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Billet de blog 31 janvier 2014

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Embrasement à La Réunion ?

Alors que les Lycéens manifestent contre la chaleur et que les stations service font la grève de l'essence, ça ne rigole plus dans le petit monde des poubelles et des voitures du Chaudron et du Port. On aurait même osé le Moufia. Attention, ça remonte !

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Alors que les Lycéens manifestent contre la chaleur et que les stations service font la grève de l'essence, ça ne rigole plus dans le petit monde des poubelles et des voitures du Chaudron et du Port. On aurait même osé le Moufia. Attention, ça remonte !

Depuis quelques jours, La Réunion connait quelque peu d'agitation. Les lycéens pour commencer, sur fond de bataille de calendrier scolaire insuffisamment climatique. Pour avoir eu la joie, l'honneur et l'avantage - hors saison la plus chaude qui plus est - de pratiquer un batiment scolaire du secondaire pendant les trois jours d'un séminaire, je peux témoigner de son inefficacité à évacuer la chaleur, et de la fatigue qu'on finit par éprouver à devoir rester dans une espèce de cocotte minute, même toutes fenêtres ouvertes. Bâtiments vieillots, on ne peut plus mal conçus, climatiseurs en panne et non réparés faute de moyens, c'est le quotidien de nombre d'élèves à La Réunion. Il fut un temps où les vacances d'été duraient jusque mi-février, afin de laisser passer la période la plus chaude. Mais il est vrai qu'une grosse coupure au milieu de l'année, ça n'aidait pas au dynamisme de l'enseignement. Sauf que comme d'hab, on a pris une décision sans y mettre les moyens : si on fait venir les élèves au plus chaud, faut quand même au minimum les tenir au frais. Imagine-t-on en Métropole faire venir les élèves en hiver dans un batiment non chauffé ? Sous les tropiques, cocotte-minuter les élèves ne pose aucun problème au pouvoir en place. Et si les élèves cocotte-minutés ne sont pas attentifs, c'est forcément la faute du prof à qui on a généreusement donné le rôle de soupape, alors qu'en réalité, il est cocotte-minuté comme tout le monde.

Et nos grévistes de l'essence ? Alors là, c'est la blague de la semaine : notre gouvernement, dont on désepère qu'il prenne un jour quelques décisions de gauche, vient de décider de s'attaquer aux marges des pétroliers dans nos charmants départements d'outre-mer. Ouah, incroyable ! Parce que quelque part il y aurait de l'abus. Sauf que nos gérants de stations service connaissent bien leur patron et savent que si le prix de l'essence est baissé, ce ne sont pas les pétroliers qui vont baisser leur marge. Ce sont eux qui vont trinquer et à qui on va demander des efforts. Sont-ils allés manifester devant le siège social de leur indélicat patron  ? Que nenni. Ils sont allés faire le siège du ministère de l'outre-mer pour réclamer la non publication de l'arrêté. Et pour montrer leur détermination, ils ont lancé une grève illimitée des stations services qui a commencé aujourd'hui et s'est traduite par une prise d'assaut dès l'avant-veille au soir des dites stations avant leur fermeture. En une seule journée, ils ont fait plus de deux jours de chiffre d'affaire. La grève se terminera donc samedi, après que La Réunion ait entre temps perdu la tête à coup de poubelles et voitures incendiées.

Bon, n'étant pas Madame Soleil, bien qu'habitant sous les tropiques, je peux me tromper et la grève peut durer. J'ai juste de gros doutes. Et aucune machine à voyager dans le temps.

Nous voilà donc dans une ambiance sociale tendue. en plein été, avec des brasiers en ville sans aucun doute pour illuminer nos soirées. Au passage, on pille un peu. Ou du moins on essaie. Alors peut-on parler d'embrasement ? Du point de vue de quelques poubelles et voitures, oui. Clairement. Mais si l'embrasement ce n'est que ça, je ne voudrais pas vous chagriner les gars, mais, la dernière fois, on a fait semblant de s'intéresser à vous pendant quelques jours et tout est rentré dans l'ordre. Rien ne changera avec quelques cris ici ou là. Faut qu'on s'y fasse : on ne les intéresse pas. Kissa ? Ceux qui nous gouvernent pardi ! Moi franchement, je ne sais pas ce qu'il faut faire pour leur faire bouger un cil. Mais du moment qu'ils sont au pouvoir, c'est comme si on n'existait plus. Ça nous considère de haut comme des empêcheurs de profiter en rond. On les emmerde, carrément. On gène leur tranquilité. Mais pas leur quotidien. Nos histoires ne les touchent pas. Et c'est ça le nerf de la guerre. Il faut pouvoir toucher. Et croyez-moi, le jour où ils sentiront le danger, là ils vont se bouger. En attendant, ils rigolent. Et nous on pleure.

Addendum du dimanche 2 février : la grève des pompistes est finie. Reprise dès cet après-midi pour certains. Retour à la normale dès demain.

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