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Billet de blog 20 juin 2025

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Rachel Ogoula Akiko : Dix ans de fauteuil doré à l'UNESCO

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Illustration 1
Rachel Ogoula Akiko

Le système Bongo perdure dans les salons parisiens

En février 2015, Ali Bongo redistribue les cartes diplomatiques comme un pacha distribuant ses faveurs. Rachel Annick Ogoula Akiko décroche le jackpot : ambassadrice à l'UNESCO, dans les beaux quartiers de Paris. Officiellement, c'est pour son "expérience" dans les cabinets présidentiels. Traduisez : elle connaît les secrets de famille et mérite sa récompense.

L'époque se prête au spectacle. Irina Bokova dirige l'UNESCO et prêche la parité. Ali Bongo surfe sur la vague féministe internationale. 

Mais voilà : 2023 arrive avec son lot de bouleversements. Le coup d'État du 30 août balaye les "Bongo". Les Gabonais croient enfin au changement. Oligui Nguema prend le pouvoir avec la promesse de tout transformer. Sauf que... Rachel Ogoula Akiko reste vissée à son siège parisien. Comme si de rien n'était.

Anniversaire : Rachel Annick Ogoula Akiko dix ans à l'UNESCO

Que fait concrètement une ambassadrice à l'UNESCO pendant une décennie ? Mystère. Pendant que le monde se digitalise, que l'intelligence artificielle révolutionne l'éducation, que les jeunes Africains réclament des formations adaptées au XXIe siècle, Mme Ogoula Akiko cultive l'art de l'influence proportionnée.

L'épisode Noël Nelson Messone révèle toute l'hypocrisie du système. En juillet 2024, le Gabon annonce en grande pompe la candidature de son ambassadeur aux États-Unis pour diriger l'UNESCO. Un profil solide, une vraie ambition diplomatique. Puis, patatras : en décembre, Libreville retire sa candidature pour soutenir... l'Égypte ! 

Cette volte-face en dit long sur la mentalité du nouveau pouvoir. Plutôt que de bousculer l'ordre établi, on préfère la petite combine, l'arrangement entre copains. Rachel Ogoula Akiko peut dormir tranquille : elle a encore de beaux jours devant elle dans les salons de l'UNESCO.

Pendant ce temps, que deviennent les vrais enjeux ? L'UNESCO pilote la réflexion mondiale sur l'éthique de l'IA, développe des programmes éducatifs révolutionnaires, régule les biotechnologies. Des sujets qui demandent une expertise de pointe, une vision d'avenir. Pas exactement le profil d'une diplomate formatée dans les cabinets Bongo.

Gabonais, votre avenir !

Cette sinécure parisienne coûte cher aux contribuables gabonais. Pendant que Rachel Ogoula Akiko savoure sa rente de situation, les universités gabonaises manquent de tout, les jeunes fuient le pays, l'économie stagne. L'argent public finance le train de vie d'une nomenklatura déconnectée des réalités nationales.

Le plus révoltant ? Cette situation prive le Gabon d'opportunités historiques. L'UNESCO distribue des centaines de millions pour l'éducation numérique en Afrique. Elle finance des programmes de formation aux nouvelles technologies. Elle ouvre des partenariats avec les géants de la tech. Tout cela nécessite une diplomatie agressive, des négociateurs compétents, une vision stratégique.

Que propose le Gabon ? Une représentante fossilisée, survivante d'un régime honni, incapable de porter la voix d'un pays en plein changement. Résultat : le Rwanda rafle les contrats, le Sénégal attire les investissements, l'Éthiopie noue des partenariats technologiques. Le Gabon, lui, reste sur le quai.

La comparaison fait mal. Pendant que Paul Kagame envoie ses meilleurs cerveaux conquérir les organisations internationales, que Bassirou Diomaye Faye développe une diplomatie digitale offensive, Oligui Nguema reconduit les habitudes du passé. Comme si 94,85 % des voix ne lui donnaient pas le mandat de tout changer.

Cette passivité diplomatique révèle la vraie nature du nouveau régime. Derrière les discours de rupture se cache une transition en trompe-l'œil. On change les têtes au sommet, on garde les pratiques en bas. On promet la révolution, on livre la continuité.

Illustration 2
Rachel Ogoula Akiko

Le test de vérité d'Oligui Nguema

Aujourd'hui, le président gabonais fait face à un choix simple : assumer sa promesse de changement ou avouer son imposture. Maintenir Rachel Ogoula Akiko à l'UNESCO, c'est choisir le confort de l'entre-soi contre l'exigence du renouveau. C'est préférer la médiocrité rassurante à l'excellence dérangeante.

Les Gabonais ne sont pas dupes. Ils ont voté pour la transformation, pas pour le recyclage des élites. Ils attendent des actes, pas des discours. Chaque jour qui passe sans changement érode un peu plus la crédibilité du nouveau pouvoir.

L'UNESCO représente bien plus qu'un poste diplomatique. C'est un laboratoire de l'avenir, un observatoire des mutations mondiales. Y maintenir une représentante de l'ancien monde, c'est condamner le Gabon à subir les révolutions technologiques au lieu de les anticiper.

Pire : cette complaisance envoie un signal désastreux aux jeunes Gabonais. Elle leur dit que le mérite ne paye pas, que l'innovation dérange, que la compétence cède toujours face au piston. Comment bâtir un pays moderne avec de tels messages ?

L'équation est pourtant simple. Soit Oligui Nguema trouve le courage de bousculer ses habitudes et rappelle Rachel Ogoula Akiko pour la remplacer par un profil adapté aux enjeux contemporains. Soit, il assume sa posture de gestionnaire conservateur et renonce définitivement à transformer le Gabon.

Dans ce cas, les Gabonais sauront à quoi s'en tenir. Ils comprendront que 2023 n'était qu'un changement de façade, que les promesses électorales n'étaient que du vent, que leur pays continuera de végéter dans la médiocrité institutionnalisée.

Le rendez-vous de 2032 approche déjà. D'ici là, chaque décision révélera la vraie nature du régime Oligui. L'affaire Rachel Ogoula Akiko constitue un premier test grandeur nature. Un test que le président gabonais semble déjà en train de rater.

Par Anne-Marie DWORACZEK-BENDOME  | Le 20 juin 2025

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