Amal Bentounsi
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Billet de blog 1 mai 2022

Amal Bentounsi
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L’impunité policière est un permis de tuer. Il est urgent d’y mettre fin

Le syndicat Alliance appelle à un rassemblement ce lundi 2 mai, en soutien au policier meurtrier du Pont-Neuf. Une contre-manifestation — à la Fontaine Saint-Michel, ce jour-là — est une nécessité absolue, estiment Amal Bentounsi, et les collectifs Vérité pour Souheil, Jessica Lefevre pour Justice pour Amadou Koumé, Justice pour Lahoucine Ait omghar, Justice pour Abdoulaye Camara et Justice pour Olivio Gomes. Rendez-vous lundi 2 mai à 12h00 à la fontaine Saint-Michel à Paris.

Amal Bentounsi
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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dans la nuit du 24 au 25 avril 2022, un policier a abattu sur le Pont-Neuf à Paris deux hommes et en a blessé un troisième. Pour justifier l’usage mortel de son arme, un fusil d’assaut HK G36, l’agent tireur a invoqué la légitime défense. D’après son récit, le conducteur aurait tenté de se soustraire au contrôle policier et aurait foncé vers l’un des fonctionnaires. Cette ligne de défense, nous l’avons entendue des dizaines, des centaines de fois. Le problème c’est qu’elle est souvent invérifiable et/ou mise à mal par les enquêtes, qu’elles soient menées par nos associations, des médias, ou la justice. Ce fut récemment le cas à Aulnay-sous-bois, où un homme d’une trentaine d’années au volant d’une camionnette a été abattu par des policiers dans des circonstances analogues.
Dans l’affaire du Pont-Neuf, après 48 heures de garde à vue, la justice a décidé de mettre en examen le policier-tireur pour « homicide volontaire », c’est-à-dire pour meurtre. À ce stade, elle n’a pas retenu la légitime défense. Cette décision a, sans surprise, entraîné une vague d’indignation chez les policiers, à commencer par le syndicat Alliance, que l’on sait lié à l’extrême-droite. Un de leurs objectifs assumés est de faire pression sur la justice et d’entraver son travail afin de préserver le système d’impunité dont ils bénéficient. Ces pressions ne sont pas nouvelles, elles ont toujours, mais sous des formes différentes, émaillé les procédures judiciaires ouvertes contre des policiers. Ces dernières années, elles se sont aussi exprimées dans la rue, lors de manifestations pro-police à l’instar de celle organisée par l’extrême-droite le 19 mai 2021. Rappelons qu’à l’exception notable de Mélenchon et de la FI qui ont condamné ce rassemblement factieux, les chefs de tous les partis parlementaires y ont participé et qu’une certaine gauche s’y est même invitée.
Ce qui s’est passé dans la nuit du 24 au 25 avril dans la foulée de la défaite de Le Pen face à Macron est évidemment très grave et n’est possible que par la surenchère politique quasi consensuelle en faveur d’une police, toujours plus violente, toujours plus armée, toujours plus puissante, et largement d’extrême-droite ainsi que le montrent les sondages. Que dans cette nouvelle affaire, la justice en ait hélas rabattu n’est pas dû à une erreur d’appréciation de l’acte commis par le policier sur le Pont-Neuf. Cela s’explique par le soutien à la Police par l’ensemble des partis ou à tout le moins au consentement à l’impunité policière. L’extrême-droite a beau ne pas être formellement au pouvoir, c’est sa ligne politique qui grignote du terrain dans l’Etat et influence les législateurs. Les progrès du RN et de ses satellites s’expliquent d’ailleurs aussi par ce consensus.
De fait, une loi votée à la fin du quinquennat Hollande (la loi 2017-258 du 28 février 2017 sur l’usage des armes) est une concession majeure et partant gravissime à la revendication du syndicat Alliance d’une « présomption de légitime défense », c’est-à-dire un quasi permis de tuer. En effet, à lire le texte de loi, on ne peut être que saisi d’effroi. Il est suffisamment vague quant aux justifications d’usage de leur arme par les policiers que l’on peut affirmer qu’il accède par avance à la revendication des policiers factieux lorsque ceux-ci s’écrient, lors du rassemblement du 19 mai 2021, « le problème de la police, c’est la justice ».

Cette concession est une régression majeure pour les libertés publiques et démocratiques. Elle précarise encore plus la vie même de ceux que la police a pour ennemis dans les « territoires perdus de la République » ainsi que l’énonce le consensus raciste. Elle encourage par ailleurs la Police à réclamer davantage encore de « lois » en sa faveur.
Le syndicat Alliance ne s’y est pas trompé. Non content de cracher sur la justice et sur ce qui reste de l’État de droit, il appelle à un rassemblement ce lundi 2 mai 2022, Place Saint-Michel, en soutien au policier meurtrier du Pont-Neuf et, au-delà, à tous les autres.

Répliquer, faire face à ce rassemblement ignoble qui est un énième crachat sur les victimes de crimes policiers et une remise en cause gravissime de la justice et de l'État de droit est une nécessité absolue.
Nous comptons évidemment, et en premier lieu, sur toutes les familles de victimes et toutes les organisations de l’immigration et des quartiers populaires pour faire bloc. Nous comptons au-delà sur toutes les forces politiques, syndicales, associatives éprises de justice et de liberté pour s’associer à notre appel contre l’impunité policière, pour l’indépendance de la justice et l’affirmation de l’Etat de droit dans un pays où aujourd’hui, la police fait de plus en plus sa loi sans rendre de comptes à qui que ce soit. Il va sans dire que dans ce contexte particulier, nous comptons aussi sur la France Insoumise qui, contrairement à la plupart des partis de gauche, ne s’est pas commis avec ces policiers factieux.
Il est impensable que le rassemblement policier fascisant du 2 mai 2022 demeure sans réaction.
Rendez-vous pour une contre manifestation lundi 2 mai à 12h00 à la fontaine Saint-Michel à Paris.

Amal Bentounsi, Vérité pour Souheil, Jessica Lefevre pour Justice pour Amadou Koumé, Justice pour Lahoucine Ait omghar, Justice pour Abdoulaye Camara, Justice pour Olivio Gomes.

Adresse e-mail pour d’autres signatures : Nonaupermisdetuer@hotmail.com

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