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Billet de blog 23 juin 2016

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Les gauches, de l'histoire au mythe, du mythe à l'idéologie

"On change d'optique quand on devient chef du gouvernement", Léon Blum.

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Léon Blum "le juif"; Léon Blum le "traître vendu au bourgeois", qui n'est pas intervenu en Espagne face à une forte opposition en France, notamment dans l'opinion publique, mais qui a finalement prôné une non-intervention relâchée consistant à laisser passer des armes aux civils s'opposant aux forces de Franco; "L'embourgeoisé", qui a stoppé les réformes sociales alors inefficaces face à la crise persistante et au chômage montant. Léon Blum, trahi par une fronde dans son propre groupe à l'Assemblée nationale majoritairement SFIO et gauche radicale (centristes aujourd'hui). Léon Blum qui fera parti des seuls 80 parlementaires (majoritairement centre-gauche) à refuser d'investir Pétain des pleins pouvoirs.

Blum, une page importante dans l'histoire des socialismes nés au XIXème siècle et des gauches, nées durant la période révolutionnaire en se plaçant à gauche du groupe royaliste situé à droite du roi. Des gauches issues de diverses horizons, à gauche car s'opposant aux régimes autoritaires des XIXème siècle (empires, monarchies, etc.). Une gauche issue des gauches qui, au pouvoir, durant le XXème, n'a toujours connu que la fronde et les attaques de l'extrême-droite. Rien ne se perd, tout se transforme! Y compris les éléments de propagande actuellement utilisés pour les manifestations anti loi travail. 

Les éléments de propagande tels que "mort au capital", "croissance pas bien", "l'argent c'est mal" reprennent toute la litanie du peine-à-jouir autoritaire excitant et utilisant ses ouailles pour se faire mousser à travers l'imaginaire idéologique. L'idéologie, un abandon à l'abstraction intellectualisée d'une Chose souvent relié à un "père" et à un objet. L'idéologue est le contraire du philosophe et ses desseins ne sont pas la sagesse, ni la tempérence. Au contraire, tout n'est que déformation de l'histoire, désinformation et détournement d'idées (en cherchant des cautions universitaires). Marx est d'ailleurs un très bon exemple.

«Tout ce que je sais, moi, c’est que je ne suis pas marxiste», Marx à propos du marxiste français, Jules Guesde, refusant tout compromis des ouvriers avec les "forces bourgeoises". La seule véritable internationale des travailleurs conforme à Marx (la seule qu'il ait connue de son vivant) a rassemblé des syndicats modérés anglais, des artisans français proudhoniens et des anti-autoritaires (Bakounine). Le reste n'est qu'élucubration de propagandistes auteurs de pastiches et brûlots. Marx était historien et économiste, il a fait l'apologie des révolutions bourgeoises et du capital (1ère partie du Kapital) et il est, de surcroît, libéral (opposé à une éco-politique autoritaire).

Marx propose une critique objective de l'économie politique du XIXème siècle marqué par l'autoritarisme politique et économique, l'absence d'imposition équitable/ redistribution, avec des droits théoriques impossibles à mettre en oeuvre pour des individus exclus du suffrage (suffrage censitaire) et de la justice (d'où sa critique objective des droits de l'Homme). Le marxisme, quant à lui, est un détournement des travaux de Marx opéré par des idéologues excitant et utilisant leurs chaires laborieuses en demande, tout comme le néolibéralisme est un détournement des travaux d'économistes libéraux, diffusé durant la guerre-froide pour porter atteinte à la démocratie et au rôle régulateur de l'Etat (Keynes).

Les milieux libéraux de la guerre-froide, traumatisés par la 2nde guerre, le stalinisme (révélation des crimes) et influencés par la diffusion du néolibéralisme issu de travaux d'économistes libéraux, via des fondations, think tank, partis, écoles, etc., vont en finir avec le keynésianisme et le rôle régulateur de l'Etat. Le néolibéralisme, associé à la liberté, est en fait profondément antilibéral en ce qu'il favorise les tyrans dans leur fief échappant à toute contrainte légale (notamment celui de l'Etat fédéral ayant aboli l'esclavage et prononcé les libertés civiques des années 60) et les concentrations économico-politiques (anti-concurrentielles et anti-pluralisme).

