majoration le WE. Ainsi le temps facturé peut être le double ou le triple du temps réel passé.
Après la contestation d'une infirmière en 2013 contre la demande de remboursement d'AIS par la CPAM, la 2ième Chambre Civile de la Cour de Cassation en date du 12 mars 2015 a jugé en faveur de la CPAM que " la durée de soins infirmiers d'une 1/2h s'impose à l'auxilliaire médical". Mais précisons tout de même que la jurisprudence admet que "le second AIS peut-être facturé dès lors où la trentième minute est dépassée". Un sacré cadeau bien séduisant. Bref, la gestion autonome du temps passé devient un bidouilage y compris pour les plus honnêtes qui font leur tambouille journalière, et la tentation est grande de faire passer un pansement simple en pansement complexe, la cotation étant différente. Puis, les actes peu rémunérés et limités en temps, basculent sur la facturation d' une toilette par exemple, prévue en 30mn ou une heure, mais réduite à 15mn. Aux dépens du bénéficiaire.
Finalement, le discours infirmier tend à dissocier le temps à l'acte et revendique une rémunération sur l'hypothèse qu'un "acte de qualité"peut être accompli en moins de temps que prévu par l'AIS. Problème; c'est l'opérateur lui-même qui l'apprécie avec toute sa subjectivité. C'est oublier aussi que le soin est un acte global de prise en charge, y compris humaine. Peut-on d'ailleurs affimer qu'une douche et une toilette d'une personne dépendante est de "qualité" en réduisant le temps à 15mn, déshabillage et habillage compris.? Soyons sérieux, ce cadre minimaliste est ici librement choisi pour l'assurance d'un revenu majoré et d'un temps libre qui l'est également.
J'en témoigne douloureusement pour ma compagne classée en GIR2. Les cabinets qui se sont succédés pour la toilette quotidienne ont appliqué la cotation 2AIS (1heure) auquel s'ajoute un forfait déplacement. Dans les faits, la toilette dure régulièrement 15mn , soit la moitié d'un seul AIS, change de la protection, deshabillage et habillage compris, et retour au fauteuil, installation que j'assure physiquement moi-même. Pour arriver à cette réduflation, les dents,le nez, les oreilles sont rarement nettoyés, voire pas du tout. Sachant que ma compagne ne peut plus utiliser ses mains ni ses bras. Ce qui pour les dents, en rapport encore à la pathologie neurologique, présente un risque élevé d'infection respiratoire à partir des bactéries et déchets alimentaires présents dans la bouche. Je dois moi-même assurer par la suite un lavage complet de la bouche par microjet, brossage, utilisation d'un batonnet imbibé de produit désinfectant.
La peau n'est pas entretenue à titre préventif sur les zones à risques et irritées, par exemple par une crème à l'oxyde de zinc , résultat:les escarres s'installent en phase1, 2 puis 3 et ne sont pas soignées selon les protocoles connus. Pire ,je viens d'identifier une première escarre au stade 2 (atteinte du derme) plaie qui m'a été cachée sur son explication car présente sur une zone peu visible par moi. La pose répétitive de pansements m'était expliquée par une "blessure"(?) et je m'aperçois que la plaie n'est jamais nettoyée avant pansement , comme le prévoit le protocole!!
Malgré le matériel et produits mis à disposition, , les constantes ne sont jamais prises: poids, température, tension, taux d'oxygène...Je dois assumer de ma propre initiative ces relevés .. Il faut revoir la définition du soin dans notre pays.!!
