Samedi matin. Papa travaille, Maman aimerait bien (écrire le livre qui est dans sa tête), mais s'occupe du petit monde qui occupe les lieux: Grand, 5 ans, Petit, 2 ans et demi et Machin, chien, 2 ans et demi aussi, mais adopté depuis 1 mois donc encore un peu nouveau. N'entendant ni Grand, ni Petit à 6h30, Maman s'offre une grasse mat' jusqu'à un glorieux 7h04 quand Petit se manifeste avec virulence. Ah, l'odeur ne trompe pas, Petit a besoin qu'on lui change sa couche, chouette réveil. Petit se lève, court au pti dej', puis juge que Grand a bien assez dormi comme ça (il est déjà 7h29) et qu'il serait temps de lui allumer la lumière dans la figure avant de sauter sur son lit. Grand, qui dormait, se lève donc d'une humeur de dogue et aboie sur Maman dès l'entrée dans la cuisine. Chic, Maman adore les dogues qui aboient au réveil. Machin, lui, a pris la place de Maman: comme la nature, les petits coins bien chauds ont horreur du vide.
Après le petit déjeuner, Maman prend conscience de la monumentale erreur que représente la grasse mat' jusqu'à 7h04: il faut maintenant aller se doucher, mais Grand, Petit et Machin sont un peu comme la chèvre, le chou et le loup à qui on doit faire traverser une rivière. C'est donc l'heure d'élaborer le PPMS du samedi matin. Les couteaux pointus sont hors de portée, les ciseaux - tous: à bouts ronds, à pâte à modeler, à poulet - sont rangés dans des coffres à clés en hauteur dans des pièces sous alarme (enfin c'est l'idée), Machin est envoyé sur la terrasse parce qu'il est d'humeur joueuse et qu'il a compris, lui aussi, que mes menaces ne valent pas grand-chose - et que donc non, je ne le ramènerai pas au refuge. Maman aussi a ses humeurs de dogues et chacun sait que Maman qui aboie ne mord pas, en tout cas pas un chien. Toutes les portes de l'appart' sont ouvertes, ce qui est toujours plaisant un matin de janvier pour aller se doucher.
Allez, première tentative pour voir si tout va bien: brossage de dents. Inspection du salon: alerte aux craies de couleur sur le carrelage et aux bâtons de colle sur le canapé. PPMS renforcé: ils rejoignent les ciseaux et l'alarme est doublée d'un barbelé électrifié (là encore, c'est l'idée; mais, note pour plus tard, je pourrais aller en faucher à la caserne de para qui est à deux pas). Cette fois, ça devrait suffire. Douche, rapide parce que bon, ça caille avec les portes ouvertes et les bruits qui viennent de la chambre contiguë sont inquiétants. Enfin inquiétants - en réalité, tout parent sait que l'inquiétude suscitée par les bruits est en général moins vive que celle provoquée par le silence.
Alors que tout le monde est maintenant à la sieste et que Maman essaie d'écrire autre chose que son livre parce que ça fera toujours un échauffement intellectuel, elle peut tout de même déclarer fièrement que le PPMS renforcé a été un succès total et que Grand, Petit et Machin ont survécu à sa douche.
