Ce titre peut – et veut – choquer : car, comment faire pire ? Pensez à Hitler, Staline, Pol Pot … ou même à d’autres crimes de masse contemporains, cela ne manque pas. On peut toujours faire pire – ou plutôt, toute comparaison est vaine dans ce domaine. Quelle comptabilité macabre pourrait faire sens ?
(Certains penseront, comme d’ailleurs la plupart des gouvernants de grandes puissances, que Daesch est plus à craindre. Il est vrai que si le nombre de morts qui lui est imputable n’arrive pas à la cheville des massacres commis par le dictateur syrien, Daesch peut sembler plus dangereux parce qu’il est en mesure de gagner des adeptes – et aussi, c’est moins avouable, parce que certains de ses crimes nous visent, nous.)
Mais je veux parler de tout autre chose. Ce que nous avons le plus à craindre, et ce sur toute la planète, c’est la dictature de la finance mondiale. Elle est beaucoup, beaucoup plus puissante qu’aucun tyran ne l’a jamais été. Elle est beaucoup plus meurtrière aussi. Seulement ses dégâts sont moins spectaculaires.
Les méfaits de la finance sont innombrables. Les manœuvres du capital détruisent des entreprises et des emplois par centaines de milliers, ce n’est un secret pour personne. La poursuite effrénée du profit à court terme pollue l’air, l’eau, tout le vivant. Nous mangeons des pesticides, sommes infiltrés par les perturbateurs endocriniens. Les terres deviennent stériles, les métaux lourds envahissent tout. Les déchets plastiques, qui forment un continent dans le Pacifique, sont également ingérés, y compris en particules microscopiques, par toutes les créatures marines – et par nous, au bout de la chaîne alimentaire. Nos déchets contenant du métal sont envoyés dans les pays les plus pauvres pour y être démantelés et récupérés, empoisonnant au passage les habitants prêts à tout pour manger. Le vivant est confisqué par des brevets. Le commerce des armes se porte bien, merci, et s’il faut fomenter des conflits pour écouler la marchandise, c’est un jeu d’enfant. Le trafic d’organes, le trafic d’êtres humains, la drogue, tout cela répond à la même logique et il n’y a désormais plus de frontières – ou elle est très poreuse – entre les activités légales et les autres. L’énumération des dégâts du capitalisme financier mondialisé serait sans fin. Et tout ne fait que s’aggraver.
Pourtant, bien que tout cela soit connu, et que tout le monde s’accorde à reconnaître que le pouvoir de la finance est devenu trop grand, on s’en accommode. Pourquoi ?
En ces temps de campagne électorale, essayant de promouvoir le projet de la France Insoumise porté par Mélenchon, j’ai été saisie par les réactions de nombre de mes interlocuteurs. Réduire le pouvoir de la finance ? Cela leur paraît tout simplement impossible. Et c’est là que ça devient encore plus effrayant. Une dictature dont la force fait que, même lorsqu’on la critique, on n’est plus capable d’imaginer la combattre, on n’ose plus tenter de se choisir un avenir, c’est la victoire suprême. La servitude volontaire, au bout du compte. Et ceux-là vont voter Macron. Pour que rien ne change, pour que tout empire.
J’espère très fort la victoire électorale de Mélenchon. Ce billet est un appel de détresse ou un cri d’espoir.