Tout a commencé parce que j'ai eu la bêtise de vouloir discuter de néo-féminisme sur MDP. Je suis instantanément tombé sur un des pit-bull des forums qui, dès sa première réponse, m'a agoni d'injures. Moi, je venais pour discuter, pas pour me colleter les insultes des plus tarés du forum. J'ai répondu en démontant ses calomnies, et à son second message, il est devenu franchement odieux : m'accusant ni plus ni moins de rigoler à propos des femmes démolies suite à un viol ! Ce n'est qu'ensuite que la modé de MDP m'a appris qu'accuser quelqu'un de ce genre de choses, c'était pas du tout insultant !
En fait, j'illustrais mon désaccord envers un article néo-féministe de MDP, et c'était déjà trop, semble-t-il. Il était question d'un type accusé de viol par une ex-compagne (et non une copine d'un soir). La fille l'a raconté ainsi : "je lui ai dit clairement non, et il a continué". Ok, elle voulait pas ce soir-là et il aurait pu (et du) s'abstenir. L'indélicat a malgré tout du être surpris quand il a vu quelque temps après sa tête en gros plan en une de Libé, avec les mains tâchées de sang ! Hum... Suite à la désapprobation de gens choqués par ces méthodes, l'article expliquait que la presse était en droit de faire ce genre de choses, qui non seulement n'étaient en rien contraires à la présomption d'innocence, mais en outre d'intérêt public !
Je remets ici mon commentaire de l'époque, qui m'a valu en réponse de la part du pit-bull le qualificatif de "répugnant" (sic), de me voir accusé de promouvoir "la culture du viol" (sic), et in fine d'être traité de "salaud" (sic).
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Admettons que le but de faire prendre conscience des dérives sexuelles soit noble : pourquoi allez jusqu'au systématisme dans ces affaires ? Pourquoi toujours prendre parti du même côté sans jamais rien nuancer ?
Peut-on salir la réputation d'un homme et le livrer ainsi à la vindicte populaire, jusqu'à voir sa photo en première page d'un des plus grands quotidiens ? Jusqu'à aller se cacher derrière le fait que la présomption d'innocence ne serait soi-disant qu'une anecdote judiciaire ? C'est une blague ? On peut ici rappeler que la présomption d'innocence part du principe que mieux vaut un coupable en liberté qu'un innocent en prison. Bref, dites carrément que vous préférez l'innocent en prison et les choses seront enfin claires, au lieu de surfer sans cesse sur les seuls mots sans jamais atteindre le fond des choses !
A ce stade, j'informe que je ne sais rien de cette affaire ni de qui est ce Mr Bennacer. C'est pas mon sujet.
De plus, vous osez dire que "la présomption d’innocence n’est pas une assignation au silence". On aurait donc le droit, une fois étouffé par terre par le genou d'un flic, de ne pas se taire ? Madame est trop bonne ! Donc dans l'ordre, on est livré aux chiens en première page d'un journal, et ensuite on a le droit de se défendre, trop cool ! Et avec ça, faudrait proscrire le terme sous prétexte que ce serait "nouvel argument bâillon". Rappelons que les bâillonnées en question sont celles qui ont fini par amener au type en première page, les mains ensanglantées ! Ça va, pas trop serré, le bâillon ?
Un meurtrier médiatisé est certes dans la même position, sauf que déjà le point de départ est un fait bien réel : un mort. Alors que ce dont il est question ici n'est que que d'accusations dont personne ne sait rien. Et quand le supposé meurtrier est in fine jugé non-coupable, il a le droit aux mêmes titres de journaux et avec les mêmes gros caractères. Ici, le type peut se faire traîner dans la boue pendant des semaines, tout juste aura-t-il droit à un entrefilet un jour pour dire que finalement, il était pour rien dans tout ça ! Ça fait pas cher le scoop...
