Si j’ai choisi l’exemple de la mafia calabraise, pour débuter ce travail de description des mafias, c’est pour deux raisons :
La première, c’est la mafia « à la mode ». La presse internationale fait mine de découvrir son existence. Les gros titres ne manquent pas, avec leurs approximations : « la plus sanguinaire », ou « le recrutement familial limite les repentis », ou bien encore « la plus puissante » …
La seconde, c’est que la ‘Ndrangheta est effectivement une mafia puissante qui a étendu son activité criminelle, au-delà du territoire de la Calabre. Nous trouvons des traces d’activités mafieuses dans toute l’Italie et sur presque tous les continents.
A côté de la ‘Ndrangheta, le Milieu corse -quelle que soit son appellation- semble jouer dans la division inférieure. Cependant, existe-t-il des similitudes, même à l’échelle ? C’est la méthode de travail que je propose. La puissance mise à part, nous pouvons nous interroger sur plusieurs thèmes communs au système mafieux : l’importance du capital social, la violence, les relations avec le monde politique, administratif et entrepreneurial. A cela il faut ajouter les nuances culturelles et le différentiel de développement économique entre certaines régions (Calabre, Sicile, Campanie, Corse…) et la moyenne de leurs pays.
La Corse n’est pas dans un état de délabrement social semblable à celui des régions d’où sont issues les principales mafias italiennes -Calabre, Sicile, Campanie- mais des voix s’élèvent pour dénoncer « une Mafia en Corse ». Alors voyons à quoi ressemble une Mafia reconnue. Puisqu’il faut bien commencer, débutons par la ’Ndrangheta.
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La «’Ndrangheta comme une parabole
Les médias européens semblent découvrir l’importance de la mafia calabraise, à l’occasion d’un « maxi procès » qui s’est ouvert, le 13 Janvier 2021, devant le tribunal de Lamezia Terme en Calabre. C’est la première fois que la Justice italienne juge autant de ‘ndranghetistes presque en même temps. Plus de 350 personnes sont poursuivies par la Justice italienne : des mafieux, mais aussi des fonctionnaires, des élus locaux, un ancien parlementaire et même des policiers (dont un colonel des Carabiniers) et des entrepreneurs. Outre le nombre d’individus poursuivis, on note la présence d’une cinquantaine de « repentis », une « nouveauté » car, s’ils en existent en Calabre, il n’y en a jamais eu autant sur une même affaire.
Ce procès vise quatre familles mafieuses de la province calabraise de Vibo Valentia. Seule une partie des personnes inculpées (91) étaient jugées à Lamezia Terme. Les autres le seront plus tard, sous une autre procédure.
Lamezia Terme, des condamnations et un verdict à analyser
Après neuf mois de débats, le verdict du procès de quatre familles (‘ndrine) de la ‘Ndrangheta de la province de Vibo Valentia est tombé le 6 Novembre 2021. Le tribunal de Lamezia Terme a prononcé soixante-dix (70) condamnations, vingt acquittements et une prescription. Un total de près de 650 ans de réclusion.
Les chefs d’accusation s’étendaient, notamment, d’assassinat à trafic de stupéfiants, en passant par le racket et « l’association mafieuse ». La durée des peines prononcées, est, d’entrée, déjà déduite d’un tiers, comme le prévoit la loi italienne, car le procès a eu lieu sous le régime de la procédure dite « « abrégée » (rito abbreviato). Cette nouvelle procédure, introduite dans la loi, vise à réduire la durée de procès considérés comme particulièrement longs en Italie. La procédure « abrégée » ne peut concerner les crimes passibles de la perpétuité.
Cette réduction du temps des débats est assortie d’une réduction des peines d’environ un tiers. Quatre-vingt-onze personnes poursuivies, sur plus de 300, ont choisi cette procédure « abrégée ». Les autres personnes seront jugées selon la procédure « ordinaire ».
Parmi les personnes condamnées, à Lamezia Terme, se trouvent des membres des clans mafieux (‘ndrine), mais aussi un avocat/homme d’affaire et un notaire.
Parmi les personnes ayant choisi la procédure « ordinaire » se trouvent un ancien maire, un ancien conseiller régional, et Giancarlo Pittelli, un ex sénateur de « Forza Italia » (l’ancien parti de Silvio Berlusconi). G. Pittelli est considéré, par les enquêteurs, comme l’homme qui fait le lien entre les différents protagonistes : familles mafieuses, administrations, sociétés basées à l’étranger et certaines banques. G. Pittelli est également poursuivi pour « association mafieuse » dans une autre affaire : un trafic de déchets organisé par le clan Piromalli, considérée comme la famille (‘ndrina) la plus puissante de la ‘Ndrangheta.
Le procès de Lamezia Terme, prévu pour durer un an, s’est achevé après neuf mois d’audience. Le verdict est tombé presque deux ans après le début de l’opération "Rinascita Scott" qui a débouché sur l’arrestation de plus 300 personnes (voir plus loin). Ce verdict du 6 Novembre 2021 n’est donc qu’un premier volet d’un dossier judiciaire visant les membres de quatre ‘ndrine de la ‘Ndrangheta. Les autres procédures « ordinaires » devraient prendre encore, au moins deux ans, avant de déboucher sur un autre procès.
Le verdict du second procès (procédure « ordinaire ») est tombé le 20 Novembre 2023. Outre des chefs de clans mafieux, plusieurs notables et responsables des forces de l’ordre sont condamnés par le tribunal de Lamezia Terme : un ancien sénateur de Forza Italia (11 ans), un ancien conseiller régional (1 an et 6 mois), un avocat (14 mois), un ex commandant de la police routière (4 ans), ex lieutenant colonel des carabiniers (six mois). Un total de deux mille années de prison, pour 207 accusés. Le verdict complet peut être lu sur le site euronews (20 nov. 2023). Il s’agit d’un des tous premiers verdicts qui confirme l’association mafieuse entre des gangsters, des notables et des fonctionnaires de police. Tous les regards sont maintenant tournés vers les procédures d’appel.
Un territoire sous contrôle
L’emprise de la ‘Ndangheta peut se comprendre en observant la carte ci-dessous, Source DIA (Direzione Investigativa Antimafia). On y voit la localisation des différentes familles mafieuses pour la seule province de Vibo Valentia. Dix-neuf (19) 'ndrine (familles ou groupes de familles mafieuses) se partagent le territoire de cette province. La Calabre (1 million 900 000 habitants) compte cinq provinces (l’équivalent de nos départements). Celle de Vibo Valentia compte 165 500 hab.
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Sur une seule province, on voit que le maillage des familles mafieuses (‘ndrina au singulier, ‘ndrine au pluriel) couvre la totalité du territoire. C’est ce réseau familial qui constitue l’organisation de la ‘Ndrangheta. Ce type de toile peut être reproduit pour les quatre autres provinces de la Région. A chaque province administrative (provincia) correspond une « province » mafieuse (Mandamento).
La Calabre comptait (source DIA) plus de 140 ‘ndrine en 2016. Mais ce nombre peut évoluer. Des ‘ndrine peuvent disparaitre et être absorbées, après une guerre interne, par un clan vainqueur. Il faut noter que ces tableaux sont constitués par les autorités, à partir de plusieurs éléments d’enquêtes. L’organisation criminelle ne publie pas d’organigrammes comme le ferait une entreprise ordinaire.
