
Félix BONGO, quadra, intelligent, courageux, volontaire, homme du sérail, Ex-directeur de la dépense au Trésor public, Ex-Patron de la société "ING Consulting". Accusé en 2006, de malversations financières dans l’affaire concernant l'achat de fourgons blindés commandés par le Trésor public et dont sa société avait obtenu le marché. Face à ce qui apparaîtra pour lui comme étant une justice aveugle et inique, pour sa sécurité, il choisira l’exile vers France début 2008. Sous le coup d’un mandat d’arrêt international lancé par la justice gabonaise, Félix Bongo sera interpellé et jugé en mars 2009 par la cour d’appel de Versailles, près de Paris. Relaxé, il vit désormais en France, avec le statut de réfugié politique. En tant citoyen engagé, il est devenu une "figure majeure" de l'opposition Gabonaise en France.
“ L’homme privé
AM DWORACZEK-BENDOME - Question : Monsieur Félix Bongo, Bonjour. Présentez-vous en quelques mots
Félix Bongo : Je suis né au Gabon, ma famille est originaire de la province du Haut Ogooué, au Sud-Est de la République Gabonaise. Je suis l’aîné du couple Martin Bongo et de Feu Marie Claire BONGO, ex- haut fonctionnaire, ancien ministre des Affaires étrangères. Je suis venu en France à l’âge de 9 ans, placé dans un internant, et "j'y ai suivi une partie ma scolarité". Nonobstant les haines tenaces que me vouent certains membres éminents de la Famille "BONGO ONDIMBA". J’ai survécu aux différentes "tentatives de torpillage" de ma vie.
“ Parcours
Monsieur Félix Bongo parlons un peu de votre parcours. Pouvez-vous nous relater quelles étapes de votre vie professionnelle ?
Félix Bongo : C’est simple et limpide, madame. Durant ma dernière année d'étude au Canada, et en rentrant au Gabon, j'ai mené un projet dans les Télécom. Peu de gens le savent. Le pays dans lequel nous menions ce projet était le seul à avoir voté les lois libéralisant ce monopole d’Etat. Notamment dans le secteur des services dit à valeur ajoutée. Nous étions bien placés, on finissait de boucler les études puis patraque, une guerre , etc... Pour toutes ces raisons, le projet n’a pas pu voir le jour.
“ L'entrée dans l’administration au Gabon
Alors, votre projet s’arrête dans un pays voisin. Pouvez nous dire comment vous vous êtes retrouvé par la suite dans l’administration ?
Félix Bongo : Je suis entrée au « Trésor public » sur les conseils d’un ami et avec l’aide du président Bongo Ondimba lui-même. Je me demande si l’initiative ne venait pas de lui, car un jour, je le rencontre et il me dit : tu as fait des études économiques et financières, pourquoi tu ne vas pas travailler là-bas. J’ai passé huit ans et j’ai démissionné pour trois raisons :
1- j’avais fait le tour de cette fonction et je voulais faire autre chose,
2- à ce poste-là, on ne pouvait pas être significatif dans le choix des orientations de l’Etat, on les subissait plutôt.
3- dernier point qui m'a conforté dans la décision de partir venait du clan "Bongo Ondimba" : il y avait trop d'histoires et des pressions de toutes parts.
Tout le monde a dans la tête que la bonne fortune des uns et des autres ne vient et ne viendra que de la fonction publique. Or, les postulants croient exponentiellement et le nombre des postes sont figés. Pour être clair : il n’y aura qu’un seul directeur d des douanes, des imports, etc, etc… Je suis parti. Pour info : je suis le premier à jusqu’à ce jour avoir démissionné du trésor.
“Business au Gabon
Après votre départ du trésor, vous retournez à votre passion première « l’entrepreneuriat ». Comment c’est passé ce retour ?
Félix Bongo : A l’époque, pour commencer cette nouvelle étape de ma vie, il me faut un lieu, le fils de Mr. Mehdi Teale, qui est décédé malheureusement me loue un bureau. Et là, je repars à zéro. J’engage deux à trois personnes.