Et en guise de justification, on a droit en général à "on ne fait pas d'omelette sans casser des œufs". Et de poursuivre en affirmant sans rire que ce genre d'affaire serait "d'intérêt public", que "le citoyen a le droit de savoir" et autres fariboles ! C'est d'intérêt public que "le citoyen" sache ce qu'il se passe dans le slip de monsieur Bennacer ? Ah oui, c'est le combat des femmes qui est "d'intérêt public". Merci, j'avais pas compris.
Sinon et à propos, il est où, le débat ?
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Bref, une charge certes virulente mais à mon sens bien tournée, en regard de la moyenne de ce qu'on lit ici.
En suivant ce genre de forums invoquant le néo-féminisme, je suis ensuite tombé sur mille commentaires réagissant de façon tout aussi insultante vis-à-vis de qui ne serait pas dans le droit fil de MDP. Des gens qui fliquaient absolument tous les fils sans être jamais dé-publiés par la modération. Je l'ai dénoncé sans relâche, et tout ça a fini en guerre de tranchées avec l'une d'entre elles. Résultat : banni une semaine.
Il y a deux possibilités : ou bien Plenel est d'accord avec ce genre de méthode, ou bien il se fiche complètement des forums et le participatif tant vanté par MDP est du pipeau (à moins que la participation côté MDP consiste à envoyer des gens faire taire les dissidents, voire sous pseudo, ce qui serait parfaitement méprisable).
Je le répète : où est le débat ? Où est le fameux participatif tant vanté par MDP ? Et il en a été de même à propos de la gestion du covid. Où est le participatif à MDP ?
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Par ailleurs, il semble qu'Edwy Plenel ait une grande thèse : comme quoi que pour être politiquement capable de faire des choix responsables, il faudrait que les citoyens soient en possession d'éléments d'information clairs : si l'on éradiquait les infos mensongères, les gens auraient une chance de devenir des citoyens éclairés. Le rôle du journaliste serait d'intérêt public. Le citoyen aurait "droit" à l'ensemble des informations en toute transparence, et c'est à cette seule condition de qu'on pourrait arriver à un endroit où la démocratie pourrait enfin être effective. Sans doute Plenel a-t-il en plus été échaudé par les compromissions reprochées à la gauche, et ça se comprend. N'empêche que tout ça ressemble quelque peu au laïus communiste d'il y a un siècle, qui prônait qu'il suffirait que le peuple soit éduqué pour qu'il comprenne les choses et que les gens soient capables de se comporter en citoyens responsables. Sauf qu'à l'époque, le peuple était analphabète. Le mensonge aurait ainsi pris la place de l'absence d'éducation ? Quoi qu'il en soit, le problème est de savoir s'il se rend compte que sa thèse ne repose que sur le fait qu'à force de dévoiler les mensonges, on ne pourrait qu'arriver à je ne sais quelle vérité ! En attendant et ce faisant, on révèle quoi ? Que le monde est injuste ? Qu'il y a des gens pour les rendre encore plus injuste ? Mais qui a besoin de Plenel pour savoir ça ?
Je me souviens aussi d'une phrase très étrange qu'il avait prononcé, supposée défendre MDP : "Citez-moi UN article de Médiapart qui ne soit pas d'intérêt public". Ça m'avait sur le moment troublé et j'ai cherché à en comprendre le pourquoi d'une telle formulation. Il aurait pu se contenter de parler de l'utilité de la voix de MDP au sein de la presse, ou d'évoquer tel ou tel combat que le journal met en avant. Mais c'est pas ça qu'il avait fait, il parlait de tous les articles. Il y aurait donc une Cause majuscule à MDP qui relèverait de "l'intérêt public" ? Qui chapeauterait en quelque sorte l'ensemble des causes que le journal défend, au lieu que chacune d'entre elles doive être abordée une par une ? C'est très différent.
