Il serait à mon sens objectivement malhonnête d'affirmer que Sarkozy a été meilleur que Hollande.
Il est bien évident que la position d'un président sortant, si son bilan est positif, lui donne un énorme avantage sur son challenger, surtout lorsque celui-ci n'a jamais exercé de fonctions gouvernementales. C'était d'ailleurs là le seul intérêt de ce débat : constater que tel n'était pas le cas. Bien sûr que l'on connaissait le bilan de Nicolas Sarkozy, mais il fallait ce révélateur qu'est le média télévisé pour le souligner auprès du plus grand nombre (rôle des mass-media), d'autant que la réalisation n'a fait aucune fioriture, se contentant de ce que l'on pourrait appeler des "images-vérités".
De ce point de vue, on aurait pu s'attendre, quels que soient ses arguments, à ce que François Hollande, face à l'enjeu que représentait cette rencontre, soit décontenancé. Pas forcément dans ses paroles, surtout dans son attitude. D'ailleurs ses tout premiers propos, dans les deux premières minutes, ont largement contrebalancé le sentiment que l'on pouvait avoir de le sentir pour le moins tendu. Ensuite, il a déroulé... A l'inverse, on aurait pu attendre de Nicolas Sarkozy qu'il se fige dans la posture du président de la République, ce qu'il n'a absolument pas pu faire et qui l'a, de ce fait, conduit à raconter parfois n'importe quoi.
Deux exemples : sur l'immigration, il annonce un test de français organisé dans les consulats de France à l'étranger pour les candidats à l'émigration. Ca existe déjà. Sur les centrales nucléaires, ensuite. Fessenheim est entrée en activité en 1977 pour une durée de 30 ans, donc jusqu'à 2007. L'ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire, et non de Sécurité comme il l'a dit au début) l'a prolongée de 10 ans, donc jusqu'à 2017. Certes, cette autorité a le pouvoir de dire si oui ou non les centrales peuvent continuer leur activité au-delà de la date initialement prévue, mais Nicolas Sarkozy a utilisé les arguments d'EDF pour justifier cette prolongation, qui consistent à dire "Plus les centrales vieillissent, plus elles sont sûres", au prétexte qu'à chaque fois qu'un aménagement pouvant améliorer la sûreté est mis au point il est installé sur la centrale. Cet argument ne tient qu'en partie : d'une part ça coûte une fortune, d'autre part il n'est pas évident que ce nouvel équipement (de technologie nouvelle) fonctionne sur des usines anciennes. Imaginez par exemple l'installation d'un radar de recul ou d'airbags sur une 2 CV...
Sur l'économie et l'emploi, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Difficile, dans ces conditions, de soutenir une argumentation forte. Sur le plan des relations internationales, difficile aussi d'affirmer que la France fait mieux que l'Allemagne. Difficile d'expliquer également que les soldats français en Afghanistan sont en train de former leurs homologues locaux dont 30% d'entre eux rejoignent les rangs des talibans.
Bref, si ce débat avait un sens, c'était de mettre les points sur les I et je pense qu'il a atteint son but. Je ne suis pas certain que l'inflence de ce débat soit énorme sur le choix des électeurs, mais il a en tout cas été clairement à l'avantage de François Hollande. J'espère simplement que l'on verra un jour l'envers du décor, à savoir l'attitude des deux hommes écoutant leur vis-à-vis. Là, je pense que ce doit être carrément dévastateur.