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Billet de blog 14 janvier 2025

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Les travailleuses et travailleurs, en capacité de gérer, vont décider par eux-mêmes

Nicolas Da Silva sur la SECURITE SOCIALE : Les travailleuses et travailleurs, en capacité de gérer, vont décider par eux-mêmes

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Les travailleuses et travailleurs, en capacité de gérer, vont décider par eux-mêmes

Nicolas Da Silva, auteur de La bataille de la Sécu, nous donne sa vision de la Sécurité sociale, tant actuelle qu’historique, et comment il la perçoit comme une institution qui dépasse le capitalisme.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, tu dis souvent que la Sécurité sociale est une institution en pleine santé financière. Est-ce que tu peux développer ?

L’idée c’est vraiment de contrecarrer le regard dominant qui est porté sur la Sécu. Le regard dominant c’est celui du trou de la Sécu. C’est-à-dire que la Sécurité sociale serait une institution au bord de la faillite et que sans réforme, la Sécu ne pourrait pas vraiment survivre quelques années de plus.

Ce discours est totalement faux, c’est à dire que quand on regarde ses fondamentaux, la Sécu va plutôt bien. Si on a des problèmes de finances publiques ce n’est pas la Sécu, c’est l’État. Sous le terme Sécu, il y a plusieurs réalités. La Sécurité sociale c’est plein de régimes très différents. Plein de caisses différentes. Quand on dit qu’il y a un déficit à la Sécurité sociale, la plupart du temps on parle du déficit du régime général de Sécurité sociale, c’est le régime de base, caisse nationale d’assurance maladie, assurance vieillesse, CAF et accidents du travail, maladies professionnelles.

Ces quatre caisses-là, qui sont le régime de base, sont en déficit, c’est vrai. Mais ce n’est pas vrai pour tous les risques. Il y a des excédents pour la famille, par exemple. Si on ajoute les autres caisses qui sont obligatoires, si on ajoute la CADES (caisse liée au financement de la dette sociale), ce n’est plus vrai. La Sécu, dans le sens général des administrations de Sécurité sociale, elle est à l’équilibre, il suffit de voir les comptes de l’INSEE qui montrent, que tous les ans, les administrations de Sécurité sociale, donc la Sécu au sens général, tous les risques et toutes les caisses, c’est à l’équilibre.

Ce qui se passe, c’est qu’effectivement il y a certaines caisses qui sont en déséquilibre et d’autres qui sont en excédent. Comment on explique cette situation ? En partie du fait de la caisse particulière qu’est la CADES, la caisse d’amortissement de la dette sociale. C’est la CADES qui récupère beaucoup d’argent pour refinancer la dette et donc, si on a ce regard, on se rend compte que finalement la situation n’est pas si terrible, et que si tout simplement on décidait de rembourser la dette de la Sécu moins vite que ce qu’on fait actuellement, il y aurait moins de problèmes.

On peut aussi montrer que la Sécu va bien financièrement par d’autres aspects. Par exemple, en disant que le déficit de la Sécu c’est 18 milliards. Les régimes de base c’est 600 milliards donc finalement 18 milliards ça paraît beaucoup mais par rapport aux ressources totales de la Sécu, c’est pas beaucoup.

90 % du déficit et 90 % de la dette, c’est l’État, ce n’est pas la Sécu. Et donc à chaque fois qu’on nous dit que la Sécu est en grand danger, d’abord ce n’est pas vrai, parce que ses comptes ne vont pas si mal. Si on considère qu’il y a un problème de comptes publics, c’est plutôt du côté de l’État que de la Sécu qu’il faut regarder. Et dernier élément qui me parait absolument essentiel, c’est quand même de dire que si la Sécu a des déficits, ce n’est pas parce qu’il y a un dérapage des dépenses comme on dit souvent, mais c’est surtout parce qu’il y a une politique des caisses vides.

Globalement, l’essentiel du déficit, on veut nous faire croire que c’est dû aux assuré·es, que c’est lié aux gens qui ont des droits et qui exercent leurs droits en ayant des prestations. En fait pas du tout, le déficit qui existe, on peut l’expliquer avant tout par le fait qu’on va dire aux entreprises, en particulier, qu’elles ne vont pas payer leurs cotisations sociales. Ça coûte extrêmement cher, beaucoup plus que la fraude souvent fantasmée aux prestations.

