Mille fois répété un mensonge n’en devient pas une vérité.
Dans sa page mise en ligne le 18/07/2022, « 11 ans après la crise post-électorale en Côte d’Ivoire : des victimes oubliées, une justice sacrifiée », la Fédération Internationale pour les Droits Humains, la FIDH, affirme d’emblée :
« La crise de 2010-2011 a débuté lorsque le président sortant, Laurent Gbagbo, a refusé de céder le pouvoir au Président élu Alassane Ouattara à la suite des élections présidentielles de novembre 2010. Au cours des cinq mois de violence et de conflit armé qui ont suivi, au moins 3 000 personnes ont été tuées et plus de 150 femmes violées. Les forces armées des deux côtés ont parfois pris pour cibles des civil·es sur la base de leurs affiliations politique, ethnique ou religieuse. »
On est alors invité à télécharger le rapport de juillet 2022, « Côte d’Ivoire : de la justice sacrifiée au nom de la « réconciliation » à la justice instrumentalisée par le politique », où page 7 avec la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (Lidho) et le Mouvement ivoirien des droits humains (MIDH), la FIDH réaffirme :
« Les 31 octobre et 28 novembre 2010, le corps électoral ivoirien s’est massivement mobilisé pour élire le président de la République. Alors que les résultats du premier tour ont été largement acceptés, ceux du second tour, opposant Laurent Gbagbo, candidat de la Majorité présidentielle (LMP), président sortant, et Alassane Ouattara, représentant le Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), a donné lieu à une forte contestation. Cette situation était consécutive au refus du camp de Laurent Gbagbo d’accepter sa défaite face à Alassane Ouattara, proclamé vainqueur par la Commission électorale indépendante (CEI) et reconnu comme tel par la communauté internationale dont le représentant avait été accepté par les parties comme certificateur des résultats. »
20 Minutes écrit de son côté le 07/08/22 :
Laurent Gbagbo, 77 ans, définitivement acquitté en mars 2021 de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye où il avait été transféré fin 2011, est rentré dans son pays le 17 juin 2021 avec le feu vert d’Alassane Ouattara. Sans jamais avoir été inquiété depuis son retour, il restait néanmoins sous le coup en Côte d’Ivoire d’une condamnation à 20 ans de prison pour « le braquage » de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pendant la crise de 2010-2011. Celle-ci était née de son refus de reconnaître la victoire de Ouattara à la présidentielle de fin 2010 qui avait entraîné des violences ayant fait quelque 3.000 morts jusqu’à l’arrestation de Gbagbo à Abidjan en avril 2011.
Et Le Dauphiné Libéré avec l’AFP,le 07/08/2022, comme bien d’autres médias encore:« Sans jamais avoir été inquiété depuis son retour, il restait néanmoins sous le coup en Côte d'Ivoire d'une condamnation à 20 ans de prison pour « le braquage » de la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO) pendant la crise de 2010-2011.
La crise était née du refus de Laurent Gbagbo de reconnaître la victoire d'Alassane Ouattara à la présidentielle de fin 2010 qui avait entraîné des violences ayant fait quelque 3 000 morts jusqu'à l'arrestation de Laurent Gbagbo à Abidjan en avril 2011. »
Pour rappel, les résultats donnant la victoire à Alassane Ouattara furent annoncés hors délais par le président de la Commission électorale indépendante flanqué des ambassadeurs de France et des États-Unis sous protection militaire au QG de campagne du candidat Ouattara, les organismes et personnalités censés superviser le processus électoral refusant tout recomptage des voix (cf.1).
Bref, depuis onze ans, les médias « mainstream » reprennent en boucle cette contre-vérité du prétendu « refus de Laurent Gbagbo » et inscrivent dans la boue de l’histoire ce mensonge originel conçu par les chefs d’orchestre néocoloniaux, refrain répété à l’envi par tant de médias francophones, serviles ou paresseux, ainsi que certaines ONG.
Non pas que Gbagbo eût été entouré de gens tous d’une probité exceptionnelle et d’une non-violence à toute épreuve. Mais dès le 11 avril 2011 – date de ce qu’il convient d’appeler un coup d’État installant Alassane Ouattara au pouvoir – ce « postulat du refus » a été imposé pour écarter un véritable procès à la CPI, celui d’Alassane Ouattara et de ses principaux affidés, politiciens et chefs de milices, qui soutenus par la France et la Françafrique cherchaient à faire tomber Laurent Gbagbo depuis son élection en 2000.
Ce “postulat” a contribué au fiasco d'un procès politique à la CPI, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ayant finalement été acquittés après une dizaine d’années de « déportation » et d'emprisonnement à La Haye.
Dans l’attente de « la preuve du contraire », ce mensonge mille fois répété n’est pas devenu vérité…
André Prochasson, le 11/08/2022.
Documents
(1) Parmi les très nombreuses ressources documentaires, on peut consulter la vidéo « Laurent Gbagbo dans le tourbillon du Golfe de Guinée » (février 2011) notamment à partir de 25’. Le « point d’orgue » se situe vers 35’30’’ avec la journaliste correspondante de France 24 à Abidjan qui relate, sidérée, l’annonce des résultats en présence des deux ambassadeurs !
Allocution du Président Gbagbo à la CPI, 28 février 2013
à partir de 7’28’’
« Mme la Procureure a dit une phrase qui m’a un peu choqué en disant que « nous ne sommes pas là pour voir qui a gagné les élections et qui ne les a pas gagnées ». Mais on ne peut pas […] débattre de la crise postélectorale et ne pas savoir comment les élections se sont passées, qui a gagné les élections, parce que c’est celui qui [ne] les a pas gagnées qui a [inaudible] des troubles. Je crois que c’est ça la logique. La question est là : qui a gagné les élections ? Et quand j’ai demandé qu’on recompte les voix, ce n’était pas une voix en l’air ; [évoquant les documents remis à la CPI] 100 000 voix ajoutées à Bouaké à mon adversaire.
Madame, c’est ça le fond de la question »
9’18’ :
Suit un rapide historique des tentatives de déstabilisation depuis l’élection en 2000 de Laurent Gbagbo, qui enchaine :
« Nous avons tout fait pour que la discussion avance »
[…]
« Nos États sont fragiles. Et chaque fois qu’un chef d’État européen ou occidental me disait « Faites la démocratie en Afrique », je lui disais « Nous avons besoin de la démocratie non parce que vous, vous le dites, mais parce que nous-mêmes nous en avons effectivement besoin pour construire nos États. »
[…]
Le Président aborde le « point d’orgue » évoqué ci-dessus.« La démocratie c’est le respect des textes ! A commencer par la plus grande des normes en droit qui est la Constitution. Qui ne respecte pas la Constitution n’est pas démocrate.
Madame, c’est parce que j’ai respecté la Constitution qu’on veut me mener ici. »
Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé seront définitivement acquittés le 31/03/2021…