Pourtant, selon les autorités, la ‘Ndrangheta possède un organigramme aussi bien structuré que celui de la Cosa Nostra sicilienne.
En lien ici, l’organigramme de Cosa Nostra (Sicile) et ci-dessous l’organigramme de la ‘Ndrangheta.
Sur l’organigramme, ci-dessus, nous voyons figurer des ‘ndrine qui supervisent des pays étrangers où la ‘Ndrangheta est bien implantée. Nous reviendrons sur l’implantation en Australie (australiani) et dans le nord de l’Italie (Lombardia e Liguria). Ces exemples illustrent parfaitement la méthode appliquée par l’organisation criminelle calabraise à travers le monde.
En Calabre, cette organisation en ‘ndrine est complétée par une structure, appelée « locale », qui regroupe plusieurs ’ndrine. Son rôle : « aplanir les conflits », c’est ce que nous apprend Stéphane Quéré, criminologue (Université Paris II). La ‘Ndrangheta. Enquête au cœur de la plus puissante des mafias italiennes. Ce même S. Quéré nous confirme que la «’Ndrangheta est une organisation structurée depuis longtemps : « le premier « règlement interne » est retrouvé à Nicastro (hameau de la commune calabraise de Lamezia Terme NDLR) en 1888, avec dix-sept articles ». L’organisation des activités criminelles correspond à un souci d’efficacité. Il faut limiter les conflits entre clans (‘ndrine), mais ce sens de l’organisation repose aussi sur un fond culturel : « les ‘ndranghetistes » sont obsédés par les règles », c’est ce qu’écrivent Nicola Gratteri (magistrat) et Antonio Nicaso (universitaire) dans Mafia calabraise, les dix commandements.
Le procès de Lamezia Terme ne vise « que » quatre clans (Mancuso, Fiarè, Accorinti et Lo Bianco-Barba) quatre des 19 ‘ndrine de la province de Vibo Valentia (voir carte plus haut). C’est la première fois qu’un procès concerne des ‘ndrine dans toutes leurs composantes (mafieux politiciens, entrepreneurs, fonctionnaires…). Mais la presse a titré un peu vite « la ‘Ndrangheta décapitée ». C’est l’activité de quatre « familles qui est jugée, sur plus d’une centaine que compte l’organisation criminelle.
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Ces différentes activités criminelles n’ont pu se faire sans des complicités sur place, aussi bien au niveau entrepreneurial que politique. Ce constat nous amènera à étudier la capacité de développement d’un « capital social », mélange de séductions et de menaces, « capital » indispensable au maintien et à l’accroissement de toute mafia.
Ce qui est frappant, c’est qu’il aura fallu près d’un siècle pour que ce pacte scélérat soit porté sur la place publique. Pourtant, la lecture de la chronique des faits divers australiens (voir plus loin "La 'Ndrangheta en Australie, une vieille histoire"), montre bien une multiplication d’exactions en tout genre, dès les années vingt : racket, meurtre, prostitution, trafic de drogue… Une fois de plus, il semble que des autorités politiques n’aient pas su, pas pu ou pas voulu comprendre qu’il ne s’agissait pas d’une « simple » criminalité.
Mafia et pauvreté
En matière d’emplois, la comparaison entre la Calabre et la nouvelle-Galles du Sud (Australie) est édifiante. En 2020, cette région italienne est celle qui a perdu le plus d’emplois en Italie. L’écart des taux de chômage entre l’Italie et l’Australie est important, du niveau national au niveau local, en passant par le niveau régional. Plusieurs articles de presse parlent « d’un habitant de Plati, sur deux, sans emploi ». Le nombre parait excessif. Il m’a été impossible de trouver le taux de chômage de Plati pour 2020, le dernier publié remonte à 2011. Cette commune dépend de la province de Reggio di Calabre.
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Globalement pour la Calabre, tous les indicateurs statistiques sont au rouge (chômage, pauvreté, infrastructures sanitaires…) c’est ce qui ressort des données statistiques par territoire publiées par l’ISTAT, l’Institut national Italien de la Statistique. L’exemple du tableau, ci-dessous, sur la pauvreté est édifiant. L’écart entre le niveau national et régional va du simple au double. Ces données datent de 2018, la situation a été aggravée, depuis cette date, par la crise du COVID.
Indices de pauvreté comparée, Calabre-Italie, individuel et familial :
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Comme nous le verrons dans d’autres articles à venir, le tableau ci-dessus confirme que le phénomène mafieux se nourrit de la pauvreté. Déjà nous pouvons observer le schéma, ci-dessous, illustrant les écarts des « indicateurs de bien-être » entre certaines régions italiennes. (Extrait de : « Études économiques de l’OCDE Italie, Avril 2019 Synthèse).
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La ‘Ndrangheta est pourtant une histoire ancienne
L’existence d’une organisation criminelle en Calabre, regroupant de nombreux membres, est identifiée dès la deuxième partie du 19ème siècle. La criminologue et universitaire germano-belge, Letizia Paoli résume l’existence d’un certain nombre de procès qui se sont déroulés dans le sud de la Calabre et qui font mention de l’activité d’une organisation criminelle très active dans plusieurs provinces de la Calabre. In « Mafia Brotherhood : Organized Crime, Italian Style ».
La chronique retient, entre autre, le procès qui se tient devant le tribunal de Palmi (Province de Reggio de Calabre) en… 1892. Plus de 200 personnes y sont jugées pour « association de malfaiteurs ». Les historiens contemporains parlent d’un « maxi-procès avant la lettre » (allusion au maxi procès de Palerme contre Cosa Nostra en 1986-1987, NDLR). Dans ce procès de Palmi, le juge estime qu’un l’un des prévenus a « (…) la main mise sur plusieurs groupes répartis dans plusieurs villages » (L. Paoli). Plusieurs centaines de prévenus, plusieurs villages concernés, nous sommes dans autre chose qu’une simple « association de malfaiteurs ». Mais, à l’époque, si le terme ‘Ndrangheta circulait déjà, il était difficile d’imaginer et surtout de reconnaitre qu’il s’agissait d’une très grosse organisation « fédérée » couvrant une très grande partie de la Calabre.
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Plusieurs procès auront lieu devant le tribunal de Palmi (province de Reggio de Calabre), entre la fin du 19ème et le 20ème siècle, en Juillet 1985, par exemple. Mais cette fois l’existence d’une « Mafia » est reconnue, la loi de 1982 est passée par là. Le verdict du procès de Juillet 1985 serra plus sévère pour les 61 accusés.
En près d’un siècle la ‘Ndrangheta a eu le temps de multiplier ses activités et de se développer. La faiblesse de l’État italien naissant (19ème siècle) le réseau de complicités et d’intérêts noué autour de cette organisation criminelle «secrète » semble avoir arrangé beaucoup de monde en Calabre et en Italie. Ce Segreto di Pulcinella (secret de Polichinelle) a permis à cette « association de malfaiteurs » d’étendre ses activités à travers toute l’Italie et même dans plusieurs pays de la planète.
Les mafias, un produit qui s’exporte…
La ‘Ndrangheta en Australie, une vieille histoire
Le savoir faire et l’organisation de familles dans des activités criminelles sont d’une redoutable efficacité, y compris hors de leurs régions d’origine. Nous avons choisi deux exemples d’implantation criminelle, en Allemagne et en Australie. Dans ces pays, les mafias italiennes défraient la chronique.
