Ces derniers jours sont fait d’horreurs. A tel point que j’en ai l’esprit totalement troublé.
Des images, des histoires plus horribles les unes que les autres, avérées, ce qui multiplie leur force de nuisance.
C’est d’abord l’annonce du lynchage de Darius, jeune homme de 16 ans, Rrom d’origine roumaine, par une bande organisée, armée, qui a choqué mon esprit la semaine dernière. Tout cela à la « cité des poètes », une banlieue de Pierrefitte-sur-Seine dans le 93. Drôles de poètes tout de même…
Puis, dans la semaine, nous apprenons dans ma ville (Poitiers) qu’une jeune femme congolaise, venant d’accoucher à l’hôpital, va se retrouver dehors avec comme seule option d’hébergement, le 115.
Heureusement, la mobilisation de militants politiques et associatifs permet qu’elle soit aujourd’hui, de manière très provisoire, à l’hôtel. Mais quid de demain, après-demain ?
Et surtout dans quelles situations sont les autres, tous les autres sans-papiers, sans-logis ? Ceux qui se lèvent, et dont nous connaissons la détresse, et ceux qui se taisent et dont nous ne savons rien sauf qu’ils sont nombreuses et nombreux.
C’est hier que l’horreur se change en barbarie, avec la diffusion des photos de Darius dont chacun peut constater qu’il a été massacré avec une violence inimaginable. Une violence dessinée sur un corps de jeune homme, sans doute parce qu’il est Rrom, certainement parce qu’il est pauvre. Les deux assemblés font de lui un défouloir idéal. Il aurait volé quelques bijoux (au conditionnel car personne n’en sait rien) et méritait donc ce lynchage. Quand des Tapie et des Cahuzac ont volé des millions sans être véritablement punis.
Des grands voleurs comme Sarkozy ou Juppé, qui pourraient même, demain, être de nouveau à la tête de l’Etat… se voient, eux, portés en sauveurs.
Ayons une pensée pour le voleur d’images, aussi, qu’est la personne ayant eu l’idée lucrative de prendre les photos du corps meurtris pour les vendre à la presse étrangère, cela étant interdit en France. Un dégoût de plus, pour une personne imposant une image à jamais gravée dans ma mémoire.
La barbarie, pour moi, c’est cela. C’est quand les pauvres s’en prennent aux plus pauvres qu’eux et laissent les oligarques s’accaparer 99% des parts du gâteau commun sans broncher. Je ne fais pas ici l’équation trop facile qui consiste à dire que cette agression est la fille du capitalisme et que vaincre le capitalisme stoppera ce genre d’agression. Mais avec l’impunité que dégage ce crime, -dans le climat dans lequel cela se produit -, nous sommes en droit de dénoncer celles et ceux qui jouent sur cette vague du racisme. Les politiques, la droite, Valls, ceux qui soutiennent Valls et qui ne s’y opposent pas, la police qui a un comportement scandaleusement raciste, notamment vis-à-vis des Rroms (on ne sent d’ailleurs pas un entrain particulier de la police pour retrouver les coupables de l’agression).
Cette barbarie pour laquelle tous les gouvernements de droite et de gauche ont préparé le terrain, en expliquant que les Rroms ont vocation à rentrer chez eux. En s’engageant à renvoyer le plus d’étrangers possible du territoire français. En imposant des débats dégueulasses sur l’islam ou encore « l’identité nationale ». En laissant le terrain idéologique à des fous comme Soral et Dieudonné qui en plus de vomir de l’antisémitisme, détestent les Rroms et les homosexuels, ou bien méprisent les femmes.
La barbarie de Le Pen père, Président d’Honneur du parti de Le Pen fille, qui souhaite que « Monseigneur Ebola » règle le problème de l’immigration massive et de la surpopulation, ou qui veut mettre Patrick Bruel (chanteur d’origine juive) et Yannick Noah (juste parce qu’il est noir et opposé au FN) dans des fours… est en train de nous gangrener.
Cette barbarie, que Rosa Luxemburg opposait au socialisme, est en train de gagner du terrain. Les monstres, nommaient par Gramsci, apparaissent vraiment, à l’aube d’une nouvelle histoire humaine qu’il nous faut inventer. Nous ne pouvons pas laisser la barbarie s’imposer, se développer et gagner. Nous ne pouvons pas, non-plus, faire confiance aux fossoyeurs aujourd’hui au pouvoir, qui pleurent de récolter ce qu’ils sèment. C’est à nous, progressistes, personnes de gauche, humanistes, de prendre nos affaires en main et de ne pas laisser faire cette ignominie, de nous battre pour un monde solidaire et fraternel.