Les affaires marchent bien, quatre mois après mon installation dans cet immeuble, ma société "ING Consulting" occupait les trois dernières étages de ce lieu. J’avais sept sociétés organisées autour d’une « holding ». j’étais conseillé avec par la société Deloitte. Pour que chacun comprenne, Madame Madeleine Berre, aujourd’hui, présidence de la Confédération patronale gabonaise (CPG), était l’une de nos conseillers juridiques. Et en dehors des propres entreprises, j’étais aussi engagé par une multinationale Américaine pour diriger l’engineering de leur projet sur l’Afrique. C’est moi qui aie fait venir SINOPEC au Gabon et bien d'autres encore.
“ Brièvement l’affaire « fourgons blindés
Sans entrée dans les détails et les méandres de ce dossier, pouvez dire quelques mots sur cette affaire ?
Félix Bongo : Comme je vous le disais dans la précédente question : Pour moi, ce dossier n’est qu’un aspect paroxystique de ces querelles au sein des clans « Bongo » et « Ondimba » et certains des membres des deux familles. Je ne me dérobe pas, mais je reviendrais plus tard et vous comprendrez mieux pourquoi. Je suis le seul gabonais jusqu’à ce jour, avoir eu un mandat d’arrêt international sur le dos, quand que les personnes qui commentent des pires crimes se pavanent librement et sans crainte.
"Vu de l'extérieur", devant ce qui parait être un monde merveilleux pour certains, je dis clairement que ce qui se passe en arrière-cour est loin d’être reluisant, c’est le règne du chantage, du sordide. On vous rappelle sans cesse que ce que vous avez, c’est grâce à eux (Ondimba) etc…. on vit sous les coups de menaces des : "tu vas voir", etc… Constamment, constamment. Attention, bien-sûr, je suis un enfant du sérail, je ne renie rien, je ne me plains pas, j’informe juste l’opinion.
Je précise également que tous ceux qui m’en veulent sont « tékés ». J’irai plus loin, dans mon cas personnel, la personne au cœur de ma persécution n’est autre que Pascaline Bongo, ex-directrice de cabinet de son père, avec quelques-uns de ses frères, cousins et quelques membres imminent de la famille « Bongo Martin », essentiellement les frères de mon père qui ne supportaient pas non plus. L’affaires des fourgons, madame, ce n’est qu’une vaste fumisterie comme savent les mettre en scène les "Bongo" pour abuser les gabonais depuis des années et des années. Je ne suis qu'une personne parmi tant d'autres.
“Conciliation familiale
Avez-vous essayé d’arranger les choses avec la famille Ondimba ?
Félix Bongo : A un moment, j’en ai eu marre, j’ai demandé à des personnalités très importantes du Gabon comme de l'étranger (par respect et pour pas les impliquer sans leur avis, je préfère pas citer ces gens) d'intervenir pour apaiser ces conflits intra-clan qui allaient crescendo. Lorsque j'ai quitté le trésor. Je ne voulais pas que ce soit vu comme un pied nez ou une provocation. Je voulais simplement mener ma petite vie et revenir à mes premiers centres d'intérêts : penser des projets et les mettre en œuvre
“Plainte contre Félix Bongo
Qui a porté plainte contre vous ?
Félix Bongo :Au moment où je vous parle, le trésor public gabonais n’a jamais porté plainte contre moi. Il n'y a eu qu'un seul plaignant contre moi, il s'appelle Mr. Bosco Alaba Fall, neveu du défunt président Omar Bongo. Il disait qu’il agissait sur la base d’une prérogative qui permet au parquet de la république de s’autosaisir d’un problème sur dénonciation.
Mais devinez qui a été me dénoncer?
Très peu de gens le savent au Gabon : un chauffeur licencié par moi après vingt-deux mises à pieds et qui était le beau-frère du procureur de la république, Mr. Bosco Alaba Fall. Ce monsieur (Bosco Alaba Fall) qui était déjà connu pour faire de la justice spectacle et pour orchestrer la déchéance d’un tel ou tel pour le compte du pouvoir. Je n’ai été qu’un jouet dans les main de ce procureur ou plus exactement de cet homme de main nommé : Bosco Alaba Fall
“Spoliation de mes biens personnels
Dans les différents sujets qui vous opposent à certains au Gabon, il y a le volet concernant la spoliation de vos biens. Plus précisément, il s’agit de quoi ?