-En Juillet 1977 le député du parti Libéral australien, Donald Mackay est assassiné dans la province de Nouvelles Galles du sud. L’élu dénonçait la production de drogue dans sa circonscription. L’enquête va démontrer le rôle joué par une « fédération » de six coteries mafieuses originaires du bourg calabrais de Plati, moins de quatre mille habitants. Des familles originaires de ce village organisaient des cultures de chanvre indien en Nouvelles Galles du sud. Ce trafic était dirigé depuis Plati. Le trafic international, de grande ampleur, ne reposait que sur un réseau composé de deux cellules familiales et leurs amis.
Mais ce qui est surprenant c’est que, plus de quarante ans après cette première affaire, le réseau continue à fonctionner. Le volume des trafics de drogue se serait même accru.
En réalité l’implantation de la N’drangheta dans cette région remonte au début des années vingt (20ème siècle). La plus part du temps, dans ce type d’infiltration mafieuse, les autorités locales savent, mais ne considèrent pas ce phénomène comme une criminalité sortant de l’ordinaire.
Des hommes politiques lié au parti Libéral australien auraient entretenu des rapports avec des représentants de la N’drangheta. Une enquête conjointe de deux médias australiens, ABC (Australian Broadcasting Corporation) et Fairfax, tend à démontrer que le parti Libéral a bénéficié de donations (pratique légale en Australie) de la part de donateurs liés à la ‘Ndrangheta. En retour, un homme de cette organisation aurait échappé, en 2005, à une expulsion vers l’Italie où il était recherché pour une série de crimes mafieux. L’enquête des deux médias australiens est diffusée en Juin 2015. Elle met en lumière des liens indirects mais troubles entre une partie de la classe politique australienne et une des plus puissantes mafias de la planète. Le mafieux recherché en Italie sera « protégé » par deux ministres successifs. Le second, Amanda Eloïse Vanstone, s’opposera personnellement à l’arrêté d’expulsion. Un fois l’affaire éventée, la ministre sera nommée ambassadrice à… Rome. Cette information sera divulguée en 2009 par Francesco Forgione. Le journaliste et enseignant a eu accès à des documents de la police italienne. Les relations entre des politiques, des fonctionnaires, des entrepreneurs et des familles de la ‘Ndrangheta semblent bien installées. Les assassinats de deux policiers australiens, en 1989 et en 1994 sont oubliés. L’Australie n’a plus connu de meurtres de ce genre. L’ordre public est sauf, la Mafia travail en silence et le parrain soupçonné d'avoir commandité l'assassinat de Donald Mackay est mort dans son lit à 82 ans, comme nous l’explique l’article du Sydney Morning Herlald, du 03/11/2017 (voir lien précédent). Le corps de Donald Mackay n'a jamais été retrouvé.
Cette affaire nous ramène aussi à la petite ville calabraise de Plati, liée à celle de Griffith (16 000 habitants.) en Nouvelle Galles du Sud. Cette dernière est, depuis les années vingt (20ème siècle), un lieu d’immigration d’origine calabraise.
Plati est une petite ville de 3800 habitants dans le sud de la Calabre. L’agglomération est restée sous tutelle d’un commissaire spécial nommé par l’État entre 2015 et 2020 pour « collusion mafieuse du conseil municipal ». Ce scénario de tutelle s’est déjà vu deux fois (1991-1993) et (2006-2016). Le dimanche 31 Mai 2015, il n’y avait aucun candidat aux élections municipales. La ville restera sous tutelle de l’État jusqu’en 2020. Il faut dire que la place est risquée, un des maires de Plati a été assassiné en 1985. Un maire (sans étiquette) a été, finalement, élu en Septembre 2020.
Dans la petite ville, près d’un habitant sur deux est sans travail et certaines habitations n’ont toujours pas l’eau courante. Du coup une partie de la jeunesse a émigré, notamment vers l’Australie, le phénomène dure depuis le début du 20ème siècle. Depuis les années 20, la région de Griffith est une zone de plantation agricole ayant fait appel à de la main d’œuvre, notamment italienne, originaire majoritairement de Calabre.
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Il est intéressant de noter qu’une partie des immigrés, venus en Australie par nécessité, a pu monter un réseau mafieux à des milliers de kilomètres de sa terre d’origine, que ce système a pu perdurer et toucher une partie de la classe politique australienne.
En 2016, les autorités australiennes estimaient que « 31 familles contrôlent 60% du trafic de drogue du pays » Daily Mail Australia on line, 31 Janvier 2016. Les autorités italiennes dénombrent, de leur coté, six ‘ndrine qui se répartissent le territoire australien.
Cette implantation ressemble bien à une organisation. Venus pour fuir la misère de leur région, des paysans calabrais ont été entrainés dans la délinquance. Par choix, pour les uns et par contrainte pour les autres. L’Australie note que des activités d’extorsion sont signalées dès les années vingt. Mais ce qui est surtout notable, c’est qu’une partie de la communauté calabraise a servi de base à une organisation gérée depuis la Calabre. Du cannabis produit en Australie, dans des exploitations agricoles de la région de Griffith, est exporté vers l’Europe et de l’ecstasy est importée d’Italie dans des produits à base de tomates de Calabre. Nous retiendrons également que, dans certaines régions d’Australie, la ‘Ndrangheta a blanchie les millions de Lires retirée de « l’industrie » des enlèvements effectués en Italie durant une décennie.
La ‘ndrina Barbaro a organisé le trafic de stupéfiants en Nouvelle Galles du Sud et entre la Calabre et l’Australie (ecstasy). Le clan Barbaro a constitué son capital de départ avec les revenus des enlèvements. Dans les années 70-80, l’un des chefs de cette ‘ndrina était surnommé « le roi du kidnapping ». L’argent des rançons a servi d’accumulation primitive du capital pour investir dans d’autres activités illégales et légales. Une grande partie des bénéfices des trafics de drogue est réinvestie dans les affaires des familles du groupe, en Calabre et en Italie. Un point doit être intégré : Plati demeure le lieu où se prennent les principales décisions en matière de trafic.
Le phénomène de contamination mafieuse dans des régions du monde développé, par des personnes fuyant la misère, venant d’un gros village d’Italie et « blanchissant » à l’étranger n’est pas unique, comme le montre un autre exemple en Allemagne cette fois.
Das ist ein Mafia
Le 15 Août 2007, les Allemands découvrent que la mafia calabraise est bien implantée dans leur pays. A cette date, le massacre de la Pizzeria Bruno (6 morts), dans la ville de Duisburg, n’est que l’expression violente et visible de cette implantation. Cette « vendetta » entre deux familles calabraises, originaires de la petite ville de San Luca, a surpris et choqué l’opinion allemande.
Pourtant, les services anti mafia italiens avaient averti les autorités allemandes.
Extrait d’un enregistrement téléphonique, réalisé par la police italienne, entre un chef d’une « famille » calabraise et le « correspondant » de cette « famille » en Allemagne. Nous sommes au début des années 90, le mur de Berlin est tombé en 1989 :
Le Boss : « achète dans l’ex Allemagne de l’Est »
Le « correspondant » : « quoi ? »
Le Boss : « Tout ce que tu peux ».
