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Dans un monde où l’Afrique est fréquemment associée à ses difficultés, Léonce Houngbadji s’insurge — non pas par colère, mais par conviction. Journaliste, fondateur du média Notre Voie, il refuse ce récit monocorde qui réduit un continent entier à ses blessures. À contre-courant des clichés médiatiques, il a lancé, il y a quelques années, la Semaine Africaine des Solutions (SAS), une initiative audacieuse pour mettre en lumière celles et ceux qui construisent l’avenir du continent. La 3ᵉ édition, prévue les 24 et 25 octobre 2025 à Paris, promet d’être encore plus inclusive, plus affranchie, plus opiniâtre dans son combat : faire entendre les voix du progrès africain.
Un événement né d’une urgence identitaire
La SAS n’est pas juste un événement annuel. C’est un mouvement. Une réponse nécessaire à une question cruciale : pourquoi continuer à raconter l’Afrique à travers le prisme de l’échec alors qu’elle bouge, innove, résiste ? Derrière cette initiative se tient Léonce Houngbadji, figure emblématique d’un journalisme constructif et engagé. Depuis plus de vingt ans, à travers Notre Voie, il documente des initiatives concrètes, valorise des héros oubliés, interroge les stéréotypes. Et c’est précisément ce regard que la Semaine Africaine des Solutions ambitionne de porter à l’international.
Organisée à Paris, au sein de la mairie du 16ᵉ arrondissement, elle réunit chaque année entrepreneurs, journalistes, activistes, penseurs, membres de la diaspora et amis de l’Afrique. Pour deux jours riches en débats, ateliers, présentations d’innovations et reportages, elle offre un espace rare : celui d’une discussion libre, centrée sur les solutions avant les problèmes.
Léonce Houngbadji : journaliste, passeur, bâtisseur
Houngbadji n’est pas seulement un journaliste. Il est aussi un passeur. Entre le passé et l’avenir. Entre les réalités complexes du continent et les rêves de milliers de jeunes qui veulent croire en une Afrique capable de se penser elle-même. Ancien attaché de presse et directeur de communication dans les institutions publiques béninoises, il a côtoyé le pouvoir africain de près. Mais il a choisi un autre combat : celui de redonner la parole à celles et ceux qui font bouger le continent, loin des palais présidentiels.
« Il est temps que nous redevenions les conteurs de notre propre histoire », affirme-t-il sans ambivalence. Car pour lui, la narration, c’est du pouvoir. Et tant que d’autres continuent de raconter l’Afrique à sa place, le continent restera enfermé dans un carcan de fatalisme. Sa réponse ? La création d’un écosystème médiatique nouveau, militant, structuré autour du journalisme de solutions.
Ressaisir l’identité africaine
L’enjeu dépasse les frontières médiatiques. Il est aussi profondément identitaire. Combien de jeunes issus de la diaspora hésitent à poser le pied sur le continent, effrayés par l’image négative qu’on leur renvoie ? « Nous devons redonner aux jeunes africains un sentiment d’appartenance porté par des modèles concrets », explique Houngbadji. La SAS est donc bien plus qu’un salon d’exposition : c’est un laboratoire de fierté collective, un lieu de rencontre entre générations, territoires et disciplines.
Depuis sa première édition, la Semaine a su rassembler plus de 4 500 participants, alliant rencontres physiques et formats digitaux. Des drones agricoles camerounais aux briques écologiques issues du recyclage plastique en RDC, les innovations sont nombreuses à avoir été mises en lumière. Et derrière chaque invention, il y a une histoire humaine, une communauté transformée, une solution durable.
Construire un futur en commun
Mais Houngbadji ne s’arrête pas à l’événementiel. Son horizon est plus large. Il veut transformer le paysage médiatique africain, en lançant des plateformes spécialisées (web-télévision, web-radio, magazine international), en formant chaque année des dizaines de journalistes africains au journalisme de solutions, en créant même un musée numérique des inventions africaines. « Nous formerons des ambassadeurs de solutions capables de diffuser ces récits partout dans le monde », affirme-t-il avec ambition.
En lien avec cette vision, l’appel à exposants pour la 3ᵉ édition est désormais lancé. Professionnels, startups, ONG, citoyens engagés : tous peuvent participer, grâce à des formules adaptées à tous les budgets. L’événement sera aussi l’occasion de nouer des partenariats, créer des passerelles, et surtout, rappeler que l’Afrique avance — malgré les silences, malgré les stéréotypes, malgré les indifférences.
Une Afrique forte, inventive, connectée
À l’heure des grandes convoitises géopolitiques, face à une jeunesse vibrante et à un continent en mutation, Léonce Houngbadji incarne une voix rare : celle d’un optimisme lucide, ancré dans la réalité. « L’Afrique ne demande pas à être sauvée. Elle souhaite être reconnue dans sa dignité, son ingéniosité, sa volonté de construire », assure-t-il.
La Semaine Africaine des Solutions n’est donc pas seulement une vitrine. Elle est un mouvement de fond, une tentative courageuse de réécrire collectivement le récit du continent — enfin libéré des carcans extérieurs, enfin maître de sa propre parole.
Par Anne-Marie DWORACZEK-BENDOME | Journaliste | 29 avril 2025