Nous avons l’habitude de voir après tout évènement électoral en France et ailleurs, des programmes télévisés, où les participants du parti vainqueur expriment leur satisfaction pour la confiance reçue et expliquent à quel point ils se sentent engagés pour appliquer ce que le peuple leur a demandé (leurs propres promesses électorales). Par ailleurs, ceux qui ont perdu, trouvent toujours le moyen de montrer qu’ils ont quand même aussi gagné (c’est rare qu’il y ait des perdants avoués), même si ce n’est pas sur les mêmes points ou de la même manière que leur concurrents politiques, les vrais vainqueurs. C’est le jeu des chiffres qui envahit les plateaux de télévision et la presse en général ; chiffres qui sont transmis par la suite souvent sans vérification de la source.
Quant aux évènements de la Révolution Pacifique en Catalogne, le Président élu du gouvernement catalan, Carles Puigdemont a donné les résultats officiels du référendum du 1er Octobre, en disant qu’il les transmettrait, comme il se doit en toute démocratie, au Parlement catalan.
- Les résultats officiels :
Liste de votants : 5 313 564
Voix validées : 2 286 217
Participation : 43.03 %
OUI : 2 044 038 (90.18%)
NON : 177 547 ( 7.83 %)
Nul : 19719 ( 0.86 %)
BLANC : 44913 ( 1.98 %)
Monsieur Puigdemont n’a pas donné les informations complètes le lendemain du scrutin qui incluaient tous les votants qui sont parvenus à franchir les barrières et les menaces d’amende ou de prison et ont vu leur numéro national d’identité inscrit dans le bureau, ils ont donc déposé leur voix. Ils étaient 3 056 217. Ceci nous amène à identifier un tout nouveau type de voix dans une démocratie : « les voix volées par la Guardia Civil et la Police de Madrid » quand ils ont emporté des urnes par la force en utilisant la violence que nous avons vue contre les citoyens qui protégeaient ce qui leur était précieux. Il est égal au nombre d’enregistrés (ayant effectivement déposé leur voix) – le nombre de voix dont le bulletin a pu être conservé et compté (2 286 217), c’est-à-dire 770 000 voix, « volées par l’Etat espagnol », dans ces fonctions de garant de la paix et de la Constitution de 1978 d’après le Tribunal Constitutionnel qu’il a lui-même nommé.
- Les résultats réels :
Maintenant que nous connaissons les chiffres réels, le tableau devient le suivant :
Liste de votants : 5 313 564
Voix émises : 3 056 217
Participation : 57.52 %
Volés par la police : 14.49 %
Bulletins sauvegardés 2 286 217
OUI : 2 044 038 (90.18%)
NON : 177 547 ( 7.83 %)
Nul : 19719 ( 0.86 %)
BLANC : 44913 ( 1.98 %)
Ceci amène la participation réelle à 57.52 % et le nombre de la nouvelle classe « bulletins volés » à 14.49 %. Il s’agit des voix des citoyens qui avaient voté les premiers en grande partie. Ceux qui avaient passé la nuit pour protéger les bureaux de vote avec leurs familles et amis dont on peut penser que le pourcentage de OUI était égal ou supérieur à celui compté sur le nombre total des voix comptabilisées. Ceci nous amène aux estimations et constatations suivantes :
Liste de votants : 5 313 564 (constaté)
Voix émises : 3 056 217 (constaté)
Participation : 57.52 % (constaté)
Ne sont pas allés voter 42.48 % (constaté)
Volés par la police : 14.49 %
Bulletins sauvegardés 2 286 217 (sous-population comptabilisée)
Estimations sur les voix effectivement exprimées (déposées dans les urnes):
Si nous tenons compte des pourcentages retrouvés sur les bulletins sauvegardés que nous considérons une sous-population représentative de la population totale de 3 056 217 de voix effectivement exprimées, nous obtenons les estimations des voix suivantes (nombre de voix et (% des inscrits)):
OUI 2 756 245 voix (51.87 %)
NON 239 410 voix ( 4.51 %)
NULS 26 360 voix ( 0.50 %)
BLANCS 60 562 voix ( 1.14 %)
Tout d’abord le risque d’erreur de ces chiffres est minime au vu de la taille des échantillons analysés ; bien inférieur au p<0.05 habituellement admis en statistique comme significatif et permettant de rejeter « l’hypothèse nulle ».