Voila un exemple qui en dit long sur la capacité d’adaptation d’une organisation archaïque, originaire d’une des Régions les plus pauvres d’Italie. Un Boss, qui n’a, peut être jamais quitté son village, organise le blanchiment de l’argent sale de la ‘Ndrangheta, mais surtout anticipe en temps réel l’évolution politique et économique d’un pays. Il raisonne à l’échelle du continent et même au delà. C’est l’adaptation criminelle de l’adage : « Think Globally, Act Locally ». Les clans de San Luca possèdent des dizaines d’établissements entre Duisburg et Erfurt. Ce n’est pas pour faire fortune en vendant des pizzas.
Ainsi l’Allemagne sert de « lessiveuse » pour l’achat de nombreux commerces, mais pas seulement. La ville de Duisbourg, par exemple, se trouve proche des frontières de Belgique et de Hollande. Ce deux pays représentent une plaque tournante du trafic de drogue. Les cargaisons arrivent, d’Amérique latine, par des ports de Belgique et des Pays-Bas. Il faut savoir que la ‘Ndrangheta a supplanté la Cosa Nostra sicilienne dans les relations avec les cartels producteurs de Colombie.
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Francesco Forgione a établi une carte de 19 implantations « familiales » de la ‘Ndrangheta à travers l’Allemagne, dans son livre « Mafia Export » déjà cité.
Il faut le rappeler, la famille (d’abord au sens premier) constitue le noyau de base de l’organisation criminelle.
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15 ans après ces faits, l’Allemagne n’est toujours pas dotée de législation spécifique anti mafia. Le massacre de Duisbourg ne semble pas avoir déclenché une remise en question rapide. A tel point que les autorités italiennes et la presse allemande parlent de « déni de réalité ».
En 2008, le Procureur adjoint du Parquet anti-mafia de Reggio de Calabre, Salvatore Boemi exprimait son inquiétude face à la faiblesse de la coopération internationale et surtout face à l’indifférence des autorités des différents pays européens, à commencer par l’Allemagne où s’est déroulée la tragédie de Duisbourg. « L’absence de vision de la légalité qui a accompagné durant des années la politique italienne est en train de contaminer l’Europe. Cet aveuglement, je le retrouve aujourd’hui dans beaucoup de pays européens, l’Allemagne en premier lieu. Je suis fatigué de m’entendre dire que je ne retrouve pas le lieu où la mafia a organisé la mort de six personnes (à Duisbourg NDLR), uniquement parce que la loi allemande est différente de la loi italienne. Si on refuse de comprendre la gravité du problème et l’exigence de travailler ensemble, d’ici vingt ans les questions mafieuses auront envahi l’Europe ». Propos diffusés le 9 Janvier 2009, sur la chaine ARTE, dans le reportage « Main basse sur l’Europe ».
Quinze ans après le massacre de Duisbourg, à défaut de changement de législation, les autorités allemandes semblent avoir affiné leurs relations en matière de police et de Justice.
Le 5 Décembre 2018 plusieurs polices européennes participent à l’opération « Pollino », supervisée par la DIA italienne. Quatre-vingt quatre personnes, suspectées « d’association mafieuse » et soupçonnées d’être membres de la ‘Ndrangheta sont arrêtées dans quatre pays européens : Italie, Pays-Bas, Belgique et Allemagne. Conjointement une opération est lancée au Suriname (limitrophe de la Guyane française). Au passage, nous pouvons retenir que plusieurs « mules » transportant des capsules remplies de cocaïne, dans leur estomac, ont été arrêtées en France, en provenance de Guyane. Le trafic est organisé à partir du Suriname voisin, devenu pays de transit de la drogue en provenance de pays producteurs (Colombie, Pérou…). La drogue est, majoritairement destinée à la Hollande. Le Suriname est une ancienne colonie néerlandaise. Les Pays-Bas et la Belgique sont devenus les portes d’entrée et les plaques tournantes du trafic de cocaïne en Europe, en lieu et place de l’Espagne (rapport EUROPOL 7 Septembre 2021).
« Pollino » se déroule sous l’égide d’Eurojust. Cette agence européenne est chargée « de renforcer la coopération judiciaire entre les États membres ». Le jour même de l’opération « Pollino » un responsable d’Eurojust s’exprime dans un communiqué : « Aujourd’hui, nous avons envoyé un message clair aux groupes du crime organisé à travers l’Europe. Ils ne sont pas les seuls à être capables d’opérer par delà les frontières : c’est aussi le cas des communautés judiciaires et répressives européennes ».
En Allemagne, les policiers visaient des restaurants, des appartements et des bureaux, principalement dans le Nord du Pays (Nord-Wesphalie) et dans le Sud (Bavière).
Ce n’est pas la première fois que les policiers allemands participent à l’arrestation de membres présumés de la ‘Ndrangheta sur le sol allemand. Par exemple, en Février 2011, une opération menée avec la police italienne aboutit à l’arrestation d’un membre important de la mafia calabraise.
Le 19 Décembre 2019 se déroule la plus grosse opération jamais menée contre la ‘Ndrangheta. « Rinascita-Scott » permet l’arrestation de 334 individus, majoritairement en Italie, mais aussi en Suisse, en Bulgarie et en Allemagne. « Rinascita-Scott » va déboucher sur le procès qui s’est déroulé à Lamezia Terme.
Depuis le massacre de Duisbourg, les polices allemandes et italiennes ont amélioré leur coopération et le parlement allemand a voté une loi sur la confiscation des biens mal acquis.
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On peut lire, dans le lien ici, le rapport de la DIA (2017).
Cosa Nostra au Québec
Dans la province du Québec, des familles siciliennes ont mis en place un système de captation des marchés de la construction, à travers la corruption, notamment de fonctionnaires municipaux du Ministère québécois des Transports. Système complété par des collusions avec des entrepreneurs du secteur. Le niveau de violence et de corruption a pris une telle ampleur que le gouvernement de la province du Québec a mis en place une commission d’enquête spéciale (2011-2015). La commission Charbonneau a rendu son rapport fleuve (1741 pages, 291 témoins auditionnés, 3600 documents en annexe, 260 jours d’audience…). Le rapport constate, notamment, « des liens directs et indirects » entre l’attribution de marchés publics et le financement de partis politiques, au niveau municipal et provincial et une famille mafieuse installée à Montréal, les Rizzuto.
Ce rapport contient 60 recommandations. Parmi elles, on trouve des mesures visant à protéger élus et fonctionnaires d’éventuelles pressions liées à l’attribution des contrats publics et au financement des partis politiques. Méthode de corruption que nous avons pu observer dans l’exemple australien. En pointant, notamment, ce lien Voyous-Fonctionnaires-Politique, la Commission Charbonneau résume la nature d’un lien mafieux. La lecture du rapport, ici, est édifiante.
Mais, pourtant, aucune recommandation ne suggère la reconnaissance d’un délit mafieux dans le droit fédéral canadien. Le constat, fort, n’est pas suivi de propositions aussi fortes.
En effet, il n’est pas sûr que les recommandations de la Commission aient débouché sur un changement radical de ce système de collusion. C’est en tout cas ce que relève l’enquête du Journal de Montréal, publiée le 8 Mai 2019. Toujours la puissance de ce lien « organique » entre les différents acteurs de la société.
Coté voyous, nous trouvons systématiquement le même schéma : la coopération de familles venant d’un même village, cohésion assurée.
La famille Rizzuto et ses alliés sont originaires d’une petite bourgade de Sicile, Cattolica Eraclea (province d’Agrigente). « 11 000 habitants dans les années cinquante, 4000 aujourd’hui ». C’est le constat que fait l’envoyé spécial du journal canadien La Presse, publié le 24 Mars 2013 : « Dans le fief des Rizzuto, en Italie ».