Félix Bongo : Au moment où je suis obligé de quitter le Gabon pour ma sécurité, mes biens sont mis sous séquestre, c’est-à-dire confié à un syndic, Me Athanase Ndoye Loury. Ce syndic est notoirement connu comme étant un truand au Gabon. En effet, lui et d’autres comparses ont mis en place un système qui les permet d’être mandatés par les juges pour redresser une entreprise officiellement, or eux, n’ont qu’un but dans cette démarche : celui de spolier les propriétaires.
Il a fait de la prison, ce n’est pas une invention de ma part. Je serais ainsi spolié de l’intégralité de mes biens.
Pour rendre cette opération facile et rapide, Mr Bosco Alaba Fall avec celle qui était à ce moment-là, le substitut du procureur, maintenant, procureur de la République près le tribunal de Libreville, Madame Sidonie Flore Ouwé. Ils jetteront en taule cinq de mes collaborateurs. Ceux qui échapperont à cette rafle, ils se retrouveront sans rien. Il y a l’un d’eux mourra faute de moyen financier pour payer des soins et des médicaments.
“La décision de justice concernant la spoliation de mes biens
Qu’est-ce que la justice a dit au sujet de la spoliation de vos biens ?
Félix Bongo : Édifiant, Malgré le système qui était contre moi, en "première instance", en "appel" et en "cassation", bien qu’Omar bongo était encore vivant et faiseur de roi, la cour d’appel a dit : tout ce qui s’est passé, concernant la séquestration de mes biens personnels était illégal.
Pour ce qui concerne l'affaire "des fourgons blindés", Maitre Oyane Paulette est la dernière avocate qui s'est constitué pour me défendre. Elle s'est rendue au tribunal de Libreville pour voir mon dossier. Grande surprise, à la chambre d’instruction de Libreville, au 3ème cabinet, on lui a dit : Félix Bongo n’a aucun dossier ici. Poursuite informelle et clandestine, je suis et j’ai été victime d’une "vendetta".
Extraordinaire, pour fermer la boucle, je suis l’unique personne contre qui la justice gabonaise a émis un mandat d’arrêt international.
“Le mandat d’arrêt international
Qu’est-ce que ça fait d’être entrée dans l’histoire comme étant le premier « Gabonais » contre qui a été émis un mandat d’arrêt international ?
Félix Bongo : C’est extrêmement instructif sur soi, l’environnement et sur les gens. Il n'était un secret pour personne dans notre petit milieu que Pascaline Bongo Ondimba en tête mais d'autres avec elle de la présidence enrageaient littéralement contre moi et j'ignore réellement toujours pourquoi mais, c'est un fait dont j'ai pris acte. La preuve, plusieurs mois avant cette histoire, j'ai eu droit à des menaces directes et sans fioritures de la part de cette dame (Pascaline Bongo Ondimba), lors d'une convocation à son domicile à cet effet et ce devant témoins et pas des moindres , je reviendrais dessus .... Je vous l'ai dit, c'était une des raisons de ma démission de la fonction publique, restez loin de ceux considèrent le pays comme étant leur propriété.
“Engagement dans l’opposition
Vous êtes à la pointe de ceux qui mènent la contestation contre le régime en place au Gabon en France et votre lutte porte contre "l'impunité et à l'instauration de l'état de droit au Gabon". Ma question : Essayez-vous de surfer sur les problèmes des gabonais pour régler vos comptes personnels certains « Bongo Ondimba » comme le disent vos détracteurs ou est-ce véritablement un engagement pour l’intérêt général comme vous l'affirmez ?
Félix Bongo : Non, ça n’arrive pas qu’aux autres ! - J’étais déjà combattu dans ma famille, aujourd’hui, je combats avec les autres pour un but qui dépasse mes petits soucis personnels.
Madame, veuillez m’excuser pour ma franchise mais, je sens un "parti pris", dans votre question. Si je vous comprends bien, je dois/je devais rester enfermer dans un carcan qui veut me tuer ? Sachez qu’on ne choisit pas son lieu de naissance, sa famille ou son pays. Je suis né dans cette famille-là, c’est tout et je ne peux rien changer à ça.
Vaut mieux tard que jamais - je prends toutes mes responsabilités face à ma conscience et à mes tous mes compatriotes. J’ai fait un cheminement personnel, j’ai souffert dans ma chair, tout ceci m’a permis de voir et de comprendre que notre système était en panne.
