Par Amos de Tekoa
Publié sur Le Club Mediapart – Billet / Société & Humanité
Il y a des amours que le temps ne fatigue pas.
Des liens qui ne se distendent pas, même quand la vie impose sa distance.
Ma mère fait partie de ceux-là.
Elle n’est pas seulement ma mère : elle est ma lumière, ma boussole, ma racine.
🕯 Une mère, un miracle quotidien
On me dit souvent :
“Tu as une maman en or.”
“Vous êtes des anges, tous les deux.”
Et je souris, parce que c’est vrai — mais aussi parce que les mots ne suffisent pas.
Ma mère, c’est cette présence tendre et obstinée qui veille sans condition.
Elle ne demande rien, elle donne tout.
Elle ne parle pas toujours de ses sacrifices, mais ils se lisent dans ses gestes, dans son regard, dans cette attention constante qu’elle a pour tout ce qui m’arrive.
Nous ne vivons pas ensemble — beaucoup le croient pourtant, tant nous sommes inséparables.
Nous nous voyons presque chaque jour, parce que sa présence est mon ancrage et ma plus douce habitude.
“Dieu ne pouvait être partout, alors Il a créé les mères.”
— Proverbe juif
💫 Une yiddish mama comme jamais
Elle a ce mélange rare de tendresse et de force, cette chaleur qui ne s’apprend pas.
Une véritable yiddish mama, dans le sens le plus noble du terme : généreuse, attentionnée, exigeante parfois, mais toujours tournée vers le bien.
Elle s’inquiète avant même que je n’aie le temps de lui dire que quelque chose ne va pas.
Elle cuisine comme on prie : avec amour et intention.
Et quand elle me regarde, j’y lis à la fois l’histoire, la patience et une foi tranquille en la vie.
“Le respect dû à sa mère et à son père est comme le respect dû à Dieu.”
— Talmud, Kiddouchin 30b
📜 La sagesse de Maïmonide et l’amour en action
Maïmonide, dans son Guide des Égarés, écrit :
“L’amour véritable ne se dit pas, il se montre par des actes.”
C’est exactement ce qu’incarne ma mère.
Elle ne dit pas “je t’aime” à chaque instant — elle le prouve, mille fois, dans le détail du quotidien.
Dans la soupe qu’elle prépare “au cas où tu n’as pas mangé”, dans l’appel du soir juste pour vérifier “si tout va bien”.
Son amour n’a pas besoin de mots : il agit, il veille, il élève.
Et si Maïmonide voyait en la bonté un devoir moral et spirituel, alors ma mère, sans en faire un dogme, en est l’exemple vivant.
Elle donne sans calcul, console sans juger, et soigne sans attendre de remerciement.
“La plus grande des aumônes est celle que l’on offre avec le cœur léger.”
— Maïmonide, Mishné Torah
🌸 Le fil invisible qui relie
À quarante-quatre ans, j’entends parfois :
“Tu devrais couper le cordon.”
Mais ils se trompent.
Ce n’est pas un cordon, c’est un fil de lumière.
Il ne m’attache pas, il me relie.
Ce lien-là n’est pas un signe d’infantilisme — c’est une preuve de fidélité à l’amour reçu.
Nous avons traversé des épreuves, connu des jours durs, mais jamais la tendresse n’a faibli.
Nous sommes deux âmes complices, deux générations unies par la confiance, la pudeur et le rire.
“Qui honore sa mère prolonge ses jours.”
— Livre des Proverbes 30:17
🕊 Donner sans retour
Beaucoup de ceux qui la connaissent le disent :
“Votre mère, elle donne sans rien attendre.”
Et c’est vrai.
Elle ne calcule pas, ne mesure pas, ne garde pas pour elle.
Elle console, elle répare, elle accueille.
Elle donne ce que beaucoup ont oublié : le temps, la présence, la bonté simple.
Et moi, son fils, je sais la chance que j’ai.
Je la vois, à 74 ans, toujours vive, curieuse, attentive à tout.
Je vois sa force tranquille, sa sagesse, son humour tendre.
Je vois cette lumière qu’elle porte, même quand les jours se font lourds.
Et je me dis que, si un jour je deviens ne serait-ce qu’un dixième de ce qu’elle est,
alors j’aurai réussi ma vie.
✨ En guise de prière
Je terminerai par une phrase que j’aime de Maïmonide :
“Ce n’est pas par la grandeur du geste que se mesure la bonté, mais par la pureté du cœur.”
Ma mère est la preuve vivante de cette vérité.
Elle incarne la bonté pure, celle qui n’a pas besoin d’être vue.
Et chaque jour que Dieu fait, je remercie le ciel de l’avoir encore auprès de moi.
Ma mère n’est pas un miracle.
Elle est le miracle du quotidien.
📚 Mentions et sources
Maïmonide, Guide des Égarés ; Mishné Torah.
Talmud de Babylone, Kiddouchin 30b.
Proverbes juifs traditionnels.
Témoignage personnel rédigé dans une démarche de gratitude et d’hommage filial.