Une fois de plus, un clan, issu d’un même village, organise un trafic à grande échelle dans un pays développé, comme en Australie notamment.
Les journalistes canadiens André Noel et André Cedilot ont compté pas moins de « dix entrepreneurs en BTP, originaires de Cattolica Eraclea, en activité à Montréal ». In Mafia Inc. Grandeur et misère du clan sicilien au Québec. Les Editions de l’Homme.
Le clan a développé un réseau mafieux au Québec et enrichi ses proches, mais son village d’origine « se meurt » comme l’a constaté l’envoyé spécial de La Presse à Catottolica Eraclea. Ce constat est visible, à peu près partout. Les familles mafieuses s’enrichissent, mais pas l’ensemble de la communauté de leur fief.
La ‘Ndrangheta en Ontario
Les enquêteurs italiens semblent avoir fini par convaincre les autorités canadiennes de l’implantation et de la progression des activités de clans de la ‘Ndrangheta dans l’État de l’Ontario et particulièrement dans la riche capitale ontarienne Toronto.
Au Canada, une grande partie des services d’enquêtes criminelles est dirigée par certains États. La structure fédérale du Canada le veut ainsi, même si les services d’enquête de la Gendarmerie Royale Canadienne (GRC) possèdent une direction centrale. En matière d’enquêtes contre les mafias et les groupes criminels, la GRC travaille en collaboration avec les polices des États de l’Ontario (Ontario Provencial Police-OPP) et du Québec (Sûreté du Québec-SQ).
Les enquêteurs italiens et canadiens sont arrivés à plusieurs constats :
Des clans de Cosa Nostra dominent au Québec et des familles de la ‘Ndrangheta s’occupent de l’Ontario. Mais rien n’est figé. Les Calabrais avaient géré les affaires au Québec, avant l’implantation des Siciliens du clan Rizzuto (voir plus haut), une famille calabraise peut redevenir dominante.
Déjà les policiers italiens et ceux de la GRC voient monter en puissance des familles de la ‘Ndrangheta dans la « belle province ». Une analyste de la GRC, Linda Fequière, s’exprime devant la Commission Charbonneau en 2011 : « Je ne suis pas en train de dire que la faction sicilienne a complètement disparu, par contre il y a un retour du crime organisé d’origine calabraise qui fait suite à l’arrestation et à l’extradition (vers les USA, NDLR) de Monsieur Vito Rizzuto ». Ce dernier est condamné à dix ans de prison en 2007 et libéré en 2012, puis extradé au Canada où il meurt -d’une pneumonie- en 2013. Entre ces deux dates, une série d’assassinats des adversaires du clan Rizzuto a été enregistrée.
Actuellement les Siciliens du clan Rizzuto semblent avoir repris du poil de la bête et continuent à dominer leur « territoire » québécois. Un des fils de Vito Rizzuto a pris le relais, comme Don Vito qui avait succédé à son père. Trois générations aux affaires.
Au Canada, les familles mafieuses, siciliennes et calabraises semblent essayer d’éviter les affrontements directs « mauvais pour les affaires ».
La ‘Ndrangheta…dans toute l’Italie
En quelques années, la ‘Ndrangheta a dépassé, par son implantation en Italie, la Cosa Nostra sicilienne. C’est du moins ce qu’affirment les observateurs des mafias italiennes. Mais dire qui est le plus riche, le plus fort, le plus influent… relève d’un jeu sans réelles certitudes.
La carte des biens mafieux saisis par la justice italienne - ci-dessous - nous donne une indication du nombre de biens saisis et des localisations. Informations importantes, mais incomplètes.
Source : Agenzia nazionale per l'amministrazione e la destinazione dei beni sequestrati e confiscati alla criminalità organizzata (ANBSC).
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Comment se répartissent les biens saisis (en valeur) par organisation criminelle ?
1) Cosa Nostra (Sicile)
2) Camorra (Campanie)
3) N’drangheta (Calabre)
4) Différentes organisations criminelles
5) Sacra Corona Unita (Pouilles)
Souce : Direzione Investigativa Antimafia (DIA)
Ce classement des saisies, par organisation criminelle, n’est pas le reflet de la richesse respective de ces organisations. Il montre simplement quelles sont les mafias qui ont été les plus touchées par l’appareil répressif.
Nous pouvons quand même noter, qu’en dehors des territoires originels des quatre mafias italiennes (Sicile, Calabre, Campanie, Pouilles), le montant des saisies dans la riche Lombardie (Milan) est élevé. Nous voyons que ces mafias font des affaires dans tout le pays.
Siderno, encore et toujours le rôle d’une commune
Nous retrouvons, souvent, des groupements de familles issues d’une même commune. Ils constituent une « Cosca» ou « famille mafieuse », regroupant plusieurs familles de sang. En Calabre, on les nomme aussi " 'ndrine" au pluriel, " 'ndrina" au singulier. Comme pour la « cosca » de Plati et celle de San Luca, le cas de la ville de Siderno est intéressant à observer. Cette commune (17 500 hab.) fait partie de la métropole de Reggio de Calabre (Reggio di Calabria). Elle a donné son nom à un groupement de « familles mafieuses » surnommée «Siderno Group » par les anglo saxon. Le Poste de Commandement de cette cosca se trouve en Calabre et une part importante de ses activités illégales et légales, se déploient en Australie et au Canada. Une fois de plus, le lien criminalité-politique se confirme.
La citée calabraise a déjà été placée deux fois sous « administration extraordinaire », s’est à dire gérée par un commissaire nommé par l’État (2013-2015 et 2018-2021). En 2018, la Cour de Cassation italienne a confirmé la condamnation de l’ancien maire de Siderno (2001-2010), Alessandro Figliomeni, à une peine de 12 ans de prison pour « association mafieuse ». Dans le cadre de la même enquête, sept personnes ont été incarcérées au Canada (Ontario), dont deux parents du maire de Siderno (Radio Canada Déc. 2010).
Emprisonné depuis 2010, Alessandro Figliomeni a été libéré en 2021.
Italie, cap au Nord
La petite ville de Buccinasco (27 000 hab.) située à 14 Km de Milan, en Lombardie, représente un bel exemple de l’implantation de la ‘Ndrangheta au Nord du pays. Cette histoire de « colonisation mafieuse » est racontée par Nando Dalla Chiesa et Martina Panzarasa dans un livre-enquête : « Buccinasco – La ‘Ndrangheta al nord ». L’ouvrage décrit comment la mafia calabraise blanchit son argent sale, notamment dans le bâtiment. Cela n’a pu se faire qu’avec la complicité d’entrepreneurs et d’élus locaux.
M. Panzarasa est sociologue et N. Dalla Chiesa, sociologue et économiste, est le fils du Préfet assassiné à Palerme par la Cosa Nostra en Septembre 1982.
Les enquêteurs retrouvent des représentants de la ‘ndrina Barbaro en activité à Buccinasco. Cette même famille originaire de Plati est aussi bien implantée en Nouvelle Galles du Sud (Australie) qu’en Italie du Nord.
A l’exemple de la ville de Buccinasco, nous pouvons parler d’une « colonisation » de pans entiers de l’économie italienne et d’une corruption mafieuse étendue à l’ensemble du pays et au-delà, comme nous avons pu le voir avec les exemples cités, précédemment.
