Cette nomination, empreinte d’un parcours professionnel nébuleux et de connivences politiques litigieuses, suscite des questionnements quant à l’intégrité et à la légitimité du pouvoir en place.
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Un parcours professionnel opaque
Persis Essono Ondo, érigé en banquier d’affaires aguerri, voit son curriculum vitae ébranlé par des interrogations persistantes. Ses affiliations supposées avec Natixis Capital Equity et Nexus Capital Market, des entités introuvables dans les registres officiels, suscitent une méfiance palpable quant à l’authenticité de son expertise. Sa propre banque d’affaires, Racine Investment Bank, aligne un capital social insignifiant, dérogeant aux normes exigées pour administrer un fonds souverain de 1,5 milliard de dollars. En effet, Racine Investment Bank, établie à Londres, ne détient que 100 livres sterling d’actifs nets (environ 120 euros), selon les archives britanniques. Une filiale ivoirienne, inaugurée en 2024, ne démontre guère d’activité notable, avec un capital dérisoire de 10 millions de FCFA (approximativement 15 320 euros).
Ces éléments dissonants s’opposent radicalement à l’aura d’un banquier d’affaires émérite, apte à diriger une institution aussi névralgique que le FGIS. Par ailleurs, les contradictions flagrantes dans son parcours, notamment son prétendu passage chez Nexus Capital Market, une société inexistante au Luxembourg, et chez Natixis Capital Equity, une entité introuvable en France, entachent irrémédiablement sa crédibilité professionnelle. Ces incertitudes entourant son expérience alimentent des interrogations légitimes sur les motivations sous-jacentes à sa nomination. S’agit-il d’un choix méritocratique, ou d’une manœuvre politique visant à gratifier un allié du régime ?
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Des liens politiques controversés
Ancien affidé de l’opposant politique gabonais et candidat à la présidentielle de 2016, Jean Ping, ainsi que membre du parti Réagir, Essono Ondo a été évincé pour contrefaçon de documents et usage de faux. Sa désignation à la tête du FGIS est intervenue grâce à François Ndong Obiang, Premier Vice-Président de l’Assemblée Nationale du Gabon, accusé d’avoir manœuvré un sceau apocryphe estampillé « Réagir » pour faciliter cette nomination. Cette manigance, symptomatique des pratiques obscures qui perdurent au sein du régime, suscite des interrogations sur la légitimité de cette désignation.
Essono Ondo a également joué un rôle prépondérant dans la campagne pour le « oui » au référendum constitutionnel du 16 novembre 2024, appuyant ainsi le régime militaire mené par Brice Clotaire Oligui Nguema. Toutefois, son parcours politique est loin d’être exempt de reproches. Radié du parti Réagir en novembre 2024 pour falsification de documents et usage de faux, ces allégations, corroborées par une décision judiciaire, mettent en exergue un déficit d’éthique et de probité, des vertus pourtant cardinales pour piloter une institution telle que le FGIS.
Par ailleurs, ses connivences avec le clan Bongo, qui l’a soutenu pécuniairement pendant des années, alimentent la polémique. Essono Ondo a été hébergé et assisté par des membres de la famille Bongo, notamment Félix Bongo et Natacha Bongo, qui l’ont épaulé pour s’établir en Côte d’Ivoire. Ces affinités étroites avec l’ancien régime, conjuguées à son exclusion récente du parti Réagir, soulèvent des doutes quant à sa capacité à administrer le FGIS avec impartialité et transparence.
Un FGIS en quête de crédibilité
Le FGIS, entaché par des scandales financiers et une gouvernance nébuleuse sous ses précédents dirigeants, peine à redorer son blason. La désignation d’Essono Ondo, perçue comme une réminiscence des pratiques népotiques, menace de saper les velléités de transparence proclamées par le régime de transition.
Les Gabonais, en quête de réalisations palpables, se méfient des assurances évanescentes. Depuis son avènement en 2012, le FGIS a été éclaboussé par une litanie de scandales, incluant des détournements de fonds, des investissements hasardeux et une administration opaque. Sous l’égide de Serge Thierry Mickoto, beau-frère d’Ali Bongo, le FGIS a dilapidé plus de 100 milliards de FCFA dans des projets infructueux, sans jamais se plier à une reddition de comptes. Son successeur, Akim Daouda, proche de Noureddine Bongo, n’a guère fait mieux, léguant une institution en déliquescence. La nomination d’Essono Ondo, en dépit des promesses de réforme du CTRI, semble s’inscrire dans la lignée de ces dérives.
Les Gabonais, éreintés par des décennies de gestion calamiteuse, aspirent à des résultats tangibles et à une intégrité absolue. Toutefois, la désignation d’un profil aussi controversé risque d’anéantir les efforts de réforme et d’exacerber la défiance des citoyens envers le régime.
Un enjeu majeur pour l’économie gabonaise
Détenteur d’un portefeuille avoisinant 1,5 milliard de dollars, le FGIS constitue un pilier cardinal de l’économie gabonaise. Sa gouvernance influe de manière prépondérante sur des secteurs névralgiques tels que les infrastructures, la santé et l’éducation. Confier cette institution à un profil aussi litigieux pourrait exacerber les fragilités d’une économie déjà aux prises avec des défis structurels majeurs. Le FGIS endosse un rôle prééminent dans le développement économique du Gabon, en injectant des capitaux dans des projets stratégiques, à l’instar des centrales hydroélectriques, des infrastructures sanitaires et des PME.
Néanmoins, une gestion opacifiée et une succession de scandales financiers ont entaché son crédit, amoindrissant sa capacité à séduire les investisseurs étrangers. La désignation d’Essono Ondo, marquée par un parcours équivoque et des affiliations politiques controversées, risque d’aggraver cette situation précaire. Les investisseurs, déjà circonspects, pourraient se détourner davantage du Gabon, accentuant la vulnérabilité d’une économie déjà chancelante. Par ailleurs, les conflits d’intérêts latents, liés à sa banque d’affaires Racine Investment Bank, pourraient entacher la gestion limpide des fonds publics. Les Gabonais, en quête de résultats palpables, risquent de se retrouver une fois de plus désillusionnés par une institution censée incarner l’intérêt général.
Ceux qui prétendent que Persis Lionel Essono Ondo sera évalué à l’aune de ses résultats se méprennent. En effet, si le point de départ est déjà entaché de suspicions, avec un parcours professionnel nébuleux et des connivences politiques discutables, il est fort à parier que cette nomination s’achève en fiasco, alimentant davantage le scepticisme des Gabonais à l’égard des institutions.
Par @DworaczekBendom