جزيرة "باينس" في 4 أبريل 1878
جادجي 5 رقم قرية حتى وقت متأخر وهلال شهر شعبان ظهر الأحمر تقريبا كغير واقعي هنا هو يعكس ذلك من وقت لآخر في السماء الدخان يبدو أنها تريد تفريق الغيوم ضخمة على شكل القنبيط يبدو الإعلان عن اعتزام الزواج يطوفون في موكب دون انقطاع من غروب الشمس أو بالأحرى إلى الفرار أكثر قدر الإمكان من هذا الوادي من المحن والشقاء فيها شقة فتنة بلا كلل الشلال ما زال بعيداً للتعبير عن همسات في سكون الليل كل الجزيرة الشريرة والعدائية الخفافيش أنفسهم مكان في حرارة الصيف رطب أن يتحول يطل الجبال الهائلة والبنى توهج الغابة خشب الصندل فيها قبائل الكانا
ك قطع رأسه تكفل لنا حراس الكلاب تنبح أكثر أنهم يعرفون بالتفصيل سرقة أخف من الطبيعة في الجزيرة أبعد من
(Première page du livret de l’arrière-grand-oncle)
D’emblée on notera que le terme « (les) Pins » a été phonétiquement noté byns باينس
Cela est naturellement erroné, car le mot arabe qui désigne le « Pin » est صنوبر Snuber en rapport à l’île des Pins le lieu du bagne des résistants algériens qui furent relégués durant des décennies en Nouvelle-Calédonie pour avoir pris part à diverses insurrections contre les Français A propos de l’île : C'est le navigateur anglais James Cook qui baptisa en 1774 Isle of Pines (île des pins) ce coin perdu de la Nouvelle-Calédonie cet arbre dont le nom savant est Araucaria columnaris est caractéristique à ces lointaines contrées il présente une forme distinctive qui évoque une colonne d’où son nom tiré de la langue latine
Au Nom de Dieu le Clément le miséricordieux
Seigneur Dieu maître des mondes
C’est toi seul que nous adorons
Et c'est de toi seul que nous implorons le secours
Il n’y a de pouvoir et de force qu’en Dieu : La Ḥawla wa la Quwwata illa Bi Llah
1 L'île des Pins le 4 avril 1878 A Gadji la 5° commune il est si tard et la nouvelle lune du mois de Chaâbane est apparue presque rouge comme irréelle la voilà qui rejaillit de temps à autre dans le ciel charbonneux elle semble vouloir disperser les bans d'énormes nuages en forme de choux-fleurs qui défilent en procession ininterrompue depuis le coucher du soleil ou plutôt qui semblent fuir le plus loin possible de cette vallée des tribulations et de la misère où l'affliction inlassablement plane la cascade au loin continue d'articuler ses chuchotements cristallins contre le roc dans le silence de la nuit Toutes les chauves-souris de l'île malfaisantes et hostiles se sont données rendez-vous dans la chaleur moite de l'été qui vire à l'incandescence La montagne brune et immense surplombe la forêt de santal où les tribus de Canaques coupeurs de tête nous veillent Les chiens des gardes n'aboient plus ils savent dans le moindre détail le plus léger bruissement de la nature dans l’île Au loin par delà le rivage vers la plate-forme de corail une mouette geint comme si elle était mourante Le Ramadan est pour bientôt Nous avons fait la prière nocturne de AI-'Icha collectivement puis chacun de nous a regagné sa case l'âme en peine en pensant aux nôtres à jamais inscrits dans la mémoire de l'exil où nous avons fait mille escales l'esprit sans cesse reclus dans les souvenirs qui nous harcèlent infatigablement comme un essaim de guêpes démentes 2 La page 10 du cahier de l’arrière-grand-oncle qui semble avoir été transcrite à l’aide d’une plume d’oie trempée dans une encre de mauvaise qualité sur du papier grossier disait ceci :
ليلة أخرى فوجئت أو-على البكاء بصمت نصف مطوية ضد الجفون الصور المصفرة القديمة، وكان نصف قرنية حيث تساءل ابتسامة محاطة بجميع أبنائه اشتكى ابدأ الأكبر تزوج جميع مؤخرا أصغر طفل ولدوا بعد ستة أشهر من اعتقال -أو على على أبواب الجزائر العاصمة
Langue source
L’autre soir j'ai surpris le vieux Mohand Ou-Ali sangloter silencieusement les paupières à demi plissées face à la vieille photo jaunie et à demi cornée où il posait le sourire aux lèvres entouré de ses tous ses enfants Lui qui ne s’est jamais plaint L’aîné s'est marié tout récemment Le plus jeune des enfants est né six mois après l’arrestation de Mohand Ou-Ali aux portes d'Alger
L’autre soir j'ai surpris le vieux Mohand Ou-Ali en train de gémir les paupières à demi plissées fouillant des yeux la vieille photo jaunie et à demi cornée où il posait le sourire aux lèvres entouré de ses quatre enfants L’aîné s'est marié tout récemment Le plus jeune des enfants est né six mois après l’arrestation de Mohand Ou-Ali aux portes d'Alger là où Il a été faire parler la poudre Nous vivons entre nous cloîtrés dans une superficie de quelques Lieues sans enceinte sans barrières sans haies Juste quelques arpents de terre nuit et jour gardés à vue par nos invisibles cerbères canaques qui nous guettent armés de lances et de gourdins On les devine paisiblement assis derrière les feuillages régulièrement froissés par le vent qui vagabonde et tournoie jusque dans le fond du ravin où il reste un