Cette idéologie est d'ailleurs portée, dès l'origine, par les milieux très conservateurs (et libertariens) associés à la John Birch Society, le Cato Institute et la Héritage foundation, notamment. Le Tea party, mouvement de rue pronant une forme de désobéisance civile (sous couvert de "résistance") et constitué durant les dérives sécuritaires et anti-démocratiques de l'administration Bush, regroupe des oppostants de diverses horizons. Nombreux sont issus du libertarianisme et diffusent l'idée du complot du super-pouvoir contre les citoyens, aux moyens de techniques tout-à-fait critiquables et de détournements. Ce mouvement est aujourd'hui associé à l'extrême-droite américaine pronant la révolte armée.

Que dire également de la fondation Copernic? Fondée sur un anti-libéralisme primaire (au-delà de toute critique objective) et associant (viles) démocratie et économie de marché, elle accuse la gauche libérale de faire monter le FN... On se demande pourtant qui entretient le discours - véhicule émotionnel - ambiant : libéraux, élites, complot, pensée unique ? Et ce, en culpabilisant le groupe accusé de permettre l'ascension du FN par son inaction... Mais quelle action est souhaitée au juste? A noter que les grandes victoires du FN, notamment le 1er tour des présidentielles, ont succédé à des gouvernements démocrates et régulateurs du marché.

A noter également que des députés du Front populaire (pas vraiment libéraux, ni libérés de leur maître-loi-objet), connus pour les manifestations collectives, certes, mais aussi pour la validation des décrets-lois Daladier sur les étrangers, ont directement investi Pétain des pleins pouvoirs... Le libéralisme associé au laisser-faire économique avec la complicité de l'Etat, cause de l'extrême-droite, encore un mythe, donc. Les idéologues antilibéraux ne vivent que de mythes qu'ils revendent aux autres... Mais ce qui est sans doute le plus drôle, c'est que nombreux antilibéraux empêtrés dans leur imaginaire, sont en fait les esclaves au service de leur maître.

"On change d'optique quand on devient chef du gouvernement", a dit Léon Blum. Un parlementaire juriste qui a bien compris que la meilleure façon de résister c'est de dire non! Y compris aux tendances les plus nihilistes et il connaissait son milieu. Léon Blum qui a bien connu l'immobilisme parlementaire sous la IIIème, le jeu partisan malsain entre extrêmistes en France, entre des ouvriers et un patronat se renvoyant la balle à l'Assemblée et dans la rue. C'est le 49-3 de la Vème qui sera le remède. Un outil créé pour les situations où un gouvernement réformiste est empêché de prendre des mesures qui gênent les idées vieilles, les idées fixes d'opposants sclérosant les débats.

Jamais la rue, sauf occupation et dictature (sans possibilité de sanction par le vote et sans possibilité de recours judiciaires mis en oeuvrent par les citoyens), n'a eu vocation à se substituer à la procédure législative (motions de censure échouées des frondeurs et de la droite), ni à la procédure administrative et judiciaire (enquêtes en cours quand aux violences policières). Quoi qu'il en soit, l'homme qui a eu les attentats, les casseurs, les manifestations border, les veilleurs d'extrême-droite, la fronde de parlementaires et syndicalistes dans le déni du droit, et les attaques de régimes autoritaires via leur propagande, voire terrorisme... est toujours là. A l'image d'un Blum résistant.

Vive la gauche démocrate, consensuelle, libertaire et régulatrice, une gauche qui revient de loin depuis les abysses d'une histoire des gauches controversée et tourmentée, faite de tabous et de non-dits. Les idéologues culpabilisant le groupe sur son laisser-faire, la montée du FN, le devoir de manifester, etc. et qui interdisent au gouvernement une identité de "gauche" en le dénaturant et en magnifiant une gauche unique qui n'existe pas (contresens historique), sont des imposteurs malhônnetes utilisant des techniques déloyales, à la merci de démons autoritaires et d'abord d'eux-mêmes.

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