Texte déjà publié ailleurs fin novembre 2015, et que m'amène à publier de nouveau le désolant phénomène de l'Euro, parfait exemple d'une "Union sacrée" fabriquée et instrumentalisée pour augmenter encore si possible l'aliénation d'une société qui n'en finit plus de se vautrer dans les seules valeurs qu'elle pratique : le déni du réel, l'irresponsabilité et la lâcheté.
La vraie fête ne sert pas à oublier la vraie vie, mais à la retrouver, tout comme on ne fait pas la grève, la vraie, celle qui dérange, pour son plaisir mais en vue du bonheur de tous.
DANSER SUR UN VOLCAN EXPOSE AUX ÉRUPTIONS…
Danser sur un volcan en cours d’éruption n’a jamais été le moyen le plus sûr d’être en sécurité. Cette évidence semble échapper à la majorité d’entre nous, trop occupés à jouer les autruches et à pratiquer le divertissement pascalien sous toutes ses formes pour admettre enfin que la réalité est en train de faire justice de nos fantasmes mégalomaniaques.
Face à l’énormité des problèmes engendrés par ce que nous appelons contre toute logique le progrès, les appels à l’Union sacrée, qu’ils concernent la lutte contre le terrorisme ou contre le réchauffement climatique, pour ne citer que ces deux désastres dont on m’excusera de penser que le second est infiniment plus grave que le premier, sont à mes yeux à la fois dérisoires et obscènes.
L’Union sacrée ne se décide pas, sauf à être mort-née. Elle s’impose d’elle-même ou n’est, et c’est presque toujours le cas, qu’une cynique manipulation, un déni de réalité gros de désunions à venir.
L’Union sacrée autour d’un canon, même alcoolisé, voilà une résistance qui ressemble furieusement à une démission, celle des aveugles volontaires que nous sommes, tout occupés à faire assez de vacarme pour ne pas entendre l’éruption qui monte.
L’ennui est qu’à force de penser et surtout d’agir comme si « Après nous le déluge… » était un sésame ouvrant les portes dorées d’un avenir forcément radieux, nous pouvons constater aujourd’hui qu’il faut désormais dire « À nous le déluge ! »
La tempête se lève, nous n’avons plus de cap, ouvrons les yeux et tâchons de sauver ce qui peut encore l’être : notre humanité.
Pour ce faire, commençons peut-être par arrêter de marcher sur la tête : je dédie le texte suivant déjà publié ailleurs en 2003 et 2010 à tous les "otages" des grèves en cours en leur souhaitant de tout cœur de n'être jamais otages que de leur stupidité.
LA GRÈVE, VOUS LUI DEVEZ TOUT…
Je suis toujours un peu surpris quand j’entends des travailleurs, la bave aux lèvres, hurler que les grèves les prennent en otages et souhaiter qu’on supprime le droit de grève ou au moins qu’on le châtre, en imposant un service minimum.
Une grève qui ne gêne que ceux qui la font, une grève qui ne met personne sous pression, ce n’est pas une grève, c’est une démission.
Une telle « grève » ne sert que les « élites » dirigeantes.
Pour vomir ainsi la grève il faut aux travailleurs une incroyable capacité d’amnésie ou une insondable stupidité.
Vous qui crachez sur la grève, sans toutes celles que vous n’auriez sans doute pas osé faire, mais que vos ancêtres ont faites pour vous, vous ne connaîtriez aujourd’hui que l’esclavage qui était le leur avant qu’ils n’apprennent à se mettre en grève – quitte parfois à y laisser non seulement leur boulot, mais leur peau.
Sans leurs grèves souvent « sauvages » et « illégales », vous n’auriez ni congés payés, ni assurances chômage, ni Sécurité sociale, et vous travailleriez encore cinquante ou soixante heures par semaine.
Et votre suicidaire rejet de la grève vous ramène peu à peu, troupeau aveugle et servile, à leur condition.
Car les riches ne donnent jamais que ce qu’on leur arrache. Et à ceux qui comme vous mendient, ils ne donnent que les miettes – et leur mépris.
N’en déplaise à ce faux moine de pub pour camembert pasteurisé qu’est Raffarin, le progrès social n’existe que dans les moments où la rue gouverne.
Par respect pour ceux qui vous ont donné ce que vous n’auriez jamais eu le courage de mériter, et à défaut d’avoir le courage de défendre pour vous et vos enfants cet héritage, ayez au moins la pudeur de vous taire et de laisser les vrais travailleurs, ceux qui ne travaillent pas seulement pour leur compte, mais pour l’humanité tout entière, travailler pour vous comme pour eux en faisant grève.
Et dites-vous bien que marcher un peu à pied vous fera moins de mal que de continuer à ramper.