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Les handicaps nous isolent trop souvent. C'est une réalité à laquelle je suis moi-même parfois confronté. Certains, qui se considèrent comme "valides", nous perçoivent parfois avec une combinaison de pitié, de condescendance et de peur. Iels voient en nous une possible projection d'un avenir effrayant et préfèrent nous éviter. D'autres pourtant conscientes de leurs handicaps ne sont guère plus bienveillantes. Il est toutefois essentiel de se rappeler que ces observations ne représentent qu'une partie de mes expériences négatives, laissant ainsi la possibilité d'autres perspectives et expériences. J'essaie de mieux comprendre ici l'origine de ces expériences négatives que j'appelle le "syndrome Highlander".
Ce nom vient d’un leitmotiv du film portant ce nom: “il ne peut y en rester qu'un”. J'ai tout d'abord pensé que cela venait du tokenism: la pratique très superficielle pour un groupe de gens d'intégrer une personne issue d'un ensemble sous-représentés afin de donner l'apparence de la diversité ex cette bande de blancs n’est pas raciste il y a un noir dedans. Ainsi ce groupe limite au maximum le nombre de gens issus d'une “même” minorité pour ne pas être assimilé à cette minorité et d’y perdre son identité... Il devient alors difficile de militer ensemble quand on fait partie d'un groupe soi-disant homogène, ce qui entraîne un rejet quasi systématique quand il y a trop de personnes d’un même ensemble par exemple port.eur.euse d’un handicap visible. Mais l'origine de ce syndrome à des je pense des origines encore plus profondes et pernicieuses.
L'internalisation du validisme, c'est-à-dire l'adoption inconsciente des attitudes, des croyances et des stéréotypes négatifs associés au handicap par les personnes handicapées elles-mêmes, peut conduire à une fragmentation supplémentaire au sein de cette minorité déjà diverse. Cette fragmentation se traduit souvent par une classification hiérarchique basée sur la gravité perçue du handicap ou sur des jugements de valeur liés à l'autonomie et à la productivité. Ce phénomène peut engendrer une séparation, une compétition et parfois même un dénigrement entre les personnes handicapées, atténuant la solidarité et la cohésion de groupe nécessaires pour lutter contre les discriminations et le validisme systémique. En promouvant l'idée fausse que certains handicaps sont "moins dignes" ou "moins légitimes" que d'autres, le validisme internalisé renforce les stigmates sociaux et entrave le progrès vers une véritable acceptation et inclusion de toutes les personnes handicapées.
C'est sûrement ce qui m'a motivé à lancer l'Abri. J'ai voulu créer un endroit convivial pour y accueillir une foule de gens divers. L'avantage d’Internet : personne n'a à justifier de son appartenance à une minorité, avec dans le même temps la possibilité d'avoir des salons en mixité choisie où chacun.e peut exposer ses problèmes. L'idée est d'être ensemble pour rendre notre quotidien sur cette terre bien plus agréable à vivre.