Alice Duran (avatar)

Alice Duran

Journaliste à l'écoute du chant du monde, sombre et grave, parfois lumineux et consolateur pour qui s'attarde face au spectacle généreux de la Beauté sous ses multiples facettes.

Abonné·e de Mediapart

66 Billets

0 Édition

Billet de blog 13 novembre 2024

Alice Duran (avatar)

Alice Duran

Journaliste à l'écoute du chant du monde, sombre et grave, parfois lumineux et consolateur pour qui s'attarde face au spectacle généreux de la Beauté sous ses multiples facettes.

Abonné·e de Mediapart

De la Guerre froide à la guerre verte, les germes du plan Condor

La 37ème édition du Festival du film documentaire d’Amsterdam se tient du 14 au 24 novembre. Réalisé par Anna Recalde Miranda et coproduit par Lardux Films, le long métrage «De la guerre froide à la guerre verte », a été sélectionné dans le cadre de cette compétition internationale. Plongée aux racines du plan Condor.

Alice Duran (avatar)

Alice Duran

Journaliste à l'écoute du chant du monde, sombre et grave, parfois lumineux et consolateur pour qui s'attarde face au spectacle généreux de la Beauté sous ses multiples facettes.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1

     L' opération  Condor, cette alliance secrète de la terreur, initiée par Augusto Pinochet  dès 1973, officialisée en 1975, conduite conjointement par les services secrets des dictatures militaires sévissant au Chili, Brésil,  en Argentine, Bolivie,  Paraguay et  Uruguay, est aujourd’hui largement documentée  s’agissant de  la campagne massive d’assassinats, d’actes de torture et de disparitions orchestrée dans ces  pays d'Amérique du Sud, à l'encontre de centaines de milliers d’opposants politiques et  civils. Notamment grâce à Martin Almada, l'un des prisonniers et victimes de la dictature Stroessner de 1974 à 1977, lequel retourne  au  Paraguay en 1992, et découvre "les archives de la terreur" en 1992 dans un faubourg d'Asuncion. Ce terrorisme d'Etat perpétré avec le soutien tacite des USA,- notamment de l'influent Henry Kissinger -, a connu son apogée de 1976 à 1978, et s’est poursuivi jusqu’en 1981.

Ce que l’on sait moins hors de ce continent, et que consigne minutieusement  le film « De la guerre froide à la guerre verte »,  c’est combien cette multinationale de la répression  s’est également exercée auprès des paysans et militants  écologistes. Combien elle constitua les prémices de l’accaparement des terres en Amérique du Sud. Jetant ainsi les bases d’un modèle d’agrobusiness mondialisé, sans limites, polluant, détruisant  les sols, les nappes phréatiques, les hommes, le vivant.

Pour ne citer que cet exemple, l’Argentine est l’un des cinq plus grands producteurs au monde de soja, (de maïs, tournesol, sorgho, citron). Elle est  aussi l’un des 15 plus grands producteurs au monde de blé, orge et raisin. Et l'un des cinq plus grands producteurs au monde de bœuf.  Le secteur agricole y représente 61 % du total des exportations. Moins de 1 % des propriétaires terriens possèdent 40 % de la terre.

Au Paraguay, plus précisément à la frontière du Brésil, où  96% de la production de soja est aujourd'hui transgénique,  la réalisatrice a , multiplié les recherches afférentes à ce passé récent, remis en lumière  l'Histoire méconnue, parfois enfouie.  Capturant le présent avec sa caméra, la documentariste italo-paraguayenne a  parallèlement convié  le présent, recueilli des témoignages, tant sur les luttes des paysans que sur les massacres dont ils continuent d'être victimes.. Les Paysans dont nombre d'autochtones, sont toujours les ennemis de l'intérieur, à l'instar de ce que vivent leurs pairs dans d' autres pays d'Amérique du Sud ."Le Condor vole toujours", constate Martin Almada. Combattant au long cours, mémoire de la Terreur de ces années noires,  l'avocat / écrivain a quitté ce monde en mars 2024, rejoignant son épouse Celestina, arrêtée en même temps que lui, et morte à 33 ans dans les geôles de Stroessner.

La répression sanglante des opposants à ce système se perpétue dans tous ces pays sud américains. Au nom  de la défense de ce modèle monstrueux et écocide, quelque 2000 écologistes et défenseurs de la terre- syndicalistes, paysans, Amérindiens notamment -  ont continué d’y être assassinés depuis 2012. 

Illustration 2

Déroulant, témoignages et archives à l’appui, la généalogie de ce désastre, l’extirpant du silence complice qui l'entoure, l’auteure, arrière-petite-fille d'un fermier, fondateur du parti socialiste , mène une enquête inédite sur ce modèle économique à la fois capitaliste et féodal, conçu à dessein par les architectes du plan Condor. Le replaçant dans son contexte géopolitique et historique passé et présent, Anna Recalde Miranda,  creuse le sillon de cette violence endémique, exercée en toute impunité par les grands propriétaires terriens, leurs milices, les forces de police.

Les pays importateurs de denrées agricoles en provenance des régions citées, feignent quant à eux d'ignorer le coût réel, humain et environnemental, de ces échanges commerciaux.

 D’une durée d’1 heure 45, ce film documentaire sera projeté le 17 et  18 novembre au Pathé City* , avant que les cinéphiles puissent le voir dans les salles obscures de l’Hexagone le 26 mars 2025.

* https://festival.idfa.nl/en/film/0da6ec00-47ba-4aa3-8d98-778939a8627f/green-is-the-new-red/

trailer : https://festival.idfa.nl/en/film/0da6ec00-47ba-4aa3-8d98-778939a8627f/green-is-the-new-red/#player

(billet actualisé le 20 mars)

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.