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Billet de blog 3 avril 2025

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Il faut sauver le soldat Santé Publique France

Santé Publique France a été créé par une ordonnance du 14 avril 2016. " Créer Santé publique France, c'est investir durablement dans la santé publique et tenter de répondre aux défis grandissants de notre société " disait, à l’époque, le Pr François Bourdillon qui en fut le premier directeur général. Des interrogations planent aujourd’hui sur son avenir !

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Santé Publique France ( SPF) a repris les anciennes missions et compétences dévolues à l’Institut National de Prévention et de veille sanitaire (InVS), à l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), à l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) et au groupement d’intérêt public Addictions Drogues Alcool Info Service (Adalis). L’objectif était de créer un centre de référence et d’excellence sur le modèle des Centers for Disease Control and Prevention des Etats-Unis, du Public Health England ou de l’Institut national de santé publique du Québec souvent cités en exemple.

Heureuse initiative moins de quatre avant l’arrivée du SARS-CoV-2. La nouvelle agence sera mise à rude épreuve par la pandémie alors que les synergies attendues de la fusion n’avaient pas encore porté leurs fruits. L’Agence jouera néanmoins un rôle important dans le suivi épidémiologique, la gestion des stocks stratégiques et les campagnes de vaccination.  Les Français se rappellent encore ses bulletins recensant le nombre d’hospitalisations et de décès.

Une mission flash de l’IGAS

Ainsi que le rapporte divers médias, c’est avec surprise que les personnels de SPF ont appris que Catherine Vautrin, ministre chargé de la santé, des solidarités et des familles et Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, avaient demandé à l’Inspection Générale des Affaires Sociales de « dresser un état des lieux des différentes missions conduites par SPF et des moyens humains, financiers, techniques qui y sont consacrés ». La surprise est d’autant plus grande qu’un contrat d’objectif et de performance venait d’être signé pour la période 2024-2028.

Certes la Cour des Comptes, dans un rapport de décembre 2022, même si les constats étaient globalement positifs (réactivité et souplesse pour répondre à la crise du Covid-19, maitrise de la masse salariale), relevait quelques lacunes comme l’insuffisante priorisation des projets ou le sous-investissement structurel dans les systèmes d’information. Des constats qui auraient dû trouver logiquement réponse dans le contrat d’objectif signé, il y a moins d’un an !

Les risques d’un démantèlement de SPF

Démanteler l’Agence, comme le craignent les personnels de SPF et intégrer certaines de ses missions au ministère de la Santé irait à contrecourant des évolutions qui ont conduit à la création des Agences à la suite de l’affaire du sang contaminé à la fin des années 80.   En ces temps d’incertitudes politiques, nous avons besoin de nous référer à des expertises scientifiques indépendantes. Il suffit de regarder ce qui se passe actuellement outre-Atlantique pour s’en convaincre. Cette indépendance a été quelques fois mal perçue Avenue de Ségur ainsi qu’on l’a vu lors de l’annulation de deux campagnes de prévention sur l’alcool. Il faut espérer que les divergences passées soient étrangères aux investigations en cours !

S’il y a retards, Il est difficile de tous les mettre sur le compte de l’Agence quand on sait qu’elle est sous la tutelle du ministre, qu’elle est liée par un contrat d’objectifs et que pas moins de 11 ministres se sont succédé à la santé depuis la première élection d’Emmanuel Macron !

Quant à la recherche d’économies, il y a sans doute d’autres pistes à creuser. C’est en misant justement sur la prévention et la promotion de la santé qu’on rendra notre système plus efficient.

Gardons nous de jeter le bébé avec l’eau du bain dans un pays où la Santé Publique a du mal à se faire une place dans un système de santé trop axé sur le curatif !! Au contraire, « notre système de santé publique a besoin d’un nouveau souffle pour progresser dans la protection contre les risques, la prévention des maladies, la lutte contre la morbidité, les incapacités et la mortalité prématurée et pour réduire les inégalités sociales et territoriales de santé », écrivait les signataires d’une Tribune dans le Journal Le Monde en 2020[1]. C’est très justement la mission de SPF !

[1] « Notre système de santé publique a besoin d’un nouveau souffle » Le Monde, 3 Septembre 2020- Marie-Caroline Bonnet-Galzy, présidente du conseil d’administration de Santé publique France ; François Bourdillon, ancien directeur général de Santé publique France ; Geneviève Chêne, directrice générale de Santé publique France ; Jean-Claude Desenclos, directeur scientifique à Santé publique France.

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