LA SURVEILLANCE PAR LA SECURITE SOCIALE
La CPAM estime qu'un infirmer libéral ne peut exercer un nombre supérieur de 34AIS/jour au risque au cas contraire "que la qualité des soins ne puisse plus être garantie". Une blague. Ce chiffre correspond en effet en théorie à 17h de travail quotidien sans intégrer les déplacements. L'outil informatique de surveillance nommé "profileur" n'identifie donc pas les profils au dessous de ce seuil invraissemblable. Dans les faits, les professionnels repérés atteignent souvent un temps d'activité déclaré de 24h/jour, sommeil non compris.!! Les 34 AIS , pour l'accepter, correspondent en fait à 10 ou 12h d'activité réelle, déplacement intégré, soit de toute évidence avec des AIS qui ne dépassent pas 15mn. La sécurité sociale ne peut l'ignorer. Pour un pansement on pourrait le comprendre, mais pour une toilette c'est de la négligence, voire de la maltraitance. Certaines régions , portent la tolérance, à effet dérogatoire, jusqu'à 45AIS/jour. Ce qui, comme nous l'avons dit, dépasse les 24h d'activité si on s'en tient au principe: AIS=30mn.
Dans les textes institutionnels"la lutte contre la fraude est une priorité". La Charte des contrôles donne un message clair: "veiller à une bonne utilisation des deniers publics constitue la mission fondamentale de l'Assurance Maladie". L'organisme dispose des outils informatiques mais pas des contrôleurs en nombre suffisant. Le ministère du travail a la même stratégie du deshabillage. La sécurité sociale annonce le chiffre de 4 à 5 milliards de fraude dont 80% viendraient des professionnels. Là aussi c'est un tabou, toutes les émissions et articles portent principalement sur la fraude des particuliers. Sur ce chiffre 215 Millions euros concernent les généralistes, 393 Millions pour les infirmières, 234M pour les kinés, 105M pour les pharmaciens. Ce n'est que la partie visible de l'iceberg. Dans la réalité, un pacte de non agression est fait entre la CPAM et le conseil national de l'ordre sur le principe suivant: on n'accéde pas à votre demande d'augmentation des barèmes à l'acte, mais on reste tolérants sur la durée de celui-ci. Explicitement c'est un encouragement à rédufler, à réduire le temps à l'acte chez le patient, à bidouiller. La paix sociale est assurée. Tant pis à nouveau pour le malade.
Des centaines d'infirmier(e)s sont pourtant poursuivis chaque année au plan national pour la durée de leur AIS, suite essentiellement à des plaintes de particuliers. C'est peu. Mais comme le contrôle médical sort rarement de ses bureaux il ne peut y en avoir davantage. Le contrôle d'ailleurs n'est fait "que lorsque l'activité est jugée trop importante par rapport à la moyenne régionale sur la durée de l'acte". Exemple: Le tribunal de Bordeaux a condamné en 2021 un couple d'infirmiers pour avoir fraudé 1 million d'euros. le tribunal des Sables d'Olonne a jugé le 7 décembre 2023 une infirmière pour avoir escroqué la CPAM de 178.554 euros. Au mois de janvier 2024 une autre est condamnée à 28 mois de prison ferme à Nice pour avoir détourné 283.570 euros pendant la pandémie du COVID pour des vaccinations fictives.Au mois de mai 2023 un kiné des Côtes d'Armor est condamné pour avoir détourné 450 000 euros sur 3 ans , le professionnel fut détecté pour avoir déclaré plus de 24h/jour dactivité. La CPAM de Bordeaux par un contrôle de routine récent s'est aperçu qu'un kinésithérapeute avait perçu 703.000 euros de prestations indues entre les mois d'oct.2018 et août 2023. A vrai dire le contrôle prévoit d'avertir au préalable par lettre recommandée le professionnel et la charte de contrôle promeut" le dialogue et la concertation". Dans la majorité des cas la fraude n'est pas retenue, "même si l'omission est commise de manière intentionnelle au détriment des finances publiques" (SIC). Ce qui permet la déjudiciarisation (pas de plainte au pénal) au profit d'une négociation sur un remboursement des sommes détournées. La priorité est l'argent, , pas le patient qui reste la victime expiatoire de ces tractations obscures.
