Madame brunocinoche ou l’un et l’autre
Je suis née en 1964
Mes parents, enfants de la télé, avaient cette habitude, désormais déconseillée, de manger à table devant la télé.
Nous mangions au rythme du monde ou devant les pitreries du « petit reporteur » ou d’autres programmes
La maison vivait devant ce bocal intarissable, dont les propos tenaient lieu de vérité immanente
Mon premier souvenir, plutôt l’un de mes premiers souvenirs, sera ce feuilleton que j’ai jamais vu
alors que j’étais bien installée en bout de table face à la lucarne
une histoire de sous-marin
je crois que c’était la guerre
dans un fond bleu, une équipe d’hommes soudée dans cette prison de métal essayant de survivre
le sous-marin monte et descend avec beaucoup de bulles
parfois il descend très profond, la carcasse crise, les joints souffrent, l’eau transpire de partout, les hommes aussi
le sous-marin fait bip bip bip
un cercle balaie le fond, le radar
des tonneaux délestés menacent d’envoyer tout l’équipage par le fond
les bulles de descentes ,de remontées
les bips
une mort outremer
le bip bip
le bip bip est mon seul souvenir
je tenais mon carré de serviette comme écran de protection devant mes yeux
mon premier souvenir télévisuel d’image est un feuilleton que je n’ai jamais vu sauf par la transparence d’une vieille serviette de famille, au coton épais et aux initiales brodées
cela n’a pas affolé mes parents, étais je déjà une enfant particulière ?
Ma mère était infirmière, mon père informaticien
Les obligations de ma mère m’ont laissé longtemps seule à la maison
Mon deuxième grand souvenir était la télé pour enfant du mercredi et les sujets thématiques
Ainsi j’ai vu l’épisode de fantasia avec les dinosaures avec la musique du sacre du printemps de Stravinski
Des brontosaures broutent au milieu des prairies et des marécages
Un t rex approche et tout va à volo
Et puis ce soleil écrasant, le genre des dinosaures meurent
Je vivais dans une maison
Je sursautais au moindre bruit
Dans le jardin j’attendais le retour de ma mère
L’hiver le vent agitait les arbres
Je n’ai jamais avoué cette panique solitude
Planète interdite
Un monstre invisible tuait un équipage
La quatrième dimension
Derrière une pierre atomique les hommes n’étaient plus des hommes
Je n’aime pas
J’aime (quand j’ai envie d’avoir très peur )
les robots
les hommes zombies
les fleurs qui prennent votre visage
les cocons
les clowns
les animaux morts
les dauphins malheureux du jour du dauphin
les vilains martiens
les méchants z humain
le noir
madame brunocinoche est mariée à monsieur brunocinoche
nous nous aimons
nous avons notre histoire de couple
un jour Bruno s’est fait une fête de voir avec moi « casino » de Scorsese
le truc qui montre comment bousiller une personne, qu’il faut de la méthode et de l’application et un peu de temps devant soi
Bruno se souviendra toujours du nombre de noms d’oiseaux crachés à la sortie, heureusement, nous étions à Paris 6eme et le tout se termina à la rhumerie
Bruno fait d’excellentes chroniques (voir sur overblog les chroniques de brunocinoche)
ce soir se sera Ernest et célestine !