annick vignes

économiste, enseignant-chercheur, ne collectionne pas les timbres.

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Billet de blog 19 mai 2017

annick vignes

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Commentaire sur un article du Parisien «Les femmes chassées des rues Chapelle-Pajol»

La surpopulation du quartier, quasiment masculine peut créer une impression de malaise pour les femmes. L'aménagement public ou plutôt le non-aménagement public accentue le sentiment d'insécurité, avec une circulation très dense de véhicules, des carrefours et des rues difficiles à traverser, des sorties de métro trop étroites qui font qu'on a du mal à tenir sur le trottoir.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L'article ci-dessous, paru dans le Parisien du 18 mai

http://www.leparisien.fr/paris-75018/harcelement-les-femmes-chassees-des-rues-dans-le-quartier-chapelle-pajol-18-05-2017-6961779.php#xtor=AD-1481423551

a fait beaucoup parler sur les réseaux sociaux. Effectivement, se dire qu'un grand quartier parisien est quasiment interdit aux femmes (ou fréquentable à leurs risques et périls) ne peut  laisser indifférent.On ne peut imaginer la pauvre mamie de 80 ans, terrée chez elle après avoir été agressée (sexuellement) sans qu'une colère sourde ne monte en nous. 

Je me suis promenée récemment dans ce quartier (nous étions 3 femmes d'âges différents) et il ne nous est rien arrivé. Ceci ne signifie pas qu'il n'arrive jamais rien, bien évidemment. Cela prouve en tous cas, que même femme, on peut effectuer paisiblement une promenade entre le carrefour la Chapelle et la rue Pajol.  Il faut souligner toutefois que la sur-population du quartier, effectivement quasiment masculine peut créer une impression de malaise pour les femmes. L'aménagement public ou plutôt le non-aménagement public renforce ce sentiment de malaise, voire d'insécurité. Une circulation très dense de véhicules, des carrefours et des rues difficiles à traverser obligent à stationner longtemps sur des bouts de trottoir, bousculée de tout part, par des personnes (essentiellement masculines, répétons-le) qui pour la plupart poursuivent le même objectif que vous, arriver enfin à continuer leur chemin. 

La sortie de métro de la station la Chapelle est particulièrement révélatrice du non aménagement du quartier en général. Grosse station (puisqu'elle draine les voyageurs de la ligne 2 et surtout les usagers de la gare du nord), elle ne propose qu'une seule sortie, sur un côté de trottoir absolument minuscule, qui donne sur le bd de la Chapelle, constamment submergé de voitures, camionnettes, deux-roues... Inutile de dire qu'aux heures de pointe, les bousculades et les frictions se multiplient sur ce bout de bitume le plus souvent couvert de détritus.

Ce quartier, bien plus pauvre que la moyenne parisienne voit régulièrement arriver les plus démunis. Ainsi, à l'été 2016, un camp de migrants qui s'était installé sous le métro aérien a fait beaucoup parler de lui, de par son surpeuplement et des niveaux d'hygiène et de survie indignes. Ce camp venait bien évidemment renforcer l'occupation de l'espace public par une population très masculine et très nombreuses (les migrants sont pour la plupart des hommes) . Une fois ce camp détruit (on passera sur les conditions d'expulsion), l'espace précédemment occupé a été totalement grillagé (pour empêcher l'installation de nouveaux camps) renforçant encore la pénurie d'espace public et l'aspect hostile du paysage urbain. 

 L'article du Parisien dénonce certainement un état de fait. Une population masculine dense et parfois désoeuvrée, occupant l'espace public car disposant pour la plupart de peu ou pas d'espace privé (mal-logement, insalubrité...) peut certainement adopter des comportements déviants et de harcèlement à l'égard de la gent féminine. Ce n'est pas acceptable.  Il est indiqué dans l'article du Parisien que la police ne réagit jamais. si cela est vrai, cela  n'est pas plus acceptable. 

il me semble donc que les pouvoirs publics ont une responsabilité équivalente dans l'affaire. Le Bois Dormoy, seul poumon vert de ce quartier saturé et association citoyenne investie dans le mieux vivre et la solidarité, n'a dû sa survie qu'à une mobilisation acharnée de ses militants et de ses sympathisants. La circulation, anarchique, n'a jamais fait la tentative de la moindre régulation. L'état de délabrement, la pollution, les commerces à la sauvette font que toute personne qui peut éviter ce quartier le fait, accentuant son état de ségrégation. Voilà des années qu'on nous parle du projet de promenade Barbès/ Stalingrad, des années que rien n'est fait. 

Jounaliste du Parisien, avant d'écrire des articles dont les titres risquent de rendre jaloux Valeurs Actuelles ou Détective, vérifiez vos sources, allez voir le terrain, interrogez-vous sur le pourquoi des choses. Faites votre métier. 

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