Kinés et infirmiers en ordre de bataille:
Un cabinet d'avocat fournis aux professionnels gratuitement sur internet un "guide pratique du contrôle d'activité" de 52 pages Les fraudes sont ici baptisées "erreurs et manquements" dont le professionnel ne prend conscience qu'au moment de la mise en oeuvre du contrôle". Plus direct il est conseillé "d'inviter les patients à établir des attestations venant à rectifier la réalité des soins" avec la précision du N° de CERFA. Le contexte reste conflictuel, et le secteur libéral , à défaut d' être habitué à justifier du différentiel entre les actes déclarés et la pratique réelle, se convainc du bien fondé de cette gestion très personnelle.
QUELLE PERSPECTIVE
Les projets de la Haute Autorité de Santé sont dans les cartons, celui du 13 juillet 2022 propose "de refonder la méthode d'élaboration des référentiels de certification des professions de santé". Le document ruisselle de bonnes intentions et reste une abstraction universitaire"assurer une relation de qualité", actualiser ses connaissances", "renforcer le dialogue", "assurer une relation de qualité", "rendre le patient co-acteur de sa santé". Avec un saupoudrage d'éthique, de déontologie, de droits du patient, de tranparence. Du petit lait pour les poussins du jour.
Les gouvernements successifs n'ont jamais mis en oeuvre un recadrage de l'activité des para-médicaux par un contrôle régulier des prestations à domicile ou en cabinet. Les seuils d'activité acceptés, très larges, permettent soit un burn out soit une réduflation. Le choix le plus courant par le praticien est évident. A défaut d'augmenter le prix à l'acte, l'Etat laisse en contrepartie s'installer un bidouillage généralisé des soins à la Charlie Chaplin dans les Temps Modernes.!! La CPAM constate un déficit des comptes mais finance des soins sans contrôler le contenu ni la durée, et n'écoute que les intérêts des ordres professionnels conservateurs, aux dépends des plus vulnérables, des bénéficiaires victimes. Bien au contraire, ce sont systématiquement ces derniers qui sont pointés du doigts comme à l'origine de la part principale du déficit.
L'accord de principe du gouvernement avec la corporation des médecins libéraux ce 8 février, pour le passage à 30 euros la consultation, n'est pas un bon signe dans la mesure où la contrepartie n'est pas de proposer une consultation qualitative, supérieure aux 15mn actuelles, mais d'assurer le rôle de surveillant des prescriptions afin "de réduire les dépenses de santé".Tel est le sens du discours sur le "améliorer la santé de la population"..
Est-ce un tabou que de s'accorder un droit de regard sur les métiers du CARE, pour se détacher de l' aveuglement qui a dominé la justice dans son rapport à l'Eglise durant des siécles.? . Il faut revoir les formations, le recrutement, les exigences professionnelles sur l'axe social et humain, instaurer de vraies instances de contrôle, se donner le droit d'action sur l'intouchable secteur libéral, financé pourtant ici massivement par la collectivité publique. Et puis il faut donner aux sans voix , les principaux concernés, les malades, nos ainés, nos amis handicapés, le droit de parler, de se défendre, en exigeant un statut représentatif entier dans tous les lieux de soin , dans les assemblées représentatives nationales, puisque toutes les associations,financées par l'Etat, ont toutes perdu de leur indépendance et ne défendent plus efficacement les usagers.
Vous, représentants de la Nation, n'avez vous pas autre chose à nous offrir, que le droit de mourir dans la dignité, si justifié que cela puisse être.? Mais où est la dignité quand le soin pallatif est déjà devenu à l'hôpital un espace de stockage et d'abandon de la prise en charge médicale pour les plus âgés, dans le cadre de la gestion des lits et des personnels, en nombre insuffisant. Intervenez immédiatement pour que la durée réglementaire des soins soit respectée partout, pour que plus jamais une toilette, une douche, soit imposée à une personne dépendante en 10 mn, pour que le soin à domicile et/ou en cabinet gagne en respect et en humanité...Votre laisser faire c'est déjà du laisser mourir...