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FRANCE - 14 décembre 2023 - Dans une révélation choquante, la France a été mise sous surveillance pour sa pratique généralisée d’institutionnalisation forcée de personnes handicapées. Environ 400 000 adultes et 100 000 enfants handicapés sont placés dans des institutions médico-sociales, souvent privés de leur autonomie et de leur capacité juridique. Cette situation soulève des questions éthiques et juridiques graves, en particulier en ce qui concerne la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées et constitue des violations flagrantes des articles 12, 14 et 19 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l'ONU.
Le Contexte Français
En France, les chiffres révèlent une réalité troublante : près de 700 000 personnes handicapées, comprenant des individus autistes, ceux avec un handicap visuel, mental ou polyhandicap, sont placées sous tutelle ou curatelle. Cette mesure, bien que présentée comme une protection, se traduit souvent par une privation de leurs droits fondamentaux et de leur liberté.
Violation de l'Article 12 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l'ONU
La situation en France contrevient directement à l'article 12 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l'ONU, qui stipule la reconnaissance de la capacité juridique des personnes handicapées dans des conditions d’égalité. Cette capacité englobe non seulement le droit d'être titulaire de droits, mais aussi la faculté d'agir conformément à la loi. Or, en France, les personnes sous tutelle ou curatelle se retrouvent souvent privées de ces droits essentiels et exposées à la maltraitance et au risque d’être placées en institution.
Les conséquences de l'Institutionnalisation Forcée
L'institutionnalisation forcée entraîne des conséquences dévastatrices pour les personnes handicapées. Elle les expose à un risque accru de maltraitance et les prive de leur capacité à prendre des décisions concernant leur propre vie. Cette pratique, loin d'offrir une protection, perpétue un cycle de dépendance et de marginalisation.
La Cruauté de la Pratique
Cette pratique peut être considérée comme cruelle et barbare en raison de son impact profond sur la dignité et l'autonomie des personnes. Elle reflète une vision dépassée et paternaliste du handicap, ignorant la capacité des personnes handicapées à participer pleinement à la société.
Un exemple de l'institutionnalisation forcée
D'après le rapport de Francedisability publié sur le site du Haut-Commissariat des Droits de l’Homme des Nations Unies "Le cas de Tom (nom changé), adulte autiste, est un exemple typique de pratiques de mauvais traitements s'apparentant à de la torture, suite à la détention d'adultes autistes sous tutelle en milieu résidentiel en France. À partir de cette situation typique, on peut observer les processus d’acceptation et de dissimulation de ces maltraitances dans la société française.
Tom, diagnostiqué autiste modéré, a été placé, l'année de sa majorité (2017) sous la tutelle d'un organisme de tutelle professionnelle GRIM (de son vrai nom, situé 317 rue Garibaldi, 69007 Lyon), par le Tribunal, à la suite d'une prétendue expertise psychiatrique établissant son « manque de discernement ». Comme cela arrive souvent dans ces cas, Tom n'était ni présent ni représenté devant le tribunal.
Le placement sous tutelle est incontournable en France à partir du moment où la « normalité » de l'individu est remise en cause. Le nombre exact de personnes sous tutelle est inconnu, mais il y a de bonnes raisons de penser qu'il dépasse le million.
Le tuteur, qui n'a rencontré Tom que deux fois, profitant d'une « orientation » décidée par la MDPH (Maison Départementale pour les Personnes Handicapées), le place dans un établissement ségrégué pour une trentaine d'adultes autistes (MAS Michel Chapuis situé à proximité Lyon) depuis novembre 2018. Cette décision s'effectue sans demander l'accord de Tom, qui a vécu jusqu'à l'âge de 18 ans dans sa famille maternelle, a fait sa scolarité à l'école ordinaire, lisait, jouait du piano, faisait du sport. Mais c'était avant.
Comme il n'était pas d'accord avec ce placement forcé, un traitement neuroleptique lourd et toujours croissant (comprenant actuellement 9 médicaments) lui est administré, contribuant à son « acceptation » de la détention. Hormis quelques activités très peu nombreuses et strictement encadrées, il n'a aucune possibilité de sortir autrement qu'un week-end sur deux chez son père. Les sorties avec sa famille maternelle, ou avec des amis de longue date, sont interdites par la tutelle.
Les contraintes de la vie de l'institution réduisent encore davantage la liberté et les choix de Tom, notamment :
– chambre fermée à clé la nuit avec une salle de bain fermée à clé en permanence, sauf le temps des toilettes, sous surveillance ; cela peut obliger Tom à faire ses besoins sur le sol de sa chambre ;
– des vêtements enfermés dans un placard, sans libre accès à ceux-ci ;
– privation de la majorité de ses biens, de son iPad – du soutien de son quotidien occupation - disparaît à jamais et son lecteur CD est également régulièrement confisqué ; ce sont apparemment des privations matérielles mineures qui conduisent à une plus grande frustration car il y a des choix ultimes qu'il s'attendrait à avoir.
