anouka

Abonné·e de Mediapart

57 Billets

0 Édition

Billet de blog 18 juillet 2018

anouka

Abonné·e de Mediapart

Là, vous me croyez ?

Oui, je pensais déjà écrire sur le thème des ogres nouveaux, revenir à l’ogre de Perrault. Et puis, j’ai lu –même si je le savais déjà, hélas, le cœur à l’envers- Trafic (ou Traffic) d’enfants, de Villaume. Les mots sont venus, d’eux-mêmes. Pour dire l’ampleur des crimes contre l’humanité, l’ampleur du déni, de l’inconscience ou de l’aveuglement de nos dirigeants.

anouka

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Là, vous me croyez ?

Les ogres sont de retour ! De retour ?

Oui, ils sont de retour. Ceux du petit Poucet ? Ceux des contes ? Oh ! Ceux-là ? C’était juste pour jouer à se faire peur. Et Perrault, lui, avait déjà compris qu’il fallait le punir, l’ogre, pour le tromper, pour profiter de sa bêtise afin qu’il mange ses propres enfants et qu’enfin le plus petit, le plus malin, ait sa revanche. Déjà assez perverse, cette histoire, aux multiples lectures. Que les adultes s’efforcent d’adoucir. Les contes, les contes, c’est pour les enfants. Vraiment ?

Mais, là, nous ne sommes plus des enfants. Les ogres, les vrais, en chair et en os, sont de retour. Vous les connaissez, vous les entendez, vous… Ces grands pantins du monde. Qui se goinfrent du sang des autres. Non ? Vous ne voyez toujours pas ? Vous pensez que c’est une histoire ? Une histoire à dormir, à endormir les enfants ?

Des ogres ? Mais non. Des justiciers ! De grands, petits, moyens et stupides justiciers. Pourquoi sont-ils là ? Pour équilibrer le monde. Enfin, le nombre. Des humains. Mais, les ogres nouveaux n’ont pas besoin de se salir les mains. Non. Ils ont une armée de pourvoyeurs, de corps, de corps à soumettre, à séduire, à engraisser, à torturer… Oui, mais, ils ne sont pas tous consommables, hélas. Il faut trier, le bon blé de l’ivraie. Si, si.

Le corps, la chair fraîche, si rentable, si consommable… Un trésor de guerre. Blanchiment d’argent ? Ah ! Oui. L’argent. L’argent qui gouverne le monde. Notre monde. Oui, mais. C’est loin le monde. Notre monde ? Celui que nous habitons ?

Oh ! Mais quelle est cette vilaine histoire ? Nous sommes des sociétés évoluées. Nous sommes au XXIème siècle. Il y a des lois. Il y a des protections. Il y a du respect. De l’humain. Un modèle. Je vous assure. Non, non. Vous rêvez, vous cauchemardez, vous confondez avec les films. Nosferatu, non ? Oh ! Quelle horreur ! Ou bien…

Non, moi je vous parle du réel, du vrai, du concret, du visible invisible, du déni d’une vaste orgie, d’une consommation, marchandisation des corps. Une orgie. Oui. Une hécatombe. Une vaste boucherie. Pour réguler le monde. Le nombre. Jamais satisfaisant.

Les ogres n’aiment pas trop la chair sombre, la chair déjà corrompue ou déjà vieillie ou salie… Non, ceux-là ne comptent pas. Ils peuvent disparaître, dans les prisons, dans les sables, dans les océans… Mais, la chair fraîche. Ah ! La chair fraîche qui passe par le ventre. Le ventre des femmes. Trop fertiles ces ventres. Qui les rend coupables. Trop d’enfants. Pas même capables de les nourrir, ces femmes. Ne vous inquiétez pas, la charité est là. Religieusement respectée, adulée. Sans elle, point de salut, pour ces pauvres âmes. Noirceur du jugement ? Non. Noirceur du délit, au nom des croyances. Dieu y pourvoira. Oui ? Il fera justice ? Il sera le secours ultime ? Dans un monde meilleur ? Parfait ? Illusoire ? Fantasmatique ? Que de vilains mots, vraiment.

Ne vous plaignez pas. Nous avons la solution. Pour vous, pour nous. Heureusement, nous sommes là, ils sont là, les ogres, les nouveaux ogres, pour réguler, consommer, jouir de la chair fraîche. Les pays pourvoyeurs, les pays consommateurs ? Oh ! Que de vilains mots.

Mais pourquoi font-ils, font-elles des enfants ? C’est la nature. Mais oui. La nature. On ne peut rien contre. Ceux qui peuvent, ceux qui ne peuvent pas. Générosité des accueillants. Les ogres. Les petits, les moyens, les grands. Les ogres puissants. Denrée précieuse, les enfants. A monnayer, les enfants. Oh ! Pas devant vos yeux, non. Les ogres sont devenus malins. Eux réceptionnent. Quoi ? Les enfants, les femmes ? Non. Quelquefois, si le cœur leur en dit. Oui, sont bien appétissants, ces petits innocents. Mais non. Pas devant vous. Non. Les ogres nouveaux connaissent les mille et un réseaux de l’invisibilité. Quelle meilleure dégustation que celle d’un repas légalement, généreusement, honorablement offert. Tout est nettoyé. L’argent propre, l’amour propre, la loi propre. Tout est propre.

Vous n’êtes pas d’accord ? Vous ne croyez pas aux contes ? Mauvais joueurs, vous êtes. Le virtuel. Bien sûr. Ça n’est que du virtuel. Ah ! Le confort et la jouissance du déni. Ah ! Le monde virtuel, en adéquation avec nos envies.

Et surtout, ne croyez pas ce que l’on vous dit. Ne croyez pas ce que l’on vous fait voir. Ne cherchez pas à passer de l’autre côté du miroir. Vous pourriez vous aveugler. Vous pourriez vous en rendre malade. Et c’est mortel. Mais, au fait. Nous sommes mortels.

Non ? Alors ?

Là, vous me croyez ?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.