J’ai fait un tour hier à l’Historial Jeanne d’Arc. C’est toujours un plaisir que de visiter cet historial, de reprendre par le menu le procès en révision de la condamnation à mort de Jeanne d’Arc. Difficile ne pas être charmé par l’histoire de cette jeune femme encore un pied dans l’adolescence au début des faits.
Cette Jeanne, tout le monde peut s’en emparer, tout le monde peut y trouver quelque chose d’inspirant pour soi-même. Icône de la réaction pour certains puisqu’elle se bat pour Dieu, pour le Roi, vantant sa chasteté. Elle sent le souffre du nationalisme exacerbé et de l’ancien régime. Pour d'autres, symbole de la liberté retrouvée face à l’occupant. Dotée d’un esprit de rébellion et d’un fort tempérament, elle impressionne de caractère. Car il en faut pour se persuader et pour convaincre les autres que des « prophéties » se réaliseront par sa personne, pour mener autant d’hommes dans des batailles militaires, pour convaincre de vieux clercs qu’elle n’a jamais « forniqué avec le diable » et qu’elle est légitime à parler au Roi.
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Même l’Église est étrillée par son parcours, faisant de l’institution cléricale un agent de la collaboration avec les Anglais et les Bourguignons. Elle défie l’évêque Cauchon considérant qu’elle n’a pas de compte à lui rendre. Outrage à la hiérarchie ! Les anticléricaux de tous poils peuvent y trouver une inattendue source d’inspiration chez cette pieuse lorraine. L’historial ne s’y trompe pas, retraçant les différentes appropriations et incarnations que les forces politiques ont pu voir en elle. Entre autres exemples, la seconde guerre mondiale et l’occupation ont été l’occasion d’une bataille pour l’enrôler d’un côté ou de l’autre. Ainsi Pétain voyait en elle celle qui a bouté l’Anglais hors des frontières, quand de Gaulle préférait la convoquer contre l’occupation allemande.
Finalement, la cause de son inculpation est d’avoir porté un pantalon d’homme même après l’injonction du tribunal de ne plus le faire. Jugée « relapse », rien que la mort pouvait expier ce crime, on le lui fit bien voir ! On peut penser que ce port du pantalon si insupportable pour ses contemporains, cette liberté vestimentaire affirmée, cette attitude « gender fluid » pourrait attirer quelques féministes et défenseurs de la cause LGBT en renfort de sa cause...
Décidément, tout le monde peut mobiliser Jeanne dans ses combats, et si elle appartient à un peu tout le monde, alors on peut considérer qu’elle n’appartient à personne, faisant simplement partie du patrimoine national.