Fin juillet 2019, alors que Tom proteste contre la situation par des comportements perturbateurs, il est envoyé pour un séjour d'un peu plus d'une semaine dans un hôpital psychiatrique dans un service strictement fermé.
À trois reprises, en novembre et décembre 2019, puis en janvier 2020, (amis et proches, lors de visites dûment programmées, découvrent qu'il est enfermé dans une petite pièce sombre appelée « salle de répit », sous prétexte de « mauvais comportement". Il a pu être observé à travers une ouverture en verre, se cognant la tête contre la porte, ou urinant par terre en signe de protestation. Cela conduit finalement à un nouvel internement en janvier 2020 à l'hôpital psychiatrique, pour un séjour de plus de trois semaines. Le nombre de médicaments se multiplie et les effets secondaires (mauvais sommeil, transit problématique, apathie pour ne citer que ceux-là) influencent davantage l'apparition de comportements perturbateurs. Il est de plus en plus soumis à des contraintes, tant chimiques que mécaniques.
Toutes les tentatives de sa mère pour mettre fin à la détention ont échoué car en l'absence d'un cadre clair de placement en soins, aucune procédure judiciaire n'est possible. Les plaintes auprès du procureur sont refusées car seul le tuteur est autorisé à représenter légalement la « personne protégée » : le tuteur de Tom, GRIM, a refusé de répondre à toutes les communications à ce sujet.
Une vidéo choquante montrant un homme autiste dans la cour du même foyer où Tom est détenu, pieds nus, mangeant une écorce d'arbre jusqu'à saigner de la bouche, a été enregistrée par un passant occasionnel et diffusée sur Facebook. On entend les réponses de la police et des secours appelés par l'homme pour demander de l'aide : se rendant compte que l'homme qui mange l'écorce est autiste, ils refusent de venir et plaisantent même. L'individu qui a publié la vidéo en ligne a été menacé par la direction de l'association Fondation OVE qui gère le foyer et a été obligé de la supprimer. Les parents de l'homme autiste, informés de cet incident, ne se sont pas plaints de mauvais traitements, à notre connaissance." (1)
L'acceptation de mauvais traitements
En France, il existe une acceptation tacite du placement forcé des personnes handicapées dans des établissements spécialisés. Cette situation est souvent perçue comme une solution pour les familles, les déchargeant de l'effort d'inclusion et d'adaptation à la différence. Cette approche, où le bien-être et les droits sont perçus comme des avantages matériels, mène à une certaine passivité et à l'illusion que les besoins des personnes handicapées sont pris en charge de manière adéquate grâce à ces établissements, financés par l'État.
Il est important de noter que ces établissements, souvent gérés par des associations fondées après la Seconde Guerre mondiale, génèrent d'importants profits privés. Ces lieux restent largement inconnus du grand public, et les cas de mauvais traitements ou d'abus y sont rarement médiatisés, ce qui contraste avec l'image de la France en tant que "pays des droits de l'homme".
Les familles cherchent désespérément une place pour leurs enfants handicapés, mais une fois trouvée, elles évitent souvent de critiquer ou de connaître la réalité de ces établissements. Ces centres, souvent isolés et à l'abri des regards, peuvent devenir des lieux où des traitements inhumains et des mesures d'isolement sont pratiqués. Un langage euphémistique est souvent utilisé pour décrire ces pratiques.
Ceux qui sont témoins de ces abus hésitent à témoigner, de peur d'aggraver la situation ou de limiter leur accès aux résidents. Le système juridique actuel renforce cette situation, avec des poursuites pour diffamation utilisées contre ceux qui cherchent à dénoncer ces abus.
Environ 8 000 Français sont envoyés dans des établissements en Belgique francophone, faute de places suffisantes en France. Les organisations de défense des droits des personnes handicapées se concentrent souvent plus sur l'obtention de financements que sur la lutte contre les lobbies institutionnels, ce qui mène à une impasse d'inaction.
Les mesures de prévention nécessaires comprennent une mise à jour du concept de "consentement" dans le cadre juridique français et la reconnaissance des établissements pour personnes handicapées comme des lieux de détention nécessitant une surveillance indépendante. De plus, l'absence d'une législation claire sur les droits civils des personnes handicapées en France est un problème majeur. Il faudrait donc créer un cadre juridique pour empêcher la détention arbitraire forcée des personnes handicapées.
Enfin, l'invisibilité du handicap reste un défi de taille en France, exacerbé par la ségrégation persistante. Mettre fin à cette ségrégation est donc un objectif crucial.
Conclusion
L'institutionnalisation forcée des personnes handicapées en France n'est pas seulement un problème de santé ou de services sociaux ; c'est une question de droits humains fondamentaux. Pour respecter pleinement les engagements internationaux et promouvoir une société inclusive, la France doit repenser son approche envers les personnes handicapées, en mettant fin à la pratique inhumaine de l'institutionnalisation forcée et en promouvant des alternatives qui respectent la dignité et l'autonomie de chaque individu, inspirés par des exemples comme le Royaume-Uni et la Suède qui sont tous les deux passés d’un système de prise en charge médicale en institution à un modèle de vie autonome et d’inclusion dans la société il y a plus de 40 ans, pour respecter ses engagements envers les droits fondamentaux des personnes handicapées. Le plus gros obstacle au changement de modèle en France est l'article 1er de la loi du 11 février 2005 comme expliqué par le Comité des droits des personnes handicapées de l'ONU.
