Les forces de l’ordre ont procédé à plus de 70 arrestations en lien avec des activités terroristes d’extrême droite en France entre 2011 et 2023 (source Statista). Dans un récent bilan, la police européenne souligne que la moitié des projets d’attaques d’extrême droite déjoués dans l’UE en 2022 l’ont été en France (source Europol).
Huit membres d’une cellule terroriste néonazie sont actuellement jugés parce qu'ils projetaient un attentat meurtrier contre une loge maçonnique. Trois sont d’anciens militants du Rassemblement national. Ils disposaient d'armes et vouent une admiration à Hitler.
Le terrorisme d'extrême-droite est celui qui a le plus d'ampleur après le terrorisme islamiste. Les kurdes subissent ainsi leur 3e attentat perpétré par l'ultra-droite en une dizaine d'années. C'est le peuple kurde qui mène la lutte armée contre Daesh en Syrie mais c'est contre eux que les pourfendeurs de l'islam ont décidé de s'acharner.
Cette hausse des violences d'extrême-droite est alarmante et rappelle les prémisses de la prise de pouvoir fasciste dans les années 20 en Italie avec les squadristes et en Allemagne avec les SA: d'abord la rue puis les urnes pour mieux terroriser la rue ensuite.
Et Bruno Retailleau, après deux jours de silence, préfère s'emporter contre « l'ultra-gauche » qui n'a pourtant pas commis d'actes terroristes. Hors-sujet. Imaginons qu'après un attentat islamiste, le ministre de l'Intérieur s'emporte contre les chrétiens et les juifs radicaux en menaçant de fermer leurs églises. Cela ne ferait pas moins sens que ce que vient de faire Retailleau. On l'entend clairement hausser le ton et on voit son visage et son corps se raidir lorsqu'il passe au sujet de « l'ultra-gauche » sans qu'on sache précisément ni à quels événements il fait référence ni de quel mouvement il parle.
Pas un mot pour les victimes. Pas d'emploi du mot "terrorisme" pour une agression collective armée aux cris de "Paris est nazi" alors qu'il l'avait employé contre des militants écologistes pacifistes.
Deux problèmes : l'absence d'identification du problème spécifique du terrorisme d'extrême-droite et la stigmatisation de mouvements de gauche dont il prévoit dans son discours « la dissolution ».
Cette réaction n'est pas une réponse à la barbarie néonazie mais au contraire son prolongement institutionnel. Les uns agressent leurs opposants et leurs épouvantails physiquement dans la rue, les autres les érigent en ennemis d’Etat dans les discours et veulent les rendre illégaux.
On se rappelle d'Hitler, qui a utilisé l'incendie du Reichstag pour accuser un communiste - dont on sait qu'il n'était pas responsable - et envoyer dans des camp de concentration tous les cadres du premier parti d'opposition.
Qui est ciblé par B. Retailleau?
On peut tout imaginer étant donné que ces violences sont fantasmées. Le NPA, puisque c'est le seul parti classé à l'extrême-gauche par le Conseil d'Etat ? Mais ils n'ont commis aucun acte terroriste. LFI, tant la Macronie et les médias ont décidé de le qualifier de mouvement extrémiste jusqu'à parfois demander sa dissolution ? Mais LFI est un parti de gauche classique selon la classification du Conseil d'Etat et n'est lié de près ou de loin à aucun acte terroriste non plus...
Alors qui ? Ce sera à la guise du pouvoir en place, puisque ces accusations ne reposent sur aucune réalité.
Alexandre Guilhem
Auteur de Comment les classes dominantes ont détourné le suffrage universel depuis 1848