En sabordant ses émissions, en direct, sur l'antenne d'Europe 1, Dominique Souchier défie "la Bêtise au front de taureau". Celle qui a édicté des règles idiotes du CSA. Celle d'une hiérarchie inepte et servile.
Dominique Souchier est un journaliste exemplaire. Scrupuleux jusqu'à l'anxiété, il a signé à la fin des années soixante-dix sur France Inter, une des plus belles revues de presse radiophoniques. Aux petits matins, fébrile, échevelé à force de chercher les mots justes et l'équilibre entre les citations, il sculptait comme dans un état second de grands moments d'information.
A l'ouverture de son temps d'antenne, sa voix puissante, sa diction parfaite figeaient les professionnels présents dans les bureaux et les studios au quatrième étage de la Maison de la Radio. Il ne faisait pas de "spectacle", méprisait l'humour raccoleur de ses piètres concurrents de l'époque. Souchier voulait aller au fond du débat d'idées, qui était alors plus intense qu'aujourd'hui. Ces "moments Souchier" résonnent encore à l'instar de certains moments de musique chargés de sens. Comme saxophoniste, il modulerait à la manière d'un Eddie "Lockjaw" Davis dont sa voix avait, bien plus qu'aujourd'hui, la sonorité tranchante, impérieuse car profondément honnête. Comme violoncelliste, il serait Pablo Casals dans les Suites.
Ce n'est pas la première fois que Souchier rencontre "La Bêtise au front de taureau". En 1981, à l'approche de l'élection présidentielle, nous avions été attirés dans l'antre du préfet Riolacci, trouble conseiller de Giscard en fin de règne. Le gros flic au front bas - et à la capacité cérébrale idoine - nous avait menacés car nous n'étions pas "dans la ligne" qui aurait dû être, selon le gros flic (qualifié à l'époque de "stratège") celle du service public giscardisé.
Aujourd'hui, Dominique Souchier défie une autre conjuration des médiocres. Celle qui est incarnée par un Denis Olivennes, quelconque courtisan goinfre. Celle que résume Arlette Chabot, intellectuellement et culturellement nulle et professionnellement minable, contorsionniste passée de Françoise Gaspard et Yvette Roudy à Balladur puis à Sarkozy, qui - curieusement - ne la prise guère.
Souchier est admirable en ce qu'il montre aux futurs et jeunes journalistes ce qu'ils doivent se préparer à affronter pour rester propres: des Riolacci ou des Guéant, flics sans envergure, des Oliviennes et des Chabot, serpillères dont tous les pouvoirs peuvent se servir.