Je voudrais revenir sur la genèse du combat mené par le notariat, dans toute ses composantes.
On a entendu tout… et le reste… alors posons-nous deux minutes, juste pour essayer de comprendre.
En Juin 2014, Monsieur MONTEBOURG, alors ministre de l’Economie a saisi l'Autorité de la concurrence, lui demandant de se pencher sur les missions et les tarifs de certaines professions juridiques réglementées, dont la mienne, le notariat.
Le 10 juillet 2014, Monsieur MONTEBOURG promettait de rendre 6 milliards d’euros de pouvoir d’achat aux français, en appuyant ses affirmations sur un rapport de l’IGF commandé par Monsieur MOSCOVICI.
Monsieur MACRON a, dès sa prise de fonction, démenti le fait que la réforme des professions réglementées puisse rendre 6 milliards de pouvoirs d’achat à nos concitoyens, mais qu’une réforme était nécessaire.
Le notariat ne s’est jamais opposé à une réforme, bien au contraire, mais de manière concertée.
Nous avons souvent été vilipendés, traités de nantis, de rentiers, de profession désuète, une sorte de résurgence de l’ancien régime, d’infâmes lobbyistes…
Il y a quelques temps encore … On a pu lire que les « notaires » ont manifesté lorsque ce sont « les salariés du notariat », ou encore, qu’à « AUDINCOURT, les notaires ont perturbé le meeting de Monsieur VALLS » quand ce sont nos salariés… reconnaissez que ce n’est pas la même chose, que la signification et la portée ne sont pas les mêmes!
Et n’allez pas imaginer que nos salariés n’agissent pas de leur propre chef, ce serait leur faire injure, faire injure à leur combat. Croyez-moi, ou plutôt allez les rencontrer, Ils sont conscients des conséquences de la réforme telle qu’elle est envisagée.
J’ai depuis quelques mois la sensation qu’il faut, en cette période où la crise s’est invitée durablement, une victime expiatoire, un habit peu aisé à enfiler… Ça gratte un peu aux entournures !
Lors des débats devant l’Assemblée Nationale, Monsieur CAULLET s’est déclaré surpris de la vision « obsidionale » des professions réglementées… mais il ne s’agit pas d’une vision obsidionale, il s’agit une vision réaliste des conséquences de la loi.
La profession a fait une étude d’impact, qualifiée par Monsieur MACRON de partisane au prétexte qu’elle n’a pas été menée par un organe dit « indépendant ». Monsieur MACRON n’envisageant de réaliser une étude d’impact qu’après le vote de la réforme... !
Cette étude d’impact risque fort de démontrer, à l’instar de celle effectuée par le sénat suite à la suppression des avoués et rendue publique en août 2014, que les effets sont … très loin de ceux qui étaient attendus, voire négatifs.
Mais vouloir faire une étude d’impact à postériori … n’est-ce pas prescrire un traitement sans avoir au préalable posé un diagnostic, sans avoir jamais rencontré le malade !
Mais surtout que penser du fait que l’Assemblée Nationale ait décidé que la question de la réforme des professions réglementées méritait qu’une mission d'information soit diligentée sous la présidence de Madame UNTERMEIER.
Oui, que penser du fait que le Ministre de l’Economie n’ait pas attendu les résultats de cette mission, dont le rapport, fait rare, a été voté à l’unanimité pour finaliser le volet relatif aux professions règlementée ? Cela constitue pour moi un déni de démocratie, mais personne ne s’en est ému…!
Alors oui, effectivement le notariat s’est exprimé, ces hommes et femmes qui font partie « d’un ordre silencieux » ont élevé la voix avec l’espoir de se faire entendre.
Nous voulions alerter sur le risque de voir l’un des derniers remparts à l’invasion du droit anglo-saxon être brisé, sur le risque de voir apparaître un droit low-cost… cela a été interprété comme une défense corporatiste… C’est une erreur, le droit anglo-saxon cherche à entrer dans notre pays de droit continental, et ce pour le profit de quelque uns… fort peu nombreux.
