Le Christ n’a jamais dit Dominus vobiscum.
Il n’a pas orné les chapelles de dentelles et d’encens.
Il a crié —
au coin des rues,
dans la poussière,
au bord des larmes,
avec les crasseux, les lépreux, les putains et les rêveurs.
Et vous, fidèles aux gencives crispées,
vous momifiez sa parole dans des calices en or,
vous bâtissez des murailles autour du feu,
vous transformez le Verbe en article de loi.
En vérité je vous le dis :
vous êtes les nouveaux pharisiens.
Vos soutanes sentent le renfermé,
vos dogmes crèvent de graisse.
Le Christ n’a jamais parlé de Nation,
de Race,
de Pureté.
Il est l’étranger, le métèque, l’homme sans papiers.
Et vous le rejetez à la frontière,
en murmurant le Credo entre deux flashballs.
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Simone Weil l’a vu :
“Dieu est dans l’abandon.”
Dans le cri.
Dans la main qui saigne en tendant du pain.
Mais vous,
vous l'avez recousu à l’uniforme,
vous l’avez enrôlé chez les croisés,
vous l’avez crucifié une deuxième fois
dans un silence romain.
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Je dénonce l’hostie trop blanche.
Je brûle les missels extrémistes.
Car ce que vous appelez “Tradition”
n’est qu’une sclérose du souffle.
Un moignon gelé du cœur.
Le Christ n’est pas un emblème,
il est un volcan.
Il est dehors.
Avec les migrants qu’on noie,
les femmes qu’on bâillonne,
les enfants qu’on dresse à coups de Bible.
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Vous priez pour l’ordre —
Lui prêche la justice.
Vous priez pour la famille —
Lui embrasse l’orphelin.
Vous priez pour la nation —
Lui est né sans terre.
Et dans ses yeux, aujourd’hui,
il n’y a pas de douceur.
Il y a la colère.
Une colère nue,
brute,
ardente,
qui dit :
“Éloignez-vous de moi, Satan.”
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Le Christ est vivant,
mais pas dans vos églises barricadées.
Il marche —
avec les affamés,
les insultés,
les transfiguré.es par la souffrance
et l’espérance nue.
Et il reviendra,
non pas pour juger,
mais pour libérer.
Non pour régner,
mais pour retourner la table,
casser l’autel,
détruire la façade des temples bâtis par l’orgueil et la peur.
Il dira : “Détruisez ce temple !”
Et en trois jours,
sans dorures, sans dogmes, sans trône —
il le rebâtira
dans la chair des vivants,
dans les yeux des humiliés,
dans chaque geste d’amour plus fort que la loi.
Car le vrai temple,
ce n’est pas la pierre figée.
C’est le corps en lutte.
C’est la parole nue.
C’est le feu qu’on allume
dans le noir des empires.
Il redonnera de la peau
à vos cathédrales ossuaires.