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Billet de blog 10 avril 2025

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Présidentielle 2025 au Gabon : Gninga Zenaba, mirages et chimères

Derrière les ambitions présidentielles de Gninga Zenaba se dissimule une candidature creuse, où l'indigence programmatique le dispute à un opportunisme politique à peine voilé.

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Gabon – Présidentielle 2025 – Madame Gninga Chaning Zenaba, candidate indépendante à l’élection présidentielle du 12 avril.

La quintessence de l'opportunisme politique

Derrière le vernis séduisant d'une candidature féminine se cache une vérité implacable : Gninga Chaning Zenaba incarne l'archétype même de l'opportunisme électoral. Née en 1988 à Mayumba et issue d'une filiation sénégalo-gabonaise, cette prétendue entrepreneur aguerrie aspire ostensiblement à diriger un pays dont elle semble méconnaître les rouages fondamentaux.

Son parcours professionnel, loin d'être le parangon de réussite qu'elle dépeint, s'avère être un tissu d'ambiguïtés. Sa société française, Vitrerie Miroiterie Siliquini, s'est volatilisée du registre du commerce fin 2020, tandis que ses sept entreprises gabonaises demeurent aussi insaisissables que des spectres, dépourvues de noms, d'adresses ou de preuves tangibles d'existence. Ce flou délibéré constitue l'antithèse même de la transparence qu'exigerait toute prétention présidentielle crédible.

L'indigence conceptuelle d'un programme fantôme

La vacuité intellectuelle de sa candidature a atteint son paroxysme lors de sa prestation calamiteuse à l'émission « 1 Candidat, 1 Projet ». Confrontée à des questions élémentaires sur la gouvernance institutionnelle, Mme Zenaba s'est enlisée dans un marécage de généralités éculées : « Il faut savoir qu'aujourd'hui les institutions qui existent dans notre pays [...] je pense qu'en termes de réforme, ce serait déjà de réduire coûts parce que j'estime qu'il y a des institutions aujourd'hui qui coûtent cher. »

Cette approche superficielle des enjeux constitutionnels s'est confirmée lorsqu'interrogée sur la séparation des pouvoirs, elle a esquivé par cette réponse d'une affligeante platitude : « Moi la tête du pays, je vous dis ça dépend de l'éducation de tout un chacun [...] quand déjà la tête en haut respecte ce qui est notifié, elle respecte les lois de ce pays, elle respecte la justice. » Une telle indigence conceptuelle suscite une consternation légitime dans un pays écorché par des décennies de marasme institutionnel.

L'économie selon Zenaba : une apologie de l'approximation

Son programme économique, pierre angulaire de toute ambition présidentielle sérieuse, s'apparente à une succession de lieux communs dénués de substance. Sa vision de la diversification économique, bien que pertinente dans son principe, sombre dans l'inconsistance dès qu'il s'agit d'en préciser les modalités d'exécution.

« L'agriculture également parce que c'est aussi une richesse [...] il faudrait dépê mettre des subventions, travailler sur ces secteurs-là pour qu'on puisse développer facilement et remonter l'économie du Gabon », affirme-t-elle sans détailler ni l'origine des financements, ni les filières prioritaires, ni les mécanismes d'implémentation.

Confrontée à la question cruciale de la dette publique, Mme Zenaba a livré ce qui restera peut-être comme l'apothéose de l'approximation : « Je préfère aller dans les approximatiques [...] le Gabonais de Malinga ou de Mayumba comprendrait mieux. » Cette glorification de l'imprécision, présentée comme une vertu populiste, constitue un camouflet à l'intelligence collective des Gabonais, qu'ils soient citadins ou ruraux.

Une politique sociale déracinée des réalités territoriales

Le volet social de son programme, censé incarner la sensibilité féminine qu'elle revendique, trahit une méconnaissance abyssale des réalités territoriales du Gabon. Incapable d'articuler des propositions concrètes pour des problématiques aussi fondamentales que l'état désastreux des infrastructures routières à Lambaréné, elle se réfugie dans des circonlocutions vaporeuses : « Justement, je connais mon pays [...] ce serait sur le terrain éventuellement de refaire un recoupage. »

Sa formule quasi-messianique visant à « sauver un Gabonais sur dix » pour stimuler l'emploi illustre sa propension à réduire des problématiques systémiques complexes à des solutions simplistes, voire messianiques. Cette naïveté confine à l'imposture intellectuelle dans un pays où le chômage endémique résulte d'une conjonction de facteurs structurels qu'aucune baguette magique présidentielle ne saurait dissiper.

La symbolique féminine dévoyée

L'unique argument de poids qui subsiste en faveur de sa candidature réside dans sa dimension symbolique : première femme à briguer sérieusement la magistrature suprême dans un pays dominé par des figures patriarcales. Son slogan, « Le Gabon de tous les possibles », aurait pu incarner un souffle novateur dans le paysage politique sclérosé du pays.

Hélas, cette symbolique s'effondre face à la désinvolture avec laquelle elle aborde les enjeux fondamentaux de la nation. Loin de transcender les clivages de genre par l'excellence de ses propositions, Mme Zenaba risque paradoxalement de conforter les préjugés sexistes en présentant une candidature manifestement sous-préparée.

L'aveu suprême : une candidature vassale

L'ultime trahison de ses ambitions affichées réside dans cette déclaration sidérante accordée à une chaîne française : « Je ne verrais aucun inconvénient à travailler avec lui [le général-président]. » Cet aveu d'allégeance anticipée au favori du scrutin pulvérise toute prétention d'indépendance et dévoile la véritable nature de sa démarche : une stratégie d'auto-promotion visant à s'insérer dans les arcanes du pouvoir par la petite porte.

Cette posture de vassalité volontaire s'inscrit dans une tradition gabonaise bien établie : utiliser l'élection présidentielle comme un tremplin vers une nomination ministérielle ou une sinécure parapublique. Ce cynisme calculateur constitue une offense aux 846 000 électeurs qui s'apprêtent à exercer leur droit civique le 12 avril prochain.

Par Anne-Marie DWORACZEK-BENDOME | Journaliste indépendante | 10 avril 2025

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