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Billet de blog 2 mai 2016

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Les accros du pouvoir (théorème pré-électoral)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Un postulat est une vérité intuitive que le bon sens invite à ne pas perdre de temps à démontrer. Il devra l’être un jour pour convaincre les sceptiques.

Un axiome est une vérité évidente, qui se doit d’être admise sans démonstration.

Avec le temps, certains postulats sont élevés au rang d’axiomes. Par exemple,  « les hommes naissent libres et égaux en droit » fut au début un postulat contesté par beaucoup. Aujourd’hui, c’est un axiome. C’est ça, la civilisation.

Un théorème, par contre, est une proposition qui peut se démontrer.  En voici un exemple.

Avez vous déjà connu,  sous l’emprise de substances chimiques, des moments d’énergie débordante ? Des moments où vous avez dit  ou fait des choses que vous n’auriez jamais dites ou faites en temps normal ?

Si la réponse est oui, alors vous savez ce que ressent l’animal de pouvoir. Capable d’enchaîner vingt quatre heures sur vingt quatre et sept jour sur sept des activités liturgiques abominablement répétitives et d’autres qui exigent toute l’attention nécessaire à des décisions subtiles, l’animal de pouvoir avance comme un somnambule dans un univers où les autres ne comptent plus.

Oh, je n’insinue pas que tous les dirigeants prennent des psychotropes. Je fais juste l’hypothèse qu’ils sont dans le même état physique et psychique que celui que procure l’usage de stupéfiants ; autrement dit, par un apport externe, par sécrétions internes -- par les deux, pourquoi pas  -- : ils sont drogués. Les formules convenues – « le pouvoir dope », « la puissance, l’argent, les responsabilités dopent » -- sont ici à prendre au pied de la lettre.

Mais le plus important est que cette suractivité n’est pas là par hasard. Elle n’est pas subie, ni vécue comme un mal nécessaire, une pénitence liée à la fonction. Elle est construite ; entretenue, aggravée, par ceux là mêmes qu’elle affecte, qui s’y exercent comme des athlètes tout au long de leur parcours ascensionnel. Nous sommes élevés dans la croyance qu’il faut y exceller pour réussir. Les plus conformes à ce moule se l’approprient, pour distancer les autres, plus réticents, ou moins doués.

Vous allez m’objecter que cette mécanique, pour imparfaite qu’elle soit, fait tous les jours la preuve de son efficacité à sélectionner les plus solides, donc les plus fiables, les gagnants les plus aptes à se battre pour la collectivité ? Comment le savez vous ? Qui vous l’a démontré ? Avez-vous pu le vérifier par vous même ? Par une longue et savante comparaison avec un autre type d’organisation collective ?

Et comment l’écririez vous, votre démonstration ? « Le système qui consiste à multiplier les obstacles, accumuler les rituels abrutissants et sélectionner pour chefs les plus résistants est efficace PARCE QUE on constate que ce système est performant sous la conduite de ces mêmes chefs » ?

Parfait. Alors  maintenant dites moi : pour quels objectifs - et à quels yeux - ce système marche-t-il si bien ?

Vous voyez bien qu’il y a un problème. Essayez d’inverser la formule.  « p » implique « q », et « non-q » implique « non-p » ; ce qui -- p étant ici le contraire de ce qu’il prétend être -- s’écrit finalement : « Si on juge que la communauté est inapte à régler les problèmes importants ALORS il faut cesser de baser la sélection des dirigeants sur leur capacité à arriver en tête de cet abrutissant parcours d’obstacles. »

CQPC, ce qu’on peut compléter par cet amusant postulat : « Il existe beaucoup de présidents, directeurs, députés, professeurs, officiers, et dirigeants de qualités diverses, et beaucoup puissance beaucoup de sans grades qui en auraient fait de bien meilleurs s’ils n’avaient été brisés par le système ou ne s’étaient exclus volontairement de la compétition. »

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