Cela montre le besoin de blanchir les montants considérables provenant du trafic de stupéfiants géré par les mafias, en général et par la ‘Ndrangheta en particulier.
Mais le principal enseignement est la complicité des acteurs locaux : entrepreneurs, élus (locaux et nationaux), fonctionnaires (locaux et nationaux), professions libérales (notaires, commissaires aux comptes…).
Ce « recyclage » d’argent sale, intervient sur un terrain favorable. Plusieurs facteurs se conjuguent : les besoins de liquidités en temps de crise (krach financier de 2008, Crise COVID…) participent à une « demande de Mafia ». C’est le constat que fait l’enseignant de sociologie et d’économie, à l’université de Turin, Rocco Sciarone. Dans une enquête collective, qu’il a dirigée, nous pouvons découvrir à quoi correspond ce « besoin de Mafia ». Les mafias ne sont qu’un élément d’une « zone grise » où se mélangent les acteurs, de la société civile, cités plus haut. La Mafia fait le lien entre tous ces acteurs « en demande ». In Mafie del nord-stratégie criminali e contesti locali.
Cette enquête nous apprend aussi que les mafias s’installent (en dehors de leurs territoires de base), de préférence, dans des zones où préexistent des pratiques illégales.
La riche Lombardie (Milan) représente donc un territoire, « à conquérir », qui possède toutes les caractéristiques nécessaires. Le terrain était déjà labouré.
Pour ce qui est des pratiques illicites, il faut rappeler que l’enquête judiciaire Mani pulite (début des années 1990), s’est déroulée dans la région de Milan. A l’époque le « pacte de corruption » avait pour acteurs des membres de la société civile (entrepreneurs, fonctionnaires) et les élus des partis de la majorité (Démocratie Chrétienne, Parti Socialiste Italien). Aujourd’hui, les mafias arrivent sur un terrain déjà habitué à ces pactes de corruption. Elles y ajoutent leur savoir-faire (violence et capital social). Les autres acteurs sont toujours les mêmes.
Il est impossible de dresser ici une liste de l’extension des mafias italiennes en… Italie. Pour les situer, nous pouvons nous reporter aux ouvrages cités dans cet article. Pour ce qui est de la seule ‘Ndrangheta, nous pouvons retenir, également, l’exemple de deux villes de Ligurie (nord-ouest du pays), sur la Riviera italienne : Bordighera (10 000 hab.) et Vintimille (24 000 hab.). Ces deux localités seront placées, un temps, sous administration provisoire « pour cause d’infiltration mafieuse des municipalités ».
Bordighera (2011-2013) et Vintimille (2012-2014). Dans les deux cas, la mafia concernée était la ‘Ndrangheta. Ces deux villes de la Riviera italienne se trouvent respectivement à 18 et 11 kilomètres de la frontière française.
Enfin, il est difficile de clore ce chapitre de l’implantation mafieuse dans le Nord de l’Italie, sans rappeler l’histoire de l’exposition universelle de Milan (Mai - Octobre 2015). L’exposition a failli ne pas ouvrir dans les temps, pour cause de retard dans la construction du site. Il a fallu faire appel à une société « de camouflage » pour masquer la poursuite des travaux, alors que « L’expo 2015 » était, finalement, ouverte au public. Le Procureur Nicola Gratteri, déjà lui, avertissait en 2009 que le chantier était noyauté par la ‘Ndrangheta. Des responsables politiques et des managers de « Milan 2015 » seront arrêtés par la police. Les arrestations ont visé aussi des membres de Cosa Nostra, ce qui peut signifier qu’il y a eu une « joint venture » entre les deux organisations criminelles. Les personnes poursuivies le sont pour des détournements d’appels d’offres. Le pavillon français n’est pas épargné par ces détournements de procédure. A ce propos, on peut se reporter à l’article du journal Il fatto quotidiano du 6 Juillet 2016 (voir lien précédent).
Les « joint ventures » ou associations entre deux mafias semblent assez répandues. Mais cela n’est pas « structurel ». Deux familles de mafias différentes peuvent travailler ensemble sur des « coups » précis : un «contrat » d’assassinat, un trafic de drogue… Le rapport d’étape (premier semestre 2020) de la DIA fournit quelques exemples de cette collaboration, notamment entre la ‘Ndrangheta et Cosa Nostra. Le rapport parle de « partenariats » (sodalizi).
La « méthode mafieuse » fonctionne dans le riche Nord italien, il n’y a pas de raisons pour que ce même modus-operandi ne fonctionne pas dans les pays étrangers à l’Italie. Les affaires récentes nous ont montré que ce mode opératoire est appliqué, de la même façon , dans différents pays européens.
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Ces critiques de certaines autorités italiennes datent du début des années 2000. La situation, en France, a-t-elle évolué ?
Des magistrats et des parlementaires informés … et alors ?
Le 09 Mai 2001, Philippe Dorcet, juge d’instruction au tribunal de grande instance de Nice, est auditionné par les parlementaires, membres de la mission d’information SUR LES OBSTACLES AU CONTRÔLE ET À LA RÉPRESSION DE LA DÉLINQUANCE FINANCIÈRE ET DU BLANCHIMENT DES CAPITAUX EN EUROPE. Extrait page 549 :
« J’ai appris, en discutant, de manière officieuse, avec des officiers de police judiciaire, que la mafia calabraise est organisée selon un régime de loges - les cosche. Dans les Alpes-Maritimes, sept cosche sont établies, la cosca mère étant à Juan-les-Pins, et dépendent toutes de la cosca de Vintimille. Enzo Ciconte (*) cite trois raisons pour lesquelles le crime organisé a décidé d'entrer en maçonnerie : intégrer le tissu économique local, avoir des liens au sein des institutions et approcher les magistrats. [...] » . Visiblement, près de 23 ans après ces propos, les choses (législation, enquêtes…) semblent bouger lentement.
*Enzo Ciconte, auteur d'un ouvrage sur la mafia calabraise (N'drangheta – dall’Unita a oggi Ed.Laterza- 1992) était, sous la Xème législature italienne (1987-1992), député (PCI), membre de la commission des Lois.
En fait, la France est considérée par les autorités judiciaires, comme un lieu de « mise au vert ». Des mafieux en cavale viennent s’y réfugier, plusieurs y seront du reste arrêtés. Quelques « joints-ventures » y sont repérées, avec le milieu local, particulièrement sur la Côte d’Azur, mais à part des opérations très ponctuelles, on ne semble pas assister à des tentatives de « colonisation » comme sur la Riviera italienne par exemple, ou même comme en Australie ou au Canada.
Pour l’instant, la France semble bénéficier d’un « statut à part » dans le système d’implantation internationale des mafias italiennes.
Pour ce qui est de l’implantation des mafias italiennes en France, notre pays a souvent été présenté comme « une base de repli », ou bien comme « une zone de transit ». A ce jour, seuls des trafics limités -bien que fructueux- ont été démontrés.
Plusieurs hommes, de différentes organisations mafieuses transalpines, ont été arrêtés dans l’hexagone, ces dernières années. La plupart du temps, ces individus étaient en France pour se mettre « au vert ». Cependant, d’après des enquêteurs cités par Le Figaro (5 Mars 2012), la « Côte d’Azur deviendrait une base logistique ».
Des « familles » ou des membres des trois principales mafias italiennes ont été identifiés ces vingt dernières années
Une «famille » de Cosa Nostra, dans la région de Grenoble (Commission d'enquête parlementaire sur les tentatives de pénétration de la Mafia en France, 1993).