Dieu que la mémoire de certains est courte… avons-nous déjà oublié la crise des subprimes de 2008/2009, dont Robert J. Shiller, professeur d’économie à l’université de Yale avait dit qu’elle n’aurait sans doute pas eu lieu si les USA avait connu notre notariat.
Pourquoi croyez-vous que la réforme préconisée par le rapport DARROIS ai été abandonnée à l’époque ?
Lorsqu’ensuite nous avons voulu alerter sur le risque que la réforme faisait peser sur l’emploi … nous nous sommes fait traiter d’affabulateurs…
Nous avons bien compris que le reproche qui nous est fait est de vouloir défendre notre profession, notre droit nos employés… mais honnêtement avez-vous déjà vu un condamné monter en chantant sur l’échafaud ?
Dire que nous nous sommes habitué à être l’objet de ce procès instruit uniquement à charge serait exagéré , mais nous faisons face, continuant inlassablement à dire que nous étions favorable à une réforme concertée mais qu’à ce jour il n’y avait pas eu de concertation. Que le projet actuel était mortifère et qu’il était incompréhensible que notre ministre de tutelle, Madame le garde des sceaux, ait été purement et simplement mis à l’écart… ou qu’elle se soit volontairement mise à l’écart, face à la promesse de plus haute fonction.
Nous continuons et nous continuerons à rappeler les conséquences dramatiques que ce projet de loi va avoir… en vain ou peut-être pas… un jour nous serons entendu, j’en ai l’espoir !
Monsieur Macron, voulant à tout crin nous faire passer pour d’infâme lobbyistes, n’a pas hésité un instant à annoncer être l’objet de « menace de mort » de la part notamment d’un confrère qui ne faisait que participer à la campagne de sensibilisation organisée par l’ASPN (association de sauvegarde et de promotion du notariat) sur les risques de « casse sociale » de la réforme. Des dizaines de photos ont été envoyées sur les réseaux sociaux… cette campagne avait volontairement été faite sur le ton de l’humour avec la volonté de frapper les esprits. Mon confrère y faisait référence à ses origines corses… le magazine Marianne a repris cette seule photo sous le titre «Notaires : gare aux balles perdues »... Monsieur MACRON y a vu une menace de mort à son encontre…. Alors que la seule arme avec laquelle il était menacé était l’humour, certes au second degré … comment peut-on imaginer un seul instant qu’il s’agisse d’autre chose que d’humour ?
A ce jour il devient évident que l’humour est une arme à manipuler avec précaution !
Cet humour peut ne pas plaire, on peut le trouver excessif (ce qui était le but) déplacé, soit, mais il ne s’agit que d’humour…. Comment peut-on y voir une menace de mort ?
Bref pour nos hommes politiques toute manipulation est bonne à prendre. C’est consternant !
La presse à ce jour s’émeut qu’une société comme FIDUCIAL, société financière puissante et… semble-t-il gourmande, puisse avoir manipulé nos hommes politiques… en la personne de Me POIROUX avocate se présentant comme défenseuse des diplômés notaires, lors de son audition devant la commission UNTERMAIER… un enfumage de première classe …. c’est comme si une grande surface se présentait comme le défenseur des éleveurs de vaches laitières !
En réalité, il ne s’agit que d’ouvrir la porte au droit anglo-saxon… moins de protection pour un coût toujours plus élevé. Les citoyens ne s’y retrouveront pas et le sceaux de l’Etat aura été galvaudé.
Le tarif revisité aura pour conséquence la mort du maillage territorial, la libre installation alliée à l’ouverture des capitaux aux sociétés financières entraînera une course au profit dont nous ne voulons pas.
Voilà le simple rappel que je voulais faire.
Certains y verrons une défense corporatiste… courte vue… je leur donne rendez-vous dans quelques années !