Le rapport de la commission des comptes de la Sécurité sociale d’octobre donne des évaluations. Il dit que les allégements de cotisations — il parle de politique de l’emploi — c’est des exonérations de cotisations. Il y en a différents types. Pour la Sécu, c’est environ 80 à 90 milliards d’euros et à ça, il faut ajouter une déduction de cotisations.

Un autre dispositif, c’est les déductions d’assiettes, c’est-à-dire sur ces revenus-là, tu ne payes rien. C’est ce que dit l’État. Le cas typique, cela va être les tickets-restaurant, ça va être les chèques-vacances, mais ça va être aussi des choses qui sont intéressantes dans la Sécu, ça va être les complémentaires santé d’entreprises.

La souscription à une complémentaire d’entreprise par l’employeur pour les employé·es, pour les salarié·es, c’est un revenu. Sauf que c’est un revenu qui n’est pas soumis à cotisation, il y a une déduction d’assiette et une incitation fiscale. Ça, c’est encore 20 milliards. Donc ça veut dire que globalement le budget du régime général, c’est 600 milliards et les trous dans la raquette s’élèvent à peu près à 100 milliards.

Le déficit de la Sécu, vient de la politique des caisses vides. Non seulement la politique des caisses vides, mais le fait des dépenses nouvelles qui ne sont pas financées. Et cette année il s’est passé un truc incroyable. Il y a le ministre des comptes publics Saint-Martin qui est venu en commission des comptes à l’Assemblée nationale pour présenter le budget de la Sécu et il a dit un truc extraordinaire, il a dit « oui, mais bon, c’est vrai qu’on a des problèmes de dépenses, parce que les dépenses ont explosé et des fois, il y a eu des dépenses qui n’étaient pas financées, par exemple le Ségur de la Santé. »

Donc ça c’est une petite phrase, mais il faut quand même l’analyser. Le Ségur de la Santé, c’est ce qu’avait promis Emmanuel Macron pendant le plus fort du confinement aux professionnel·les de santé. C’était essentiellement des rémunérations et de l’investissement. Ce Ségur représentait à l’époque vraiment la contrepartie à l’investissement et la reconnaissance. Ça a été très discuté sur ce que ça représentait : c’était assez, ce n’était pas assez, peu importe. Ce que dit le ministre, c’est que ce Ségur n’était pas financé.

Effectivement, ces deux phrases assassines disent que le Ségur de la santé représentait, en 2023, 13 milliards d’euros. Le déficit de la Sécu de la branche maladie, cette année-là, c’était 11 milliards. On augmente les dépenses, probablement de manière légitime, sauf qu’on ne met pas des recettes en face, ou alors il faut dire que le Ségur de la santé n’était pas légitime !

C’est le gouvernement qui creuse le trou, pas du tout les usagères et usagers, pas du tout les assuré.es et donc on peut dire que finalement la situation, elle est pas si mal. Malgré tout ça.

L’idée de Sécurité sociale en excellente santé financière, c’est à moitié une provocation, malgré la politique du gouvernement qui affame la bête, une expression anglo-saxonne. Ça veut dire quoi? Comme les gouvernements ont du mal à limiter, à remettre en cause les politiques sociales directement, parce que c’est très impopulaire. Alors ils enlèvent les financements, ce qui crée des déficits, et après finalement on est « obligé » d’enlever les politiques sociales.

Affamer la bête, c’est vraiment quelque chose qui est très très courant dans le débat sur la réforme des politiques sociales : « Y’a pas de sous ? Évidemment, vous videz les caisses ». Ce qui est très important à avoir en tête c’est que malgré ça, la Sécu reste quand même une institution très solide. Un exemple qui vient du monde dominant. La CADES s’enorgueillit de se financer à un faible taux sur les marchés financiers, parce que les marchés ont confiance dans la dette de la Sécu. Parce que la Sécu, c’est de la bonne dette. Et que les acteurs financiers se disent « oui la Sécu va rembourser, c’est assis sur 600 milliards de salaires tous les ans. Ils ont les moyens quand même ».

Suite sur l'Anticapitaliste

https://lanticapitaliste.org/actualite/sante/les-travailleuses-et-travailleurs-en-capacite-de-gerer-vont-decider-par-eux-memes

Propos recueillis par Colette Rueff.

Entretien avec Nicolas Da Silva*

* Nicolas Da Silva est maître de conférences en sciences économiques à l’Université Sorbonne-Paris Nord. Auteur de La bataille de la Sécu, éditions La Fabrique, 2022.

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