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Billet de blog 6 juillet 2022

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Méditation: Que l’homme n’est donc qu’un balai

mais que j’eusse préféré qu’il eût été une roue.

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Heidegger a posé la question: « Qu’est-ce qu’une chose? »  -die Frage nach dem Ding-, et, jusqu’à  plus ample informé, personne ne l’en a remercié. C’est bien naturel. Si quelqu’un demandait: « Qu’est-ce qu’une roue? », le monde redeviendrait étrange. Essayez! Sur le mail, une partie de pétanque suit son cours. Toujours quelque chose suit son cours, de cela, vous pouvez être assuré. Mais l’entrechoc des boules d’acier, curieusement striées, ne vous empêche pas de surprendre quelques bribes de la conversation de trois personnages en lesquels il ne vous fut pas malaisé de reconnaître les Rois Mages, deux assis face à face à califourchon sur le muret, le troisième adossé au tronc de l’orme, content que vous êtes de pouvoir répondre mentalement au docteur Schweitzer, qui se demandait ce qu’ils avaient bien pu faire, une fois de retour de Béthléem: palabrer. Des Orientaux! « Dieu », entendez-vous dire Gaspard, « est une paire de lunettes sans verres, à laquelle manque la monture ». Gaspard a lu Georg Christoph Lichtenberg, voilà au moins un point solidement établi. « Sans compter », croit bon d’ajouter Melchior, « que Dieu est sporadique, parmi d’infinies éternités; il n’existe ni partout, ni toujours; si bien qu’il y a plus d’antimatière Dieu que de matière Dieu, un peu comme dans la réalité ». « La noirceur », conclut Balthazar, « qui, au travers des lunettes, met au point sur la sporadicité, a donc un certain aperçu du Cosmos. Eh bien, mes amis, c’est cette myopie en soi qu’on appelle aussi l’univers ». (Un temps). (Un temps long). Je crois le moment bien choisi; je me lève (très péniblement) et me joins à eux. Rien là que de très naturel. « Qu’est-ce qu’une roue? », dis-je, jouant mon atout. Bien sûr, vous, qui me lisez (peut-être!), vous ne saisissez (pas encore) la pertinence de cette question qui, en vérité, est très ancienne, et qui, bien que restée, jusqu’à ce jour,  sans réponse radicalement satisfaisante, malgré un nombre incalculable de radiales, est la clef de tout. En esprit et en vérité. C’est Balthazar qui s’y colle, pour l’excellente raison qu’on dit « au hasard, Balthazar ». Il tire un papyrus de sa poche et lit: « Je regardai alors les êtres, et voici qu’il y avait une roue à terre, à côté des quatre êtres. L’aspect des roues était comme le scintillement de la chrysolithe; les quatre avaient la même forme; leur aspect et leur fonctionnement étaient comme si une roue se trouvait au milieu de l’autre [ce point est essentiel, NdlR]. Dans leur marche, elles allaient suivant leurs quatre côtés, elles ne pivotaient pas dans leur marche. Quant à leurs jantes - elles avaient de la hauteur et un aspect effrayant - quant à leurs jantes, elles étaient couvertes d’yeux qui étaient autour de toutes les quatre. Quand les êtres avançaient, les roues avançaient à côté d’eux et quand les êtres s’élevaient de terre les roues s’élevaient. Là où l’esprit devait aller, ils allaient [second point capital, NdlR] et les roues s’élevaient conjointement avec eux, CAR L’ESPRIT DES ÊTRES ÉTAIENT DANS LES ROUES [je souligne; troisième point fondamental, NdlR]. Quand ils avançaient, elles avançaient, quand ils s’arrêtaient, elles s’arrêtaient, quand ils s’élevaient de dessus la terre, les roues s’élevaient conjointement avec eux, CAR L’ESPRIT DES ÊTRES ÉTAIENT DANS LES ROUES ».* Merci, Balthazar, dis-je; c’est très beau. « Et surtout, c’est très vrai », ajouta Melchior, « c’est l’exactitude même ». « Rien à ajouter », répondis-je, « en ce qui concerne les jantes couvertes d’yeux; c’est l’essence même de notre modernité. Mais je voudrais quand même soulever deux problèmes. 1° pourquoi les êtres avançaient-ils, faisant avancer les roues à côté d’eux? À cela, le texte lui-même répond: « là où l’esprit devait aller, ils allaient ». D’où ma seconde question. Je conçois parfaitement que le prophète Ézéchiel ait VU tout cela; mais comment se fait-il qu’il SACHE que l’esprit des êtres étaient dans les roues? ÇA, il ne pouvait pas le VOIR! {encore que…} ». -« Il faut donc », dit Gaspard, qui ne s’était encore pas exprimé sur ce dossier, « il faut donc qu’Ézéchiel l’ait appris D’AILLEURS ». (À SUIVRE) *Ézéchiel 1: 15-21 (vers ~597 av. J.-C.)

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