Marine Le Pen, Éric Zemmour : gardiens de la pyramide
Ils se prétendent patriotes, défenseurs des “oubliés”. Mais derrière le masque populiste, Marine Le Pen et Éric Zemmour recyclent la colère sociale pour mieux maintenir l’ordre établi. Sous le vernis tricolore, ils se révèlent traîtres à la Nation, alignés sur les ennemis objectifs de la France et de l’Europe.
Marine Le Pen et Éric Zemmour prétendent donner une voix aux invisibles. Ils se posent en défenseurs du peuple contre les élites, en “anti-système”. Mais cette posture est une illusion. Leur véritable fonction est de détourner le ressentiment populaire pour le canaliser vers un exutoire inoffensif pour l'ordre établi : l’étranger, l’immigré, l’assisté. Orwell, dans 1984, avait mis en garde contre la novlangue, ce langage qui déforme les mots pour inverser leur sens. C’est exactement ce que pratique l’extrême droite contemporaine : la haine devient “préférence nationale”, l’exclusion devient “protection”, la soumission à l’ordre établi devient “liberté”. En vidant les mots de leur sens, ils détournent les colères réelles vers des impasses. Et tandis qu’ils se présentent comme champions du peuple, leurs votes disent tout autre chose. Au Parlement comme dans les hémicycles, RN et Reconquête refusent les propositions qui viseraient à améliorer la vie des précaires : hausse du SMIC, encadrement des loyers, extension des droits sociaux. Quand il s’agit de défendre les travailleurs, ils choisissent toujours le camp du patronat. Faux plébéiens, vrais gardiens de la pyramide.
La collaboration de classes
Benito Mussolini théorisait la “collaboration de classes” : l’idée que la hiérarchie sociale est bénéfique à tous, et que chaque classe doit se résigner à son rôle. Une idée reprise, sous d’autres mots, par Zemmour et Le Pen. Ils ne veulent pas abolir la pyramide des classes, mais la sanctuariser. Gramsci l’avait montré : l’hégémonie culturelle consiste à faire consentir les dominés à leur propre domination. Et La Boétie, quatre siècles plus tôt, décrivait déjà la servitude volontaire : le peuple taille lui-même la hache qui le coupe. C’est exactement la stratégie du RN et de Reconquête : récupérer les colères sociales pour en faire un ciment de servitude. Ils se nourrissent du ressentiment populaire, mais pour mieux l’empêcher de se transformer en puissance d’émancipation. Ils transforment la révolte en soumission.
La contradiction insoluble, des Mussolini de bac à sable
Leur discours se brise sur une contradiction fondamentale. Ils promettent de “renvoyer les immigrés chez eux”, mais n’osent jamais dire la vérité à leurs électeurs : ce seront alors des Français qui devront occuper ces emplois souvent sous-payés. Sans main-d’œuvre immigrée, l’agriculture, le bâtiment, la restauration s’effondrent. Faute de bras, demain on nous demandera d’occuper des postes sans rapports avec nos qualifications. Tant qu’ils n’assumeront pas cette contradiction, leur programme restera un mensonge. Car ils savent pertinemment qu'une majorité de leur électorat ne l'acceptera pas. Ce qu’ils appellent “courage” n’est que lâcheté. Le courage serait de dire la vérité : la préférence nationale n’est qu’un slogan vide. Mais cela, Le Pen et Zemmour n’oseront jamais l’avouer. Ce sont des couards.
Face à leur prudence calculée, une partie de leur électorat les juge déjà trop mous. Sur YouTube, des influenceurs d’extrême droite tiennent des propos plus radicaux, ouvertement racistes. À côté de ces pyromanes numériques, Le Pen et Zemmour apparaissent comme des “chiques molles”, incapables de dire tout haut ce que leurs partisans les plus extrêmes voudraient entendre. Et de fait, Le Pen et Zemmour ne sont pas des révolutionnaires, mais des Mussolini de bac à sable, jouant aux radicaux tout en respectant les codes du marché roi, de la classe dominante.
Patriotes… traîtres
Ils se drapent dans les couleurs de la nation, parlent de “France éternelle” et de “civilisation européenne”. Mais dans les faits, ils soutiennent les ennemis objectifs de la France et de l’Europe :
Donald Trump, dont la politique isolationniste fragilise le continent.
Viktor Orbán, champion d’un autoritarisme kleptocratique qui piétine l’État de droit.
Vladimir Poutine, dont la guerre en Ukraine menace directement la sécurité européenne.
Se dire patriote tout en s’alignant sur ces figures, c’est trahir la France. C’est se faire les agents d’intérêts étrangers, contre l’autonomie stratégique européenne. C’est réduire la patrie à un slogan, tout en vendant son indépendance réelle aux puissances qui la menacent. Ils ne sont donc pas patriotes, mais traîtres à la Nation: drapés de tricolore pour mieux dissimuler leur soumission à des puissances hostiles. Ce sont eux les anti-France.
Le piège du spectacle
Guy Debord écrivait : « Le spectacle est le mauvais rêve de la société moderne enchaînée. » Le Pen et Zemmour participent de ce spectacle : ils s’en nourrissent, ils en vivent. Leur anti-système est une mise en scène, un rôle dans le théâtre médiatique. Orwell et Pasolini convergent ici. Orwell voyait le pouvoir falsifier le langage pour étouffer la pensée. Pasolini voyait la société de consommation broyer les individus jusqu’à en faire de simples automates. Et de fait, comme l’avait pressenti Pasolini dans ses derniers entretiens : « Il n’y a plus d’êtres humains, mais d’étranges machines qui se cognent entre elles. »
Abattre la pyramide
Marine Le Pen et Éric Zemmour ne sont pas les voix du peuple, mais ses fossoyeurs. Faux plébéiens, ils sont les gardiens de la pyramide sociale. Patriotes autoproclamés, ils sont en réalité traîtres à la Nation, alignés sur les ennemis de la France et de l’Europe. Leur langage relève de la novlangue orwellienne. Leur rôle est de recycler la colère pour mieux la neutraliser, de transformer la révolte en ressentiment stérile, de maintenir la servitude volontaire. Le peuple n’a rien à attendre de ces faux rebelles. La véritable démocratie ne consiste pas à déplacer les dominés dans la pyramide, mais à l’abattre.
Bibliographie
Étienne de La Boétie – Discours de la servitude volontaire (vers 1549, publié en 1576).
Antonio Gramsci – Cahiers de prison (1929–1935), sur l’hégémonie culturelle.
Guy Debord – La société du spectacle (1967).
George Orwell – 1984 (1949), notions de novlangue et de double pensée.
Pier Paolo Pasolini – Ultima intervista (1975), trad. Allia 2010 : « Il n’y a plus d’êtres humains, mais d’étranges machines qui se cognent entre elles ».
Benito Mussolini – La doctrine du fascisme (1932), Enciclopedia Italiana.
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