Quand on y regarde de bien près, les conspirationnistes sont des champions du complot qu’ils cherchent à masquer. Ils se trahissent via leurs mythes qu’il font passer pour des théories aux allures de dogme. On reconnaît tout le « pathos » historique d’idéologues, pros du camouflage. Des concepteurs de l’extrême pour désinformer, faire renoncer, attaquer la société civile et l’Etat pluriel. Par exemple, les conspirationnistes dénoncent la désinformation DU médias (tout uniforme et indivisible)/pensée unique, alors même qu’ils sont des maîtres de la désinformation (mélanger le vrai dans le faux) et de la pensée uniforme/autre ennemi.
Bien sûr, au-delà des concepts et de l’imaginaire posés, ces théories sont nourries par ceux dont l’oreille s’y retrouve. Des concepts qui « s’enrichissent » via des « adeptes » les banalisant. Un effet sectaire, tout-à-fait logique. Nombreux groupes de l’extrême font notamment appel à de jeunes recrues compétentes en audio/médias/internet/communication. Ils sont alors encensés et narcissisés via une activité dans laquelle ils ont, dans la réalité extérieure, du mal à se réaliser. Tout comme les « intellectuels » créateurs de concepts de l’extrême, d’ailleurs… des intellectuels souvent pas ou mal aimés par leurs « pairs », ce qui les renvoie certainement à leur réel.
Ces mythes ont également pour effet (si ce n’est pour but) de faire appel à la structure névrotique des personnes. Les enfermer dans leurs « symptômes » manifestant un conflit/mal-être/non-dit/Chose cachée enfouie… Dans ces sphères, on y serine LA vérité sur « l’Insider » qui pourrit le monde/Moi de la proie. L’angoisse est décuplée et peut atteindre l’état limite. Des symptômes, signes extérieurs d’un « mystère » (d’une grande banalité et pas graves) qui sont cultivés et utilisés comme une arme pour dominer la proie. A travers les réfractaires s’y opposant, il s’agit alors de décrédibiliser l’idée même du complot apparaissant comme ubuesque.
Quels sont les nids diffusant les mythes conspirationnistes du XXIème siècle? Principalement les groupes d’extrême-droite et des régimes autoritaires, via des médias. Le « grand remplacement », « l'ère décadente islamique », « Eurabia » revêtent aussi l’aspect d’un mythe conspirationniste digne de l’apocalypse. Un déplacement pour traiter un problème « temporel » non résolu ? Un complot aussi : Préparer l’idée d’une guerre de religion (masquant les failles d'un système conservateur) contre des ennemis insoumis et dangereux formant un tout imaginaire fantasmé. A noter qu'en Syrie, l'OEI est responsable de la mort d'environ 10% des civils tués cette année (OSDH).
Une chasse aux sorcières contre les printemps, ceux des hirondelles réclamant des droits civils et politiques… Une vieille recette réchauffée depuis, pour l’époque contemporaine, le XVIIIème siècle ? Une période libertaire de pluralisme des idées en Europe et aux Etats-Unis, d’édification de l’Etat dans sa conception moderne, laïque et démocratique (un exercice difficile) que les forces les plus conservatrices, encore au XXIème siècle, dénaturent en s’appropriant le concept/vocable "République", tout en entachant lourdement l’héritage des Lumières, en organisant des procès à l’histoire, aux intellectuels, puis en instrumentalisant le religieux à des fins politiques.
Pour autant, le rapport à la mère/père, le « religieux » (l’intime) et ses représentations imaginaires, ne peuvent être le monopole d’aucune institution « profane » patriarcale imaginaire. C’est ainsi, y compris dans le monde musulman du XXIème, malgré les tendances monopolistiques de régimes autoritaires prétendant encadrer fermement l’Islam en luttant contre l’islamisme, alors qu’ils ne sont que sa nourriture, son repas divin. L’islamisme radical se sert des régimes autoritaires, comme il est l’arme de la punition/dissuasion politique de ces mêmes régimes.
Une histoire d’amour qui n’est autre que celle du maître et de l’esclave, de l’interdépendance pulsion/objet. Une pensée pour Zemmour, Onfray, les soraliens et autres quenellistes (prolongement imaginaire de ce qu’ils n’ont pas) et pour Monsieur Sarkozy qui a déclaré (le Point) que l’Islam a connu la Renaissance avant le Moyen-âge, faisant ainsi passer les musulmans pour des arriérés en régression, en taisant les turpitudes de régimes amis vis-à-vis des revendications politiques dans le monde arabe. La fugue malhabile d’une personne qui semble oublier l’obscurantisme et la violence ayant régné durant la Renaissance « chrétienne »… un lapsus ?
A force de déballer leurs élucubrations, les porte-paroles des régimes autoritaires aux normes au raz-des-pâquerettes, rivaux certes, mais interdépendants et convergents pour sauvegarder leurs intérêts, lesquels sont soutenus par des acteurs politico-économiques détracteurs des printemps et des libertés civiles/politiques, pourfendeurs de civils, de l’ONU et de l’Etat pluriel, ainsi que leurs sbires pathogènes se déchainant dans les médias, se trahissent. Et les théories mystificatrices les plus farfelues, les groupes les plus radicaux, intégristes et violents montrant les dents au moindre vent libertaire se glissant dans la rue, n’ont jamais réussi à faire taire la pie chanteuse.
Les idées ont des ailes, leur résonnance dépend de leur musicalité et de leurs baisers sans promesse, comme sur un air de Rossini. La Gazza ladra, accusée de tous les maux pour l’empêcher de voler, peut se jouer à Gaza dans un décor de guerre-froide ou à Damas, dans le décor actuel. Il ne s’agit que d’un décor. L’histoire est la même, la scène reste inchangée, les acteurs ont simplement vieilli sans murir. Murir sans vieillir, une qualité que seules les idées issues de l’imaginaire d’Hommes sages et sublimes, possèdent. A l’origine, elles se transmettaient à l’oral, d’une ouïe à l’autre, d’une corde à l’autre.
Aux printemps arabes qui feront l’hirondelle.