Elements d’alternative
Le CADTM France et ATTAC France soutiennent ce MANIFESTE ANTI-EXTRACTIVISTE
L’appropriation et la marchandisation des territoires et de la nature par les entreprises s’étendent partout, en termes de secteurs concernés et sur le plan géographique et politique. Les mégaprojets extractivistes liés à l’exploitation des minerais essentiels, le développement de grands parcs d’énergies renouvelables, les macrofermes agro-industrielles, les agro-industries et les infrastructures gigantesques de toutes sortes occupent une place prépondérante en tant qu’espaces réservés pour l’accumulation du capital. De même, les projets classiques d’extraction minière et d’hydrocarbures conservent leur caractère stratégique de maintien de la dynamique capitaliste.
Le capitalisme définit un rapport mercantiliste et d’exploitation de la nature, tout en restant incapable de résoudre les crises énergétiques, sanitaires, écologiques et socio-économiques qui touchent principalement les classes populaires du monde entier. Il s’agit d’une phase néocoloniale, rentière, du capitalisme où la spoliation de la nature par l’extractivisme, le pouvoir des entreprises et la militarisation mènent une véritable offensive autour d’eux, dans les pays dépendants et semi-dépendants. On assiste à une lutte croissante pour l’approvisionnement en énergie et matières premières qui, au final, continue à alimenter une consommation non durable, principalement dans les pays du Nord, fondée sur une exploitation des ressources naturelles qui détruit les habitats et profite exclusivement à une petite élite économique et politique.
Les hydrocarbures et les matières premières essentielles au développement des secteurs de ce néocapitalisme vert, militaire et numérique, sont concentrés dans des endroits spécifiques, généralement en dehors des frontières des principaux États, ce qui, dans la pratique, revient à encourager l’extractivisme et, plus précisément, les grandes multinationales minières à exploiter tout le nécessaire pour changer la principale source de ressources énergétiques. Pendant ce temps, le discours dominant s’emploie à habiller cette fièvre extractiviste par des concepts de neutralité climatique, de transition verte et numérique ou par des accords politiques tels que le Pacte vert européen ou le Green New Deal, qui ne font que repeindre en vert ce capitalisme vorace.
La transition verte et numérique ne fait qu’approfondir les inégalités sociales à l’échelle planétaire, tout en renforçant une matrice énergétique extractiviste et en nous rapprochant toujours plus vite du point de rupture des limites biophysiques de la planète.
De plus, sur le plan géopolitique, elle accroît encore davantage le pouvoir des entreprises transnationales, encourage la marche vers la guerre et approfondit l’offensive néocoloniale.
C’est pourquoi les grandes puissances se disputent l’accès et la domination des filières d’approvisionnement nécessaires à leurs économies, mettant au service de cette stratégie un ensemble de dispositifs économiques, diplomatiques et militaires.
Leurs intérêts se déploient à travers la signature d’accords de libre-échange et d’investissements, qui confirment le mode opératoire habituel de la mondialisation capitaliste : alors que toutes sortes d’avantages sociaux, en termes d’emplois, droit du travail et protection de l’environnement sont promis aux pays signataires, non seulement ceux-ci ne se répercutent pas positivement sur la majorité de la population, mais leurs effets se traduisent au contraire par de graves impacts socio-écologiques. Dans le même temps, on voit proliférer les accords – bilatéraux ou à l’échelle régionale – sur l’énergie et les matières premières, au seul profit des élites et des grandes entreprises, en appauvrissant la classe ouvrière et les peuples. La militarisation et l’instauration d’un état de guerre dans de nombreux territoires stratégiques sont des effets palpables de cette offensive néocoloniale.
L’exploitation minière à petite ou grande échelle a des conséquences irréparables en termes de dommages sur les terres, de pollution de l’air, de pollution des eaux de surface et souterraines, d’impacts sur la flore et la faune et de déplacements de communautés hors de leurs territoires d’origine par une violence qui ne fait que reproduire la logique du colonialisme.
Les activités d’extraction des ressources se trouvent généralement dans des espaces naturels écologiquement très sensibles tels que les hauts plateaux, les savanes, les plaines, les mers, les forêts, les bassins hydrologiques, les sources d’eau, ainsi que dans des territoires reposant sur une économie agro-pastorale où les dommages causés finissent par affecter la production alimentaire, au détriment des populations rurales et urbaines. Le développement des giga-exploitations minières, de l’industrie pétrolière ou de l’agrobusiness signifie la poursuite du saccage des territoires et l’interdiction de produire notre propre nourriture dans le cadre de la souveraineté alimentaire, en favorisant au contraire les grandes chaînes de production alimentaire.
Si une transition écosociale est nécessaire et incontournable, elle doit s’appuyer sur une vision de classe, populaire et démocratique : qui décide quoi, qui et comment y parvenir. L’extractivisme, volet fondamental du mode de production capitaliste basé sur l’exploitation intensive et dévastatrice de la classe ouvrière, des paysans et de la terre nourricière, a de graves répercussions sociales, économiques, culturelles et environnementales sur les communautés et les territoires du monde entier. Dans ce contexte, l’auto-organisation sociale et populaire devient un outil fondamental pour la défense des droits territoriaux, la justice environnementale et la construction d’un projet écosocialiste alternatif qui s’oppose à l’offensive extractiviste et à son engrenage juridique, politique et entrepreneurial. Il est temps d’envisager d’autres avenirs possibles au-delà de ce modèle de prédation et de spoliation.
Face aux avancées de l’idéologie privatisatrice et extractiviste, les classes populaires, paysannes, autochtones, mettent en avant d’autres moyens de produire de la richesse dans nos territoires, où il existe déjà une immense richesse ethnique et culturelle avec ses potentialités propres, respectueuses de la nature. Ouvrir la voie à d’autres formes d’organisation de l’économie et de la vie sociale ne passe pas par une délégation de pouvoir aux États alliés du patronat, ni en faisant confiance à la bonne volonté des possédants de grandes fortunes. Les limites politiques des gouvernements progressistes quand ils sont aux affaires et des accords interclassistes sont évidentes, il est donc nécessaire d’aller plus loin : réarticuler entre eux les espaces mondiaux, nationaux et locaux animés par des organisations populaires qui contribuent à renforcer une dynamique de confrontation explicitement dirigée contre l’hégémonie des élites politico-économiques.
Une solidarité internationaliste qui articule les communautés en lutte et les peuples en résistance pour affronter l’ordre capitaliste, hétéropatriarcal, colonial et écocide reste essentielle.
La seule issue équitable à la crise passera par les peuples et la lutte populaire pour la défense des territoires face au pouvoir des entreprises, en renforçant les projets alternatifs et les réseaux transnationaux anti-hégémoniques qui exigent et fassent respecter les droits des majorités sociales. En ce sens, l’idée de pouvoir articuler les luttes des peuples fait apparaître une lueur d’espoir pour construire une organisation populaire internationaliste et poursuivre les luttes de défense de nos territoires en réunissant nos forces. Nous pourrons ainsi amplifier la lutte contre toutes les formes d’extractivisme et l’identifier en tant que secteur parmi les plus actifs de la lutte sociale, qui met l’accent sur les contradictions du capitalisme.
Il est donc proposé la création d’un réseau international des peuples contre l’extractivisme, qui se revendique anticapitaliste, antipatriarcal, anticolonial et en faveur de la justice climatique, dont l’objectif est à lire sur