instant coincé avant de recommencer son manège lugubre par rafales Le règlement qui a été imposé par le Beylik indique que nous ne pouvons écrire qu'à nos proches parents et seulement pour parler des affaires de famille ou de nos intérêts privés Nous avons droit à une correspondance par mois à moins de circonstances exceptionnelles Il nous est interdit de recevoir du secours en nature Les colis qui nous sont adressés contenant des habits sont systématiquement détournés par les gendarmes et les soldats qui les proposent en guise prime à nos gardes canaques C’est ainsi qu'une montre à gousset appartenant à Si Ali Aït Toumert s'est retrouvée suspendue au cou d'un chiourme aborigène Rien de plus normal car nous sommes des bagnards déportés pour des faits à caractère politique Nous ne sommes pas astreints au travail comme les autres condamnés Contrairement aux transportés qui eux sont enchaînés et asservis aux travaux forcés Ils portent des bonnets rouges ou verts selon le groupe auquel ils appartiennent Ceux qui font partie du groupe dit de la «grande fatigue» roulent les grosses pierres Parfois ils portent les lourdes pièces de charpente d’autres fois ils curent les chenaux Alors que les forçats de la «petite fatigue» s’occupent à tresser le crin pour faire des boucles d'oreille ou des bagues où s'enchâsse de la verroterie Ils inhument les cadavres Certains parmi eux font la cuisine Nous élevons des chèvres pour notre propre compte Cela nous procure la viande qui est de ce fait licite religieusement puisque nous égorgeons nous-mêmes ces bêtes Nous avons du lait à volonté avec lequel nous faisons du fromage qui est ensuite vendu aux Français Certains d’entre nous soignent et nourrissent les chevaux des gendarmes et des gardes Ce qui leur permet d'approcher sentimentalement les femmes des soldats D'autres dont des nobles d’origine maraboutique ont été transformés en domestiques des officiers d’une armée qu’ils ont combattus les armes à la main quelques années auparavant D'une manière générale nous jouissons de beaucoup de liberté Sauf que nos gardes prennent toutes leurs précautions pour éviter les évasions et assurer la sécurité et l'ordre comme ils disent En fait la tâche de policier est dévolue aux aborigènes canaques Ils sont prés de 200 à suppléer la maréchaussée qui est la plupart du temps en villégiature dans l'île 3 Les aborigènes vivent à peu prés nus à l'exception d'une espèce de long étui en forme de corne très mince dans lequel ils cachent leur sexe qui donne ainsi l'impression d'être allongé plus qu’il ne faut Leurs femmes se promènent les seins à l'air A leur vue cela nous donne de mauvaises pensées Elles fument la pipe en crachant régulièrement par terre Leur connaissance de l'île fait que l'administration leur confie le soin d'aller à la recherche des évadés qu'ils sont tenus de ramener morts ou vifs Une prime d’encouragement de 10 Francs leur est allouée pour la capture d'un évadé dans l'enceinte du pénitencier qui couvre la superficie de l'île Cette somme est doublée pour une poursuite en mer ou dans la rade de Nouméa Elle est de 50 Francs lorsque l'évadé se trouve au large de l'île On nous a souvent dit que des tribus qui pratiquent le cannibalisme occupaient la partie inaccessible de l'île Malgré cela les tentatives d'évasion sont fréquentes Si-Saïd en est à sa dixième tentative Dés que l'on voit une planche flotter à quelques mètres du rivage on peut être à peu prés sûr que Si-Saïd est agrippé dessus Les gardes qui vont en barque pour le récupérer à quelques coups de rame du rivage le malmènent quelque peu avant de I ‘enfermer durant quelques jours au cachot Aussitôt qu'il est libéré il manigance un autre plan d’évasion Une fois il avait disparu pendant quelques heures du camp Il était revenu tout trempé Il a divagué un peu dans la soirée en nous disant
"أنا متأكد من أنني لم أكن بعيداً عن الساحل الجزائري لكن هو موجه كبيرة جلبت لي مرة أخرى »
Langue source
Les gardes qui vont en barque pour le récupérer à quelques coups de rame du rivage le malmènent un peu avant de I’enfermer durant quelques jours au cachot Aussitôt qu'il est libéré il manigance un autre plan d’évasion Une fois il avait disparu pendant quelques heures du camp Il était revenu tout trempé Il a divagué un peu dans la soirée en nous disant
« J'en suis sûr j’étais pas loin de la côte algérienne mais c’est une grosse vague qui m'a ramené à Kalidoun c’est mon destin qui veut çà » Une autre fois il nous dit avoir rencontré un énorme serpent de mer qui l’avait forcé à revenir dans l’île en jetant sur lui un regard de feu En dehors des cinq oraisons quotidiennes et obligatoires il fait d’abondantes prières qu'il dédie au prophète Jonas afin qu'il soit sauvé un jour des périls de la haute mer