En 1991, une importante opération de police est lancée, conjointement, en Italie et en France contre des membres de la Camorra. Une quinzaine de personnes sont arrêtées (Nice, Marseille, Paris). Parmi elles, on trouve l’épouse, la sœur et le beau père de Michele Zaza. Ce dernier était un boss de la Camorra, arrêté en France en 1989 et accusé de trafic de drogue.
Ce même Michele Zaza sera soupçonné d’avoir tenté de s’accaparer le casino de Menton, en 1989, en relation avec des membres du « Milieu corse ».
En Mars 2011 un membre présumé de la Camorra, Umberto Naviglia, est condamné à dix ans de prison par la cour d’Assises de Paris pour « importation et détention de drogue ».
En 2012, une écoute téléphonique effectuée par les policiers italiens a débouché sur une découverte à Menton, près de la frontière. Un membre de la ‘Ndrangheta a obtenu le marché du terrassement d’un bâtiment qui doit abriter la Communauté d’Agglomération de la Riviera française et… la Maison de la Justice.
Le 15 septembre 2020, 450 gendarmes français et 120 carabiniers italiens ont procédé à l’interpellation de membres d’un vaste trafic de stupéfiants entre la France et l’Italie.
Un total de 45 personnes ont été interpellées, 34 en France, dont 22 dans le Var et les Alpes-Maritimes, et 11 en Italie, en Ligurie, région frontalière avec la France. Trafic en relation avec certains membres de la ‘Ndrangheta.
Du blanchiment sur la Côte d’Azur
Dans la nuit du 14 au 15 Janvier 2020, la Cour spéciale d’appel d’Aix en Provence condamne un habitant de Vallauris (Alpes Maritimes) Antonio Magnoli, à 12 ans de réclusion criminelle, pour trafic de drogue. A. Magnoli est originaire de Calabre. Ce n’est pas un crime, mais il est soupçonné, par les enquêteurs italiens et français d’être membre d’une ‘drina de la ‘Drangheta, la famille Mole. Il s’agit d’un clan qui « cogérait » le port calabrais de Gio Taura, le plus grand port à conteneurs d’Italie et surtout une des portes d’entrée de la cocaïne en Europe. La cogestion mafieuse était réalisée avec la plus importante cosca de Calabre, le clan Piromalli. Les deux ‘ndrine se sont fâchées, mais continuent leurs activités.
Plusieurs membres de la famille Magnoli résident à Vallauris et sont soupçonnés, par les enquêteurs de la DNA, de blanchir l’argent des trafics de drogue, dans plusieurs communes de la Côte d’Azur.
Pour l’instant, les autorités ne signalent pas de gros investissements des mafias italiennes, tels qu’on peut en trouver en Allemagne, en Belgique ou en Espagne. La France ressemble à une zone de transit. Cependant, les hommes sont bien là. D’après Francesco Forgione, journaliste et ancien Président de la Commission parlementaire italienne Anti Mafia, la Camorra « est présente sur la Côte d’Azur » et « la 'n’drangheta aurait, d'après des enquêtes italiennes, une "chambre de contrôle" entre Marseille et Toulouse, une structure de coordination entre les clans à cheval entre la France et l'Italie, servant notamment à gérer la cavale des fugitifs » L’Express, 19 Août 2010.
Il faut comprendre que l’implantation durable d’une mafia et non une simple alliance sur un trafic, signifie la conquête d’une partie de la zone concernée, notamment à travers les instances politiques et entrepreneuriales. Soit il existe des endroits en France où cette implantation a été réalisée et personne ne l’a découvert, soit l’organisation politique française est assez solide pour résister à ce type de tentative. Il est aujourd’hui difficile de trancher.
Pour ce qui est de la Corse, les informations sont rares. Il a été question de relations et de voyages de membres de la Brise De Mer en Russie. Dans ce cas, la « colonisation » ressemblait plutôt à un échange de compétences. Les enquêteurs français ne semblent pas être allés très loin. Dans son livre « Mafia Export » déjà cité, Francesco Forgione dresse une carte des implantations mafieuses en Europe. Page 104, se trouve le détail d’implantations d’activités en France. Pour la Corse, la carte montre la présence de représentants de la mafia napolitaine (Camorra) du clan «Secondigliano » qui « commercialisent des produits industriels et des vétements contrefaits ». Le journaliste-enseignant ne donne pas d’autres précisions.
L’influence politique du pouvoir mafieux
Nous le verrons dans un autre chapitre, l’influence des mafias sur le processus électoral est très important.Tant et si bien que le législateur a prévu un article du code pénal sur les manipulations électorales. Sur le territoire originel des quatre grandes mafias italiennes, leur capacité de mobilisation d’une partie de l’électorat est proportionelle à leur influence économique et à la nombreuse parentèle, directe ou par alliance.
Au début de cet article, nous avons vu la carte des familles mafieuses implantée dans la province de Vibo Valentia. Ci-dessous, nous pouvons voir l’implantation de « familles » dans trois autres provinces et sur la ville de Reggio di Calabre. Le maillage du territoire est impressionant et encore, toutes les provinces de la région ne sont pas représentées sur ce montage. La Calabre compte cinq provinces administratives.
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Par définition il n’existe pas de recensement du nombre de mafieux. Selon les sources (Police, Justice..) compilées par la commission parlementaire antimafia, les membres directs de l’organisation calabraise tourneraient autour de 6000 personnes, sans compter un nombre important d’affiliés.
La ‘Ndrangheta, comme les autres mafias, ne se contenterait plus de soutenir tel ou tel candidat des partis influents, de niveau national et/ou régional. Les organisations ont établi un rapport direct avec les forces politiques. C’est la thèse du sociologue Pino Arlacchi. « Le rapport avec le monde extérieur à la zone d’influence du chef de mafia n’est plus médiatisé par le député local (…) mais il est direct et immédiat ». In Mafia & Cies. Déjà cité. L’enquête de Pino Arlacchi date de la fin des années 80, mais les derniers rapports annuels de la DIA semblent confirmer le constat de ce rapport « direct » entre mafia et politiques.
Mafia corse ou mafias en Corse ?
Plusieurs observateurs craignent une « invasion » des mafias étrangères dans l’île, donc en France. Pourtant, Il n’existe pas à ce jour d’exemple de mafia « colonisant » un autre pays, quand celui-ci possède déjà des organisations criminelles assez puissantes. Bien sur il y a eu l’exemple de la Cosa Nostra américaine -avec des associés corses- dans le Cuba d’avant Fidel Castro, mais on peut dire que cette île était un État américain « clandestin », une sorte de colonie inavouée. Cependant on imagine mal la mafia russe, par exemple, se développer en Grande Bretagne sans accords avec le Milieu britannique. En revanche, les grandes mafias (russes, italiennes, asiatiques…) possèdent des capitaux, des réseaux et un savoir faire. A l’exemple des entreprises multinationales, les mafias peuvent lier des alliances (« joint venture ») sur des opérations ciblées. La « French Connection est un bon exemple de la capacité de plusieurs groupes criminels (USA, France, Turquie…) à monter un réseau international de trafic de stupéfiants.
Nous avons pu constater que les groupes criminels s’implantent dans le nouveau monde là ou il y a des affaires à réaliser (USA, Canada, Australie…) et dans des pays, pauvres (Afrique) ou en recomposition (pays de l’ex bloc de l’Est). Ce qui est frappant, c’est leur capacité à signer une forme de « contrat » avec des forces locales, qu’elles soient légales ou pas. Le légal est corrompu et l’illégal (milieu local) est généralement associé, de gré ou de force, selon sa puissance.