Pourquoi ces informations peuvent – elles avoir une certaine importance ?
Vous pourrez me dire que je suis en train de faire à mon tour le « jeu de chiffres ». Et je peux l’admettre. Une partie des chiffres que je vous donne est une estimation. Mais d’autres sont des chiffres constatés et admis par tous et nous permettent d’affirmer sans erreur que ce n’est pas la participation qui était de 42 % ; mais c’est justement le contraire, ce que l’on appelle « la majorité silencieuse » dans tous les journaux d’aujourd’hui même, que représente le 42.48 % de la totalité de la population recensée en Catalogne avec droit de vote. Si nous imaginons le scénario le plus défavorable pour les défenseurs de l’indépendance, où tous ceux qui n’ont pas voté, sans exception, auraient voté NON (rien n’est moins sûr, car il y a beaucoup de gens partisans de l’indépendance, surtout âgés ayant souffert des violences de la guerre et de la post-guerre franquiste, qui au vu des excès de la Guardia Civil et la Police de Madrid ne sont pas allés voter), le OUI l’aurait inexorablement emporté à la majorité absolue (51.87% de la totalité des inscrits), même avec un 100% de participation (ce qui aurait été un succès démocratique joli mais improbable).
Je voudrais éviter une fois de plus la manipulation des résultats dans le but de donner l’image recherchée par la presse dominante s’imposant dans le silence de l’ignorance par désinformation. Un exemple : Un journaliste du Monde écrivait encore récemment (juste avant le 1er octobre 2017) qu’aux dernières élections au Parlement catalan les séparatistes n’avaient obtenu « que les 47.61 % des voix, alors que les espagnolistes en Catalogne avaient obtenu le 52 % ». Ces chiffres sont manifestement faux, car les 3 partis espagnolistes (Ciutadans, Parti Socialiste et Parti Populaire) cumulaient exactement les 38.95 % des voix (et non pas 52%, source : les résultats officiels). Le parti catalan de PODEMOS, « Catalunya sí que es pot » s’était bien déclaré favorable au droit à voter et il a montré des divisions internes pour savoir s’il fallait voter OUI ou NON à ce référendum. Il est à noter qu’au vu des résultats du 1er octobre, une majorité des « Catalunya sí que es pot » a voté OUI à l’indépendance de la Catalogne sous forme de République.
La froideur des chiffres montre que les Catalans en faveur de l’indépendance ne sont pas une minorité. Que ce que l’on appelle la « majorité silencieuse » pour laquelle l’Etat espagnol prend prétexte pour envoyer la Guardia Civil et agir violemment pour « les protéger », n’est pas « majorité » et elle n’a jamais été « silencieuse ».
Majorité suppose être plus de la moitié, ce qui malgré tous les efforts officiels dans les chiffres communiqués, est loin d’être atteint. Silencieuse suppose de ne rien dire. Hors, elle a toujours eu ses représentants dont la voix a été bien amplifiée par l’Etat et par ailleurs, fort heureusement elle s’est exprimée ce dimanche avec les invités de toute l’Espagne venus grandir leurs rangs. Cependant, malheureusement, les orateurs ont traité les membres du gouvernement catalan de « présumés criminels » (l’ex- procureur Carlos Jiménez Villarejo) et les slogans qu’ils criaient n’étaient pas tout à fait en accord avec leur prétendue devise de paix : « Puigdemont en prison » ou « il faut arrêter l’autonomie », ou encore « il faut faire prévaloir la constitution : pas de vote !».