Et j'en ai conclu que la cause en question n'était rien d'autre que l'intérêt public. A ce stade, on peut penser que Plenel se sent investi d'une mission. Politique alors, me direz-vous ? Peut-être. Quoi qu'il en soit, on peut sans doute soutenir avec lui que les gens ne sont pas si mauvais, et qu'ils seraient en outre moins idiots s'ils vivaient dans une société juste. Je pense moi-même que s'ils avaient accès aux bonnes questions, ils répondraient plus intelligemment. De là à dire que la transparence médiatique serait la condition sine qua non de la résolution du problème, il y a un pas. Les gens répondraient sans doute mieux si les questions étaient moins biaisées, mais de là à comprendre la nature profonde des problèmes, c'est une autre affaire, chacun ne comprenant pas plus loin que ce que son expérience et ses capacités permettent. Aussi comment savoir ce qu'est une "bonne question", et en quoi dénoncer les mensonges suffirait-il ? Rugy sert des homards payés par l'argent public à ses convives. Et ? Il profite de sa position. Et ? C'est pas moral. C'est ça, l'endroit de vérité supposée triompher des méfaits du mensonge ? Tout ça pour ça ?
Bref, on est en pleine utopie. Mais on est surtout dans un monde où une certaine élite est persuadée de tout savoir, en l'occurence qu'il suffirait que les gens aient les mêmes infos qu'elle pour ne pouvoir que penser comme elle. Plenel peut certes plaider qu'il s'agit surtout de faire comprendre à un ouvrier que c'est pas en votant RN que sa vie s'améliorera. En attendant et vu le traitement de MDP sur le néo-féminisme : tous les combats de MDP seraient-ils logés à la même enseigne ? Parce que si chaque cause participe d'une "mission", quelles que fussent les bonnes intentions de Plenel, on aboutit à à un système où chacune d'elle ne peut qu'aller dans le bon sens, ce qui hautement problématique ! D'autant que si une telle élite savait tant de choses, comment ne pourrait-elle pas aussi savoir que répondre à une question n'a de sens que si l'on a conscience de la complexité du problème en question. Qu'est-ce qu'on en aurait à faire d'une "vérité sans compréhension" ? Et l'on aura beau fourguer toutes les (bonnes) infos qu'on veut, ça n'amènera en rien à ce que ceux qui ne sont pas en capacité de comprendre le deviennent (chacun peut peut-être plus ou moins répondre aux questions simples. Mais qu'en est-il quand la complexité s'en mêle ?) En outre, un mensonge n'est-il pas plus visible et propice à être remis en cause qu'une proposition ayant de faux airs de vérité ? Et du coup, ladite "vérité" n'est-elle pas plus dangereuse pour la démocratie, car virtuellement porteuse de pensée unique et donc de totalitarisme ? Enfin qui la dira, cette vérité ? La morale ? Le bon sens populaire ? Plenel ?
Tout ça pose un problème énorme : est-ce que croire à ce genre de thèse et la mettre en application, c'est dire la vérité aux gens ?
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Plenel est-il "en mission" ? Et quelle mission sinon éduquer le peuple ? En tous cas, on a vu ce qu'il en coûte de refuser de se plier aux diktats de MDP. Avec le néo-féminisme, il est juste question de transformer l'homme (!) Certes, il y a peut-être une vision raisonnable, qui parle d'éducation sociale, politique etc. Mais il y en a une autre, stupide et dangereuse, où il est question de rien moins que de faire table rase des choses. Et ça, notre estimable patriarche ne peut pas ne pas le voir. Alors ? Serait-il débordé par le pseudo féminisme de fillettes enragées ? En tous cas, on laisse faire des méthodes totalitaires sur MDP, voire on les encourage. Alors quoi ? La fin justifierait les moyens ? Au nom de la démocratie, il faudrait se résigner à un monde totalitaire pour qu'une vraie démocratie puisse advenir un jour ?
Est-ce que tout ça a un sens ?