10h30. Je décide de faire un tour sur les réseaux sociaux et d’allumer la radio. Le sujet principal est la grève des examens concernant le refus des enseignants qui corrigent les épreuves du baccalauréat de transmettre leurs notes. Je reste surpris de ce mode d’action mais je comprends : ce moyen d’action est un moyen d’être entendu.
Ce qui me désole, ce sont les commentaires sur les différents articles que je vois défiler dans mon fil d’actualité : « feignasse », « râleurs à la française », « trop payés », « ils sont inutiles », et j’en passe. Je me sens obligé de répondre avec cette phrase : « Arrêtez de dénigrer les enseignants ».
Ce dénigrement, je ne l’admets pas. Je ne suis pas enseignant, je suis étudiant. Je suis passé par l’enseignement primaire puis secondaire, j’ai connu et côtoyé des enseignants du second degré pendant toute ma scolarité et j’ai toujours refusé d’écouter les critiques sur ce beau métier. Un professeur ne travaille pas que 15 ou 18 heures par semaine, il dépasse plutôt les 40 heures. Un enseignant qui décide de ne pas venir surveiller l’épreuve de philosophie ne fait ne fait pas cela par fainéantise, mais pour protester contre une réforme qui s’avère être inquiétante pour les futures générations de lycéens. J’admire ce métier, mais aussi la patience et le dévouement dont font preuve les enseignants.
Je me souviens encore de cet article publié pour Le Monde au titre très explicite : « Enseignant, un métier qui reste peu attractif ». Eh bien, rassurez-vous : le métier attire encore des étudiants qui souhaitent enseigner leur discipline favorite, qui veulent écouter les vœux d’orientation de leurs futurs élèves, et qui désirent les accompagner tout au long de leurs années de lycée jusqu’au baccalauréat. Ce n’est pas un métier facile tous les jours, mais c’est une vocation exercée avec passion et engagement par plus de 400 000 enseignants au quotidien.
Je reste aussi marqué par cette tribune publiée dans le Monde où Thibaut Poirot, professeur agrégé d’histoire au lycée, commentait l’expression de Jean-Michel Blanquer qualifiant les sceptiques de la réforme du lycée de « ventilateurs à angoisse ». Je suis un ventilateur à angoisse, Monsieur Blanquer. Je n’étudie plus en lycée depuis cette année mais je reste encore en contact avec mes anciens professeurs qui me confient leurs doutes et leurs peurs, et cette peur m’atteint. J’ai peur de votre réforme, Monsieur le Ministre. J’ai peur de la disparition des langues anciennes, j’ai peur de la déperdition des enseignements littéraires et artistiques – en particulier dans les départements ruraux ou en marge, comme dans l’Ardèche où j’ai étudié -, j’ai peur de la façon dont les langues vivantes seront enseignées, j’ai peur de l’accroissement des inégalités et de la disparition de l’égalité des chances, cette égalité des chances qui me tient à cœur.
Sachez, Monsieur le Ministre de l’Éducation Nationale, que les étudiants et les lycéens vous font part également de cette inquiétude face à votre réforme.
Aussi, pour donner mon avis sur la rétention des notes du baccalauréat, qui suscite tant de polémiques ces derniers jours et qui m’a poussé à écrire cette tribune, je tiens juste à dire que je comprends le besoin des enseignants de se faire entendre, le besoin d’exprimer le rejet de cette réforme à un gouvernement qui fait la sourde oreille depuis un trop long moment. En tant qu’ancien lycéen, je comprends les élèves et leurs parents qui souhaitent ne plus attendre les résultats du baccalauréat ; je ne suis pas tout à fait satisfait de ce mode d’action, mais je comprends néanmoins le geste des enseignants.
En dépit de cette situation stressante, cessons donc ce dénigrement envers les professeurs qui se battent contre cette réforme afin de promouvoir, sur le long terme, une éducation de qualité et la réussite pour tous. Ne l’oublions pas.