Cheminement personnel. On apprend de la vie. Avec ce que j’ai vécu que je vis encore, je me suis posé la question suivant : si on a fait ça à moi qui suis du sérail, qu'est-ce ça doit être ?
On a pu m’acculer, me voler mes biens en se servant d’une justice aux ordres. Madame, c’est dans ce sens que ma petite histoire rejoint la longue liste des maux que subissent sur tous les gabonais. Non, madame, aujourd’hui, ce n’est pas pour moi, c’est pour nous tous que je combats.
Ni haine, ni revanche. Pour moi, la problématique au Gabon est générale. Nous devons unir nos forces pour changer un système qui bafoue, spolie, écrase, rabaisse, etc, etc... Tant qu’à la tête de ce pays ne sera pas un homme bien veillant et responsable, qui nous aimes et qui n’est pas là pour nous utiliser, je me battrai sans répit. Qu’on change X ou Y, ce n’est pas la solution. Il faut mettre fin au système. Afin que le pouvoir revienne dans les mains d'un homme sincère responsable et bienveillant. ... Madame, ne vous trompez pas, des gens comme moi sont nombreux et une fois la bataille gagnée, ils regagneront leur petites vie. Dans mon cas, les affaires et mes plateaux ancestraux.
“Le statut de réfugié politique
Vous êtes membre du petit groupe de gabonais bénéficiant en France du "statut de réfugié politique en France". Quand on sait les liens étroits existants entre la France et Gabon, ainsi que la place du défunt Omar Bongo Ondimba dans la fameuse "Françafrique" et les réseaux, votre cas retient l’attention, pouvez-vous dire quelque mots ?
Félix Bongo : C’est très simple, après mon interpellation, mon dossier a pu être consulté et mon jugement en mars 2009. La France librement a jugée utile de m’octroyer "le statut de réfugié politique" c’est tout ce que je peux dire. Je n’en dirai pas plus pour le moment.
“les conséquences personnelles de l’exil
Quelles sont les choses qui vous ont le plus fait mal depuis votre exil involontaire ?
Félix Bongo : L’exil est une terrible déchirure pour tout être humain. Ce n’est pas facile de se trouver dans l’impossibilité de rentrer chez soi. Et hélas ! - Le plus traumatique n’a pas été la perte de mes biens matériels mais plutôt celle des proches parents : un grand frère et une grande sœur, les deux sont décédés après mon départ du Gabon, je n'ai même pas pu assister à leurs funérailles.
Il en a été ainsi aussi pour ma petite sœur, mon oncle maternel et mon grand-père maternel et de nombreux autres membres de ma famille, tous sont décédés après mon départ du Gabon, là aussi, il m'a été impossible d'assister à leurs funérailles.
Pour la liberté et la démocratie, bien que ma douleur personnelle soit grande, au-delà de mon drame, mes pensées vont à mes compatriotes au pays qui sont privés de leur liberté et qui pourrissent injustement en prison. Je pense également à la douleur de celles et de ceux qui ont eu un des leurs tués ou handicapés à vie.
“L’avenir
Vous êtes jeune, en bonne santé, bel homme et toute la vie devant vous. Comment voyez-vous votre futur ?
Félix Bongo : J’ai beaucoup de rêve, mais le premier aujourd’hui, c’est contribué avec tous les gabonais, ceux qui sont déterminés à le faire, chacun au niveau de sa faculté contributive, d’autres en montrant, d’autres en état plus utile dans l’ombre, jusqu’à ce les gabonais se choisissent librement celui qui doit présider au destin du pays, afin que nous nous réapproprions notre pays, notre histoire, notre économie, etc… Attention, cela ne veut pas dire chasser les gens, Non. Cela veut simplement dire tenir nous-mêmes gabonais, notre gouvernail, Nelson Mandela a dit : "Tout ce qui se fait pour nous sans nous, est fait contre nous". Je rêve que le Gabon ait une croissance économique qui bénéficie réellement aux populations pas uniquement à quelques-uns.
Un rêve plus personnel : retourner et reconstruire dans mon village ancestral dans les plateaux batékés. un endroit absolument magnifique où je vais concrétiser tous les projets que nous avions étudiés notamment dans l'agriculture et l'agro industrie .
Propos recueillis par : ANNE MARIE DWORACZEK-BENDOME
Intervention de Félix BONGO, le 25 avril 2015, à Paris

