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Billet de blog 7 décembre 2012

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Pour un renforcement des Sciences économiques et sociales au lycée

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La réforme du lycée, mise en place par l'ancien gouvernement, a été globalement un désastre : non à cause des programmes mais du fait de la destruction d'heures de cours dans un très grand nombre de disciplines, au profit de l'apparition d'un accompagnement personnalisé souvent inutile, chronophage, et déboussolant pour les enseignants. Les deux heures d'accompagnement personnalisé (AP) par niveau doivent se construire avec des classes qui sont souvent changeantes, et avec des groupes de taille variable. Ce que l'on "vend" aux parents, une sorte de cours particulier payé par l'Etat, est illusoire. La plupart du temps, on ne voit jamais les mêmes élèves d'une semaine sur l'autre, et on ne construit pas une relation réelle de soutien ou d'approfondissement sur toute l'année. Du saupoudrage de connaissances, de l'aide au devoir sporadique, de l'orientation mal organisé (avec des professeurs ayant peu de compétences dans ce domaine), devant des élèves peu motivés que l'on ne connait souvent pas, voilà ce qui a remplacé nos heures de cours. Dans certains établissement, les professeurs ont récupéré l'AP pour faire leurs cours, de la méthodologie propre à leur discipline, ou pour préparer les élèves aux grandes écoles. Dans d'autres non. Le principe républicain de l'unité des enseignements sur tout le territoire est nié par la pratique des AP.


Les sciences économiques et sociales, comme d'autres disciplines, ont été mises à contribution pour que l'AP puisse faire sa place dans le lycée. Nous avons perdus 1h30 en Terminale (tronc commun et spécialité compris), 1 h en Première (l'option science politique) et 1H30 en seconde. L'association des professeurs de sciences économiques et sociales (APSES), au lieu de réclamer la fin des AP et le retour à davantage d'enseignement au lycée, demande l'allègement des programmes de Terminale.

Mais que doit-on alléger ? Quel chapitre apparaît superflu à l'APSES ? Ne doit-on pas parler de l'environnement à nos élèves, doit-on amputer le programme de l'explication des crises économiques et financières ? Est-ce la question du chômage qui semble de trop ou celle des stratifications sociales ? Est-ce inutile d'évoquer les inégalités et la justice sociale avec nos élèves ?

En réalité, le programme est plutôt bien pensé, en phase avec les grandes questions économiques et sociales de notre époque, et avec les recherches récentes en sciences sociales. C'est ce que reprochent certains collègues : les SES n'auraient pas à préparer seulement à des études post-bacs en sciences sociales, mais à ouvrir l'esprit de nos élèves. Drôle de revendication : les professeurs de Physique-Chimie, ou de SVT réclament-ils des allègements de programme au prétexte que leur programme les prépareraient trop bien aux études post-bacs ? Préfèrent-on laisser un avantage absolu aux élèves de la filière S en mathématiques, sans améliorer celui des élèves de ES en sciences économiques ? Préfère-t-on voir nos potentiels élèves fuir vers la filière S, sous prétexte qu'il faut leur ouvrir l'esprit et non les préparer à des études d'économie ?


Je suis favorable à ce que les SES soient présents dans toutes les filières du lycée, car oui, on ne peut comprendre les enjeux économiques et sociaux du moment, on ne peut être pleinement citoyen, si on ne possède pas un minimum de connaissances économiques et sociologiques. Mais les temps ne sont pas à l'ouverture de nouvelles classes. Nous devons nous battre là où nous sommes, conserver nos élèves, valoriser notre discipline et donc la filière  ES. Nous n'avons pas d'autres choix. Les nouveaux programmes de SES vont dans le bon sens : ils sont à la fois passionnants pour nos élèves, car en phase avec l'actualité, et rigoureux sur le plan scientifique. Ils préparent bien aux études supérieures, ce qui ne me semble pas être une tare.

Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de les conserver. Là où l'APSES vise juste, c'est sur la difficulté de réaliser tout le programme en une année. D'autant plus, que comme d'habitude, les concepteurs du programme font comme si nos cours se finissaient fin juin (donc, comme s'il n'y avait pas de baccalauréat). Il est donc impératif de revenir aux 6 heures de SES en Terminale, et aux 2 heures de spécialité, sans quoi, effectivement, l'année de Terminale constituera une année de bachotage abrutissante et non une année de formation intellectuelle pour nos élèves. Il est important également de revenir à un volume horaire conséquent en seconde, et de faire rentrer les SES dans le tronc commun de la seconde générale. Pour récupérer ces heures, nous devons en finir avec les heures d'accompagnement personnalisé, et remettre en place des vrais entretiens d'orientation, avec de vrais conseillers d'orientation formés à ce métier.

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