"9. Le Comité note avec préoccupation que :
- a) L’article premier de la loi no 2005-102 et l’article L.146-1 du Code de l’action sociale et des familles assimilent les associations de prestataires et de gestionnaires de services aux organisations de personnes handicapées, ce qui complique le passage effectif d’un système de prise en charge médicale en institution à un modèle de vie autonome et d’inclusion dans la société ;" (2)
Je rappelle également la recommendation du Comité des droits des personnes handicapées de l’ONU : « Le Comité rappelle son observation générale no. 7 (2018) et recommande à l’État partie :
- a) De réviser l’article premier de la loi no. 2005-102 afin de mettre en place des mécanismes transparents permettant de consulter étroitement les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, et de les faire participer activement aux processus décisionnels publics à tous les niveaux, notamment en ce qui concerne la réalisation et le suivi des objectifs de développement durable et l’établissement des rapports à ce sujet, et de renforcer les mécanismes existants ; »
Bien que le sujet de l'institutionnalisation forcée soit complexe, il est crucial de reconnaître la diversité des opinions entourant cette question. Certains soutiennent que dans les cas de handicap lourd, des prises en charge institutionnelles peuvent être nécessaires pour garantir la sécurité et le bien-être des individus, en particulier lorsque les options de prises en charge au sein de la communauté peuvent être limitées. Cependant, il est essentiel de souligner que de telles prises en charge institutionnelles ne devraient être envisagées qu'avec le consentement éclairé et volontaire des personnes concernées, même en cas de handicap lourd. C'est une question de traiter les personnes handicapées avec dignité et respect. Comme tout le monde les personnes en situation de handicap quelque soit leur niveau du handicap méritent d'être traitées avec dignité et respect !
De plus, une approche alternative aux régimes de prise de décision substitutive telles que la tutelle et la curatelle gagne en reconnaissance parmi les défenseurs des droits des personnes handicapées : la mise en place de systèmes de prise de décision accompagnée. L'idée que les personnes en situation de handicap lourd ne devraient jamais être placées sous tutelle gagne en importance. Au lieu de cela, elles devraient avoir accès à des mécanismes de prise de décision accompagnée adaptés à leurs besoins spécifiques. Ces systèmes permettent aux individus de participer aux décisions concernant leur prises en charge, leurs conditions de vie et d'autres aspects de leur vie, même lorsqu'ils sont confrontés à des défis importants.
En reconnaissant l'importance du consentement éclairé et en promouvant la prise de décision accompagnée, nous pouvons trouver un équilibre entre garantir la sécurité des personnes en situation de handicap lourd et respecter leurs droits et leur autonomie.
Si vous souhaitez soutenir les droits des personnes handicapées et plaider en faveur du changement, il existe plusieurs façons de vous impliquer. Vous pouvez envisager de faire du bénévolat auprès d'organismes travaillant sur les droits des personnes handicapées qui luttent contre le validisme y compris les luttes contre l'institutionnalisation forcée tels que l'association CLE Autistes, de participer à des campagnes de sensibilisation ou de contacter votre député pour exprimer vos préoccupations. De plus, vous informer, ainsi que les autres, sur les droits des personnes handicapées est une étape cruciale dans la création d'une société plus juste et plus inclusive.
Clarification d'Intention
Je tiens à préciser que l'objectif principal de cet article n'est pas de nuire à la réputation de la Fondation OVE, à GRIM ni aux associations gestionnaires d'institutions médico-sociales dans son ensemble, mais plutôt de contribuer à un débat public important sur les pratiques d'institutionnalisation forcée et les conflits d'intérêts potentiels dans le secteur médico-social. Ce texte vise à encourager la réflexion et la discussion sur ces questions cruciales dans un cadre d'intérêt général, tout en respectant la loi et les droits des entités mentionnées. Je base mes observations sur des rapports officiels et des données vérifiables dans le cadre du droit international, et mon intention est d'offrir une analyse équilibrée et factuelle. Cet article n'est pas une cible spécifique contre la Fondation OVE et GRIM, mais un appel à une meilleure compréhension et éventuellement à des réformes dans la manière dont nous abordons les droits et le traitement des personnes handicapées en France. Je suis pleinement ouvert au dialogue et à la rectification de toute information qui pourrait s'avérer inexacte, et j'espère que cette contribution sera perçue comme un pas vers une société plus inclusive et transparente.
Sources :
(1) https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Issues/Torture/Call/NGOs/Francedisability.pdf
(2) Nations Unies CRPD/C/FRA/CO/1
Convention relative aux droits des personnes handicapées
Comité des droits des personnes handicapées
Observations finales concernant le rapport initial de la France*