Dans l'actualité, un texte que j'avais "commis" en 2010...
Ballade des Bonnets rouges*
I
Pemoc’h* ! Disent les Bonnets rouges
De Basse Bretagne où rien ne bouge
Au roi Louis* qui fait la guerre
Avec l’argent des pauvres hères.
II
Mais à Bordeaux on se soulève
Dans les taxes il faut une trêve,
Les émeutiers narguent d’Albret*
Anqui* ! C’est trop nous sommes prêts.
III
Puis la révolte éclate à Rennes
En souvenir d’Anne la Reine*,
On détruit le papier timbré
Dans les bureaux qui sont pillés.
IV
Les paysans prennent Pontivy*
Et font répandre l’eau de vie,
« Vive le roi sans la gabelle ! »
Devient la clameur de rappel.
V
Ils imposent un code paysan
Pour établir des règlements
L’espoir renaît en Basse Bretagne
Mais des troupes sont venues d’Allemagne
VI
Tous les meneurs vont être pendus
Sur le grand chêne au bout de la rue.
A Bordeaux on détruit une porte
Afin d’humilier cette place forte.
VII
Des clochers sont décapités*
Dans la Bretagne terre de piété,
Les troupes font subir la violence
Pour tuer toute résistance.
VIII
Les Bonnets rouges font encore peur
A ceux qui deviennent décideurs,*
Ce fut une triste répétition
Avant la Grande Révolution.
Complainte révolutionnaire, Alain Montfort, mars 2010
Bonnets rouges : évocation de la Révolte du papier timbré sous Louis XIV d’avril à septembre 1675. Pour financer la guerre contre les Hollandais le Roi crée de nouveaux impôts, notamment sur les actes à papier timbré (justice, testaments, ventes…) puis sur le tabac et l’étain… Le soulèvement contre les charges nouvelles débute à Bordeaux, en Bretagne les insurgés portent des bonnets rouges.
Pemoc’h : cochon, en langue bretonne. Prononcer « pimor », (c’h guttural).
Albret : César d’Albret, gouverneur de la ville de Bordeaux à l’époque.
Anqui : « Oh, la, la ! » manifestation d’indignation en Bordeluche, dialecte ancien dérivé du Gascon.
Anne la Reine : la duchesse Anne de Bretagne, 1477-1514, reine de France de 1491 à 1498.
Pontivy : Morbihan. 2000 paysans prennent la ville et absorbent ou répandent le cidre et l’eau de vie. (Une sorte de tradition demeure : à chaque fièvre paysanne les agriculteurs envahissent la ville et déversent des productions, du fumier, du lisier…).
Clochers décapités : notamment en Pays Bigouden, où le résultat est encore visible sur quelques lieux de culte.
Décideurs : allusion à une décision préfectorale du Finistère de 2005 interdisant à la ville de Carhaix de représenter sur un panneau touristique l’image d’un insurgé de la Révolte des Bonnets rouges.