Ces groupes criminels « allogènes », qui s’installent dans un pays, Alain Bauer les appelle « l’ennemi intérieur ». Cet enseignant de criminologie indique que cet « ennemi » s’appuie sur des groupes criminels locaux. « Qu’ils soient dominés ou bien ravis de cette opportunité d’expansion ». In « La globalisation du crime ». Revue Pouvoirs 2010 (N°132).
Pour ce qui est de la Corse, la commission d’enquête parlementaire « Sur l’utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse » (1998) a émis cet avis : « S’agissant de l’éventuelle implantation de la mafia italienne, de nombreux observateurs soulignent que l’île est suffisamment pourvue en bandits pour ne pas éprouver le besoin d’en importer de l’extérieur ». A ce jour, dans les différents dossiers où la présence d’une Mafia (mot générique, trop souvent employé par des parlementaires ou des magistrats, pour désigner la Cosa Nostra sicilienne) a été signalée (île de Cavallo) les enquêtes ne sont pas allées bien loin. Des observateurs estiment que le Milieu corse, jouant « à domicile », s’est montré particulièrement habile, allant même jusqu’à « rouler » certains intervenants extérieurs.
Un Milieu corse « autonome » ?
Nous avons vu à travers l’exemple de la ‘Ndrangheta à quoi ressemble l’organisation d’une grande Mafia italienne et quelle capacité d’extension nationale et internationale elle possède. Le schéma est le même pour la Camorra et la Cosa Nostra. Les décisions sont prises localement, sous une certaine forme hiérarchique, variable selon les mafias.
Au niveau du (gros) volume de délinquance, comme des implantations internationales, le banditisme corse -quelle que soit son appellation- ne semble pas jouer « dans la même division ».
A cela, il faut ajouter les conséquences sur le paysage urbain et rural du Mezzogiorno. Il faut se rendre sur place pour observer les conséquences du « malgoverno » dans bien des domaines visibles : urbanisme, architecture, état du réseau routier et des infrastructures, gestion de l’eau et des ordures… Nous verrons des exemples dans les chapitres consacrés à Naples et à la Sicile. La pauvreté qu’a connue la Corse, n’a jamais atteint le niveau de misère du Mezzogiorno.
La vieille blague qui circule en Corse, à propos de certains élus est « quand on construit une route, nous avons deux tiers d’enrobé et un tiers de dérobé », même si cette histoire se concrétise parfois en Corse, dans plusieurs régions d’Italie les proportions sont carrément inversées. La mainmise des mafias italiennes sur les appels d’offres des marchés publics, peuvent s’accompagner de travaux réalisés au moindre coût, avec parfois des conséquences dramatiques.
A ce jour, tout en parlant de « Mafia » corse ou de « Mafia » en Corse, aucun des acteurs (magistrats, policiers…) ou observateurs (journalistes, chercheurs…) n’a mis à jour ce genre d’organisation, même informelle du grand banditisme en Corse. Cela ne veut pas dire qu’une telle organisation « sous forme de Mafia » n’existe pas. Il faut rappeler ici que le Code Pénal français ne connait pas de « délit mafieux » et que, mécaniquement, on ne peut poursuivre juridiquement ce qui n’est pas nommé.
Nous pouvons toujours poser la question : en Corse, existe-t-il une Mafia cachée, dont l’existence reste à prouver ?
Il me parait difficile, aujourd’hui, de répondre de manière définitive à une telle question. Je vais donc poursuivre le travail comparatif déjà entamé.
Le prochain article sera consacré aux Yakuzas. La mafia japonaise est également considérée comme « une des plus importantes du monde ». Nous verrons les traits communs et les divergences avec les mafias italiennes. Nous essayerons, une fois de plus, d’observer quels sont les détails qui convergent et ceux qui divergent avec le « cas corse ».
Bibliographie :
Mafia calabraise : les dix commandements. Nicola Gratteri-Antonio Nicaso. Ed. L’EXPRESS
La ‘Ndrangheta. Stéphane Quéré- Enquête au cœur de la plus puissante des mafias italiennes. La Manufacture du livre
Mafia export. Comment les mafias italiennes ont colonisé le monde. Francesco Forgione. Actes Sud
Les mafias au Québec : Mafia Inc. André Célidot-André Noël. Ed. de l’Homme
Buccinasco – La ‘Ndrangheta al nord. Nando dalla Chiesa-Martina Panzarasa. Ed. Einaudi
Mafie del nord – Stratégie criminali e contesti locali. Rocco Sciarrone. Donzelli 2019
MAFIE DEL NORD: strategie criminali e contesti locali. Rocco Sciarone. En ligne.
Mafia & Cies. L’éthique mafiosa et l’esprit du capitalisme. Pino Arlacchi. Presses Universitaires de Grenoble
Liens vers sites et articles
Analyse comparée de l’infiltration mafieuse en Allemagne et en France. Revue Conflits Octobre 2020
Mafia et contrôle du territoire : « ll capitale sociale della mafia. Relazioni esterne e controllo del territorio ». Rocco Sciarone. Quaderni di Sociologia, 18 | 1998
Daily Mail Australia on line : Australie et ‘Ndrangheta
L’évolution de la ‘Ndrangheta en Australie. The evolution of the Australian 'ndrangheta. An historical perspective. Anna Sergi. Australian & New Zealand journal of Criminology (2014)
Les procès de mafia (XIXème – XXème siècle). Jacques de St Victor. Histoire de la Justice 2017/1 (N° 27)
Quand le Fascisme, centralisateur, fait semblant de combattre les mafias. Fascismo e criminalità organizzata in Calabria Thèse universitaire
La fraternité interne des mafias (‘Ndrangheta-Cosa Nostra). Mafia Brotherhoods:Organized Crime, Italian Style Letizia Paoli. Oxford UNIVERSITY PRESS
Le passage de la 1ère à la 2ème République italienne : peu d’effet sur les mafias. Centro Siciliano di Documentazione "Giuseppe Impastato"
Mise sous tutelle de municipalités italiennes
Mise sous tutelle Vintimille Bordighera…
‘Ndrangheta : la mafia calabraise passe aux aveux - Paris Match, 05 Sept. 2023
‘Ndrangheta : origines, histoire, structure. In site « Antimafia » Domenico Cilione
Les mafias italiennes en Allemagne. « Piu di mille mafiosi vivono in Germania ». In Il Fatto Quotidiano (01/02/2024)
Les mafias italiennes : du contrôle du territoire à la dimension transnationale, Fabrice Rizzoli. Centre français de recherche sur le renseignement (août 2019)
Sur la dimension culturelle et familliale de la ‘Ndrangheta : ‘Ndrangheta et autres mafias italiennes : des influences culturelles balkaniques ? Confluence Méditerranée 2017/4 (N° 103)
Portrait d’un boss de la ‘Ndrangheta, Rocco Morabitto. Courrier International 06/07/2022
Rapport Commission d’enquête parlementaire « sur le phénomène mafieux ». Italie Commission bicamérale, Chambre des députés-Sénat
"les mafias en Europe" États généraux de la lutte anti mafia. (Université de Catane, 2016-2018)
Lien vers le même article sur le blog "E pericoloso sporgersi"