Alberto sème la dérision dans les réunions sérieuses. Pas seulement pour le plaisir, mais parce que ça stimule la discussion.
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Devant les 500 participants des journées nationales d'étude qui réunissaient, pendant deux jours au Vinci, travailleurs sociaux et psychiatres, un personnage pittoresque a réussi l'exploit de pimenter drôlement les débats. Sur un thème qui, a priori, ne prêtait pas à rire (« troubles du comportement et accompagnement social »), Alberto le clown-analyste s'est livré à des provocations très stimulantes, nez rouge et style Auguste à l'appui.
Car s'il est clown, ce n'est pas pour amuser les petits-nenfants. Quand il se mêle de la conversation, il est le fou du roi venu troubler la messe et recueillir accessoirement les confessions, le non-dit comme on dit. Le clown-analyste exerce une activité qui procède de la dynamique de groupe, dérision en sus.
« Faire changer la tête »
Après des années de psycho-sociologie de la communication appliquée à l'analyse des rapports hiérarchiques, Alberto est allé respirer à l'école du théâtre, du mime, de la danse, du cirque. Il a trouvé dans la rue un bon terrain pour « remettre en cause le sérieux. » Depuis, il écume les réunions dites sérieuses : congrès, assemblées d'entreprises etc., pour y déterrer les conflits latents, dans l'humour, toujours. À lui tout seul, il vaut mieux qu'une commission d'étude, non ?
« Le principe du clownage, dit Alberto, c'est de faire changer la tête de l'institution. Il faut trouver son langage pour faire parler. » L'humour est un moyen : « C'est parce qu'il y a des contradictions qu'il y a du rire. Par exemple, les travailleurs sociaux disent : on fait du social, pas de la psy, mais dans la pratique on en fait… »
Comme quoi la psychanalyse mène à tout, à condition de s'en sortir.
Alain Nordet, La Nouvelle